Elections 2020 au Burkina : L’Organisation FASO NEEMA salue la maturité démocratique des acteurs
Dans le communique ci-après, l’Organisation FASO NEEMA qui a déployé des observateurs pour le double scrutin burkinabè se satisfait de la bonne tenue de cette échéance et formule des recommandations à l’endroit des différents acteurs.
L’Organisation FASO NEEMA a initié un projet dénommé « Action citoyenne pour des élections apaisées au Burkina Faso ». La première phase de ce projet a couvert les élections couplées présidentielle et législatives du 22 novembre 2020. Il s’est agi pour l’organisation d’accompagner le processus électoral à travers des activités de sensibilisation menées dans un premier temps, avant le jour du scrutin, et qui étaient relatives à l’information, l’éducation et la communication auprès des électeurs et leaders afin de prévenir et gérer tout différend et promouvoir la paix et la cohésion sociale au sein des communautés. Et dans un second temps, à déployer le 22 novembre, des équipes d’observation dans quatre (4) régions et plusieurs communes du pays, à savoir : Région de l’Est (Commune de Fada N’Gourma) ;
Région du Sahel (Commune de Dori) ; °. Région du Centre Nord (Commune de Kaya, Commune de Kongoussi, Commune de Pissila) ; Region du Centre (Commune de Ouagadougou et les communes de Koubri, Loumbila, Saaba, Pabré et Tanghin Dassouri). . Ces interventions ont pu se dérouler en dépit du contexte dans lequel se sont tenues ces échéances électorales.
Contexte des élections
En effet, les élections couplées du 22 novembre ont été celles de tous les défis : sécuritaire, sanitaire, démocratie.
Sur le plan sécuritaire, elles sont intervenues à une période où le Burkina Faso vit une crise humanitaire sans précédent occasionnée par de multiples attaques meurtrières d’individus non identifiés. On dénombre plus de 1 100 000 personnes déplacées internes dont bon nombre n’ont pu exercer leur droit civique. Aussi, 15 communes (sur 351) et 860 localités et villages ont été exclus du processus électoral pour des impératifs sécuritaires. Le jour même des élections, des bureaux de vote n’ont pas pu ouvrir dans des zones dites à risques du fait de menaces avérées.
Sur le plan sanitaire, la pandémie du covid-19 continue de sévir alors que ce processus électoral a été un prétexte pour instaurer un relâchement dans le respect des mesures barrières prises pour éviter la propagation de la maladie.
Sur le plan démocratique, le pays s’est accolé l’image d’un exemple de démocratie en Afrique, héritée des élections de 2015, et qu’il fallait sauvegarder. Au-delà, ce scrutin est également intervenu dans un contexte où pour la première fois de l’histoire du pays, les votes des burkinabè de l’étranger et ceux des prisonniers ont été admis.
La mission d’observation électorale de FASO NEEMA
Ainsi, sur la base de la convention N° 2020-54/CENI/SG/DAF signée entre la CENI et l’association FASO NEEMA, l’Organisation a envoyé une cohorte d’observateurs composée d’une centaine de personnes dont des superviseurs qui assurent la coordination sur le terrain ; des observateurs terrain qui sont des volontaires de FASO NEEMA ayant été préalablement formés avant de commencer et d’une équipe centrale de coordination opérant depuis Ouagadougou. Ces ressources humaines déployées ont toutes reçu des lettres d’accréditations de la CENI pour la conduite à bien de leur mission sur le terrain qui a couvert un échantillon de 860 bureaux de votes et une dizaine de centres de compilation des résultats sur l’ensemble des quatre régions couvertes par l’observation électorale.
De l’observation des opérations de vote
Les votes du 22 novembre ont concerné deux scrutins : le scrutin présidentiel qui a mis aux prises 13 candidats ; et le scrutin législatif qui a vu la participation de 126 partis et formations politiques. Ainsi, les équipes d’observateurs déployées dans les localités concernées ont fait les constats suivants :
Constats positifs
En ce qui concerne l’ouverture et la fermeture des bureaux de vote, la loi électorale dispose que celle-ci intervient à 6h du matin pour l’ouverture et à 18h pour la fermeture. Les équipes ont observé que ces horaires ont dans l’ensemble été respectés. Dès 6h du matin 90% des bureaux couverts par la mission d’observation avaient ouvert leurs portes. Cette proportion est passée à 95% à 6H30 et 99% à 7H. La fermeture est aussi intervenue aux horaires indiqués dans la majorité des bureaux de vote.
