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22 novembre 2020 : Un scrutin, moult leçons

Comme il fallait s’y attendre, le Président Roch Kaboré a remporté la présidentielle du 22 novembre sans coup férir. L’opposition qui croyait mordicus à un second tour, n’y a vu que du feu. En réalité, cette opposition s’est engluée dans des erreurs stratégiques et politiques qui lui ont été fatales. L’ensemble de la classe politique burkinabè doit tirer les leçons de ce double scrutin qui s’est déroulé de manière assez satisfaisante en dépit des insuffisances constatées sur le terrain. Les enseignements se situent à différentes échelles.

Dans l’opposition, on ne bâtit pas sa stratégie électorale sur une probable victoire au second tour : Face à un Président candidat à sa propre succession qui bénéficie de la prime du sortant, il est suicidaire pour une opposition de n’envisager une unité d’action qu’en cas de second tour. Penser à un second tour, c’est déjà douter de ses forces. Cette posture est très handicapante dans une compétition électorale.

L’opposition a raté le coach dès le départ. Le fait d’aller aux élections en rangs dispersés a émietté énormément ses voix. Pendant ce temps, le candidat Kaboré ne faisait que renforcer sa base avec les nombreux partis et mouvements qui appelaient à voter pour lui. Cette dynamique n’a pas du tout été constatée au niveau de l’opposition. Chacun prêchait pour sa propre chapelle même s’il fallait pour cela voler dans les plumes de ses propres « camarades » opposants.

Pendant que certains s’adonnaient à des envolées lyriques, d’autres opposants estimaient qu’il fallait à tout prix se démarquer des « promesses démagogiques ». Les différentes sorties ont fini par convaincre l’opinion que l’accord politique avait été échafaudé rapidement, juste pour la circonstance et qu’il ne reposait ni sur une idéologie commune ni sur des bases profondes et structurelles. Dès cet instant, le second tour devenait un miroir aux alouettes, une arlésienne. Une analyse lucide et objective des forces de l’opposition lui aurait permis de s’en rendre compte et de ne pas disperser inutilement ses énergies.

Le coup KO est bien possible. Il faut y croire : une campagne électorale, ce sont des slogans. C’est de la rhétorique. Lorsque l’on s’engage dans une élection, il faut être dans un état d’esprit de vainqueur. C’est ainsi que la loi de l’attraction agit. La communication politique doit par la suite être imprégnée de cet élément de langage pour que suivent les moyens de réaliser ses ambitions. Cela passe par la mobilisation, les idées, la séduction de l’électorat. Le candidat Roch et ses soutiens étaient dans cette dynamique.

Ils sont restés focalisés sur les réponses concrètes que les populations attendaient plutôt que de s’adonner à des attaques en dessous de la ceinture ; jeu favori de certains de leurs contempteurs. La sérénité du candidat, sa chaleur humaine, l’enthousiasme de sa campagne ont scellé définitivement le sort de l’opposition qui ne pouvait que recevoir le coup de massue en pleine figure. Cerise sur le gâteau, Roch et le MPP ont fait mieux qu’en 2015 avec un gain de 04 points à la présidentielle (57,87%).

On ne joue pas à la roulette russe avec les questions sécuritaires : Les questions sécuritaires sont si importantes à l’échelle d’un État qu’il faut se garder de les traiter avec légèreté. L’essentiel de la stratégie anti-terroriste de l’opposition repose sur la négociation avec les terroristes. Ce mode opératoire passe très mal dans l’opinion car il est synonyme de capitulation. Ni plus. Ni moins. Il est même en porte à faux avec la devise du pays : « la patrie ou la mort nous vaincrons ».

Les Burkinabè ont toujours été un peuple fier, combattant et valeureux. Prôner une négociation tout azimut pour une guerre que l’on peut et que l’on doit gagner est une solution de facilité ; une espèce de refuge dans une zone de confort quand la défense de la patrie exige des réponses énergiques. A travers ses sorties intempestives et énigmatiques sur les questions sécuritaires, l’opposition se faisait progressivement hara-kiri jusqu’à s’auto-administrer le coup de grâce. On ne saurait ramer à contre-courant de l’histoire quand il y a péril en la demeure. Un candidat à la magistrature suprême doit incarner de l’autorité, de la poigne et ne guère tergiverser sur certaines questions.

Contester les résultats est un non-sens quand on ne dispose pas de preuves matérielles : A mesure que la CENI publiait les résultats, sentant la victoire leur échapper, les opposants ont voulu jouer aux vierges effarouchées. Les signataires de l’accord politique se sont même fendus d’une déclaration au vitriol à travers laquelle ils annonçaient qu’ils ne reconnaitraient pas les résultats. Ils évoquaient alors des irrégularités et fraudes massives orchestrées par le parti au pouvoir. Mais au fil des jours, aucune preuve matérielle n’est venue corroborer ces affirmations.

Le mammouth a donc fini par se dégonfler quand les candidats malheureux se sont résolus à rejoindre le candidat déclaré vainqueur à son QG de campagne pour le féliciter. L’opposition venait ainsi de comprendre l’inanité d’une crise post-électorale.

En définitive, malgré les imperfections, le Burkina Faso aura réussi ses élections et renforcé son processus démocratique. Il faut à présent s’unir pour faire face aux défis de l’heure. Il ne doit y avoir aucune place pour une chasse aux sorcières.

Opposants et gouvernants doivent continuer à jouer leur rôle dans le strict respect des règles édictées pour le développement du Burkina Fao. Il convient particulièrement de saluer le discours d’apaisement, d’ouverture et d’humilité prononcé par le Président réélu après la proclamation des résultats provisoires. Le Burkina Faso continue de faire rêver le monde. The game must go one !

Jérémie Yisso BATIONO

Enseignant chercheur

Ouagadougou

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