Au Burkina Faso, l’on peut désormais compter sur Safiatou Ouédraogo pour les soins des plaies graves dues au diabète ou à d’autres facteurs. Grâce à son professionnalisme, des patients, qui avaient perdu tout espoir de guérison, ont pu sauver leurs membres pour moins de 40 000 F CFA.
Ancienne élève du lycée Newton de Ouagadougou, Safiatou Ouédraogo, mariée et mère de deux enfants, a vécu pendant 27 ans en Allemagne avec sa famille. Elle a travaillé comme infirmière avant d’opter pour une formation en podologie. Par la suite, dame Ouédraogo se spécialise dans les soins des plaies. Première podologue femme en Afrique de l’Ouest, la dynamique Safiatou Ouédraogo a participé en 2016 à des congrès en qualité de conférencière, notamment à Abidjan.
Plus tard, elle décide de rentrer au Burkina Faso pour apporter son savoir-faire, en termes de prise en charge des patients souffrant de plaies aux pieds. Pour ce faire, elle crée, en septembre 2019, sa propre structure de travail : le cabinet « Hoffnung (espoir en français) », dans le quartier Zone I de Ouagadougou, non-loin de la pédiatrie Charles-de-Gaules.
Officiellement fonctionnelle depuis janvier 2020, cette jeune structure hospitalière offre une gamme de services comme les soins préventifs pour les diabétiques, les soins des ongles incarnés, le traitement des malformations des pieds, etc. Safiatou Ouédraogo, la quarantaine bien sonnée, soigne également et surtout les plaies chroniques aux pieds qui affectent souvent les personnes atteintes de diabète. De ses « doigts magiques », elle réussit avec brio à redonner espoir et vie à ses patients et patientes. Dans son cabinet, Safiatou Ouédraogo ne travaille pas seule ; elle s’est entourée d’une jeune et dynamique équipe d’infirmiers.
En cette matinée du 9 décembre 2020, à notre passage à son lieu de travail, un nombre non-négligeable de patients, venus d’horizons divers, y était déjà présent pour des soins. Parmi eux, Sorry Keita, originaire de Bobo-Dioulasso. Il traîne une plaie au pied depuis 25 ans. Un mal qui l’a conduit à faire le tour des hôpitaux de la ville de Sya, sans réussir à contenir sa douleur. Il décide alors de tenter sa chance du côté de la médecine traditionnelle. De bouche à oreille, son épouse entendit parler du cabinet Hoffnung de Safiatou Ouédraogo. Elle en parla à son mari malade qui ne trouva aucun inconvénient à s’y rendre pour tenter de nouveau sa chance.
- Sorry Keïta
A son arrivée au cabinet de soins de la podologue, au moyen d’un tricycle, le quinquagénaire Sorry Keita croupissait sous la gravité de son état. Il est accueilli selon les règles qui réconfortent le malade. Après cinq mois de prise en charge adaptée, le résultat est aujourd’hui plus que satisfaisant. En effet, révèle-t-il, « ma plaie commence à se cicatriser. Je peux marcher sans béquilles… Ce qui