Pour ce qui est du déroulement du vote à proprement parler, les équipes ont constaté une forte mobilisation des électeurs dont 30% de taux de participation à 12H, 40% à 15H30 et 50% à la fermeture du bureau de vote. Ceux-ci ont effectivement voté selon les dispositions du code électoral, notamment en présentant préalablement la carte d’électeur et dans les isoloirs après avoir été astreints à la vérification de toute trace d’encre indélébile sur le doit, et ce en vue d’éviter de multiples votes.
Il convient également de signaler la présence effective d’une part des agents des bureaux de vote à leurs postes respectifs, et d’autre part celle des forces de défense et de sécurité pour assurer la sécurité des personnes et des biens.
Néanmoins, quelques irrégularités ont été constatées par les différentes équipes et qu’il convient de signaler également même si celles-ci ne sont pas de nature à entacher la régularité du scrutin.
Constats défavorables
En termes d’irrégularités, les équipes ont noté l’ouverture tardive de certains bureaux de vote, avec des retards allant de quelques minutes à des heures. A Ouagadougou par exemple, l’un des bureaux de vote sillonné a ouvert dans l’après-midi à 16h. Dans ces conditions, l’horaire de fermeture n’a pu être également respecté. Elle a été repoussée de quelques heures, ou après le départ du dernier votant.
Dans certains cas, les bureaux de vote ont été installés à l’air libre en raison du manque de salle pour les héberger. Des difficultés pour des électeurs à retrouver leurs noms sur les listes électorales ont été enregistrées, pendant que certains ne parvenaient pas à retrouver leurs bureaux de vote en raison de leur ancienne carte d’électeur.
Les équipes ont également noté un retard dans l’acheminement du matériel électoral tels que les procès-verbaux et l’absence de certaines fiches. Dans le même sens, elles ont constaté une faiblesse des capacités des représentants de l’équipe du bureau des votes, entrainant ainsi des vices de procédures. A ce niveau, les équipes déplorent le non affichage des listes électorales à l’entrée de bon nombre de bureaux de vote.
La faible représentation de l’ensemble des partis politiques qui n’ont pu de par ce fait, observer les manquements à la loi électorale et les faire consigner dans les PV est aussi à signaler. Il ressort des constats, que seuls des partis comme le MPP, l’UPC, le CDP et AGIR ENSEMBLE étaient omniprésents sur l’ensemble des bureaux de vote sillonnés par nos observateurs. Néanmoins d’autres n’ont pu avoir accès aux salles de vote en raison du manque de place qui y prévalait.
Les observateurs ont pu constater également que le respect du protocole sanitaire mis en place contre le COVID-19 était environnement de 66%, soit deux électeurs sur 3.
De l’observation des opérations de dépouillement
Après le vote, les agents des bureaux de vote ont immédiatement procédé à la phase des dépouillements. Celle-ci s’est bien passée dans l’ensemble.
Constats positifs
Selon nos observateurs, le dépouillement a été public et effectué en présence des présidents des bureaux de vote, des représentants des partis politiques et sous le regard des observateurs nationaux et internationaux. Une certaine transparence et sérénité a entouré d’une manière globale l’étape des dépouillements.
Constats défavorables
Cependant, la principale difficulté relevée par nos observateurs à ce stade du processus électoral a été l’usage de matériel d’éclairage inapproprié comme les torches etc.
Nous pouvons également noter dans une certaine mesure, les interruptions des opérations de dépouillement dans certains bureaux de vote.
En somme, il a été constaté le fait que certains représentants des partis politiques n’ont pas de manière systématique exigé la consignation des irrégularités constatées dans les PV de dépouillement.
De l’observation de la phase du contentieux électoral
La phase du contentieux électoral qui était si redoutée avec des indices de tensions post électorales a pris une trajectoire favorable 48 heures après le double scrutin. Tous les candidats et partis politiques dans leurs déclarations ont privilégié la voie légale de règlement de leurs contentieux électoraux. Cette posture de la classe politique dans un contexte sous régional marqué par de récents soubresauts post électoraux est à saluer et à mettre à l’actif de la classe politique burkinabè.
Recommandations
Dans l’ensemble, de nombreux efforts ont été consentis de part et d’autre depuis le début de ce processus électoral et ce, en vue de préserver un climat de cohésion sociale. A cet effet, FASO NEEMA tient à féliciter tous les acteurs impliqués pour le travail abattu, qu’il s’agisse des autorités administratives, de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), des partis politiques, de la société civile et des médias. Un satisfecit est à manifester également à l’endroit des forces de défense et de sécurité car il n y’a pas eu d’incident sécuritaire lors de ce double scrutin. Toutefois, elle se permet de formuler quelques recommandations à l’ensemble de ces acteurs afin de renforcer la crédibilité et l’exemplarité des processus électoraux au Burkina Faso, renforçant ainsi sa culture démocratique.
Aux autorités gouvernementales
FASO NEEMA recommande que :
De créer une agence nationale permanente, composée d’experts électoraux et chargée d’administrer les opérations de vote
D’encourager la nomination ou désignation de Commissaires de la CENI aux profils davantage techniques en phase avec les exigences des opérations électorales
Mettre en place une chambre de contrôle politique, chargée de certifier toutes les étapes du processus électoral
D’augmenter le budget de sensibilisation électorale et d’observation électorale, afin de renforcer les capacités de la CENI et de ses partenaires sur ces étapes clés du processus électoral
A la CENI
Il lui appartient :
D’utiliser tous les canaux d’information pour notifier à tous les électeurs concernés par toute éventuelle modification de l’emplacement de leurs bureaux de vote
D’organiser le vote anticipé des personnels en uniforme afin de leur permettre d’être disponibles le jour du vote pour la sécurisation du scrutin
De renforcer les capacités des membres des bureaux de vote et de tous les acteurs qui interviennent dans le processus électoral
De veiller à ce que tout le matériel de vote soit effectivement acheminé vers les bureaux de vote avant le début des échéances électorales
D’afficher au préalable la liste des bureaux de vote en vue de permettre leur identification par les électeurs avant le jour du scrutin
De s’assurer de l’affichage de la liste des électeurs sur les portes des bureaux de vote avant le jour du scrutin
De prendre les dispositions nécessaires pour que les sites désignés comme bureaux de vote soient dotés de toutes les commodités nécessaires.
Aux partis politiques et aux indépendants
Il leur revient de travailler à ce qu’ils soient effectivement représentés dans les bureaux de vote, il y va de la crédibilité du scrutin
Revoir le profil de leurs représentants dans les bureaux de vote, afin de disposer des points focaux avec un niveau de connaissance acceptable de la loi électorale
De renforcer les capacités de leurs représentants sur les rôles et missions qui leur sont assignés tout au long du processus électoral
D’encourager la mutualisation de la représentation de l’opposition dans les bureaux de vote afin d’avoir un maillage rationnel de la cartographie des bureaux de vote
De continuer à travailler à instaurer un climat de paix, de cohésion sociale avant, pendant et après les élections
De faire preuve de retenue et de prudence dans les propos tenus lors du processus électoral
D’user des voies de recours légales en cas de contestations des résultats
Aux médias et à la société civile
De continuer la sensibilisation des populations en matière de cohésion et de dialogue social
De vulgariser les messages clés sur l’information électorale
De mettre en place une plateforme de concertation entre toutes les coalitions ou alliances impliquées dans la sensibilisation et l’observation électorale
De travailler à l’harmonisation des outils de sensibilisation électorale, ainsi que des formulaires d’observation électorale
De constituer un réseau de journalistes spécialistes des questions électorales représenté dans chaque province et ayant un contact régulier avec les démembrements de la CENI et la société civile du domaine des élections.
A propos de l’organisation FASO NEEMA
FASO NEEMA est une organisation de droit burkinabé qui intervient dans le triptyque Humanitaire- Paix- Développement avec pour VISION de : « faire des communautés humaines des atouts de la résilience et du développement durable ». Elle se donne pour objectif principal de « participer aux réponses aux urgences et crises humanitaires et de soutenir la résilience, la paix et le développement durable ». C’est ainsi que l’association a opté de se mettre au service des personnes dans le besoin, afin de les assister, les soutenir, renforcer leurs capacités et plaider leur cause auprès des porteurs d’obligation, aux lieux et espaces de pouvoirs ou d’influence.
Au-delà de l’humanitaire, son pilier « Paix », couvre les questions relatives à la cohésion et au vivre ensemble, au renforcement de la gouvernance, à l’Etat de droit et à la citoyenneté responsable. Ainsi, pour les années électorales 2020 et 2021, FASO NEEMA s’est engagée à apporter sa contribution à la participation du citoyen au jeu démocratique, d’une part en accompagnant le processus électoral et d’autre part en œuvrant pour le renforcement de la cohésion sociale.
Fait à Ouagadougou le 01 Décembre 2020
Pour plus d’informations : www.fasoneema.bf
Pour l’Organisation FASO NEEMA,
Le Secrétaire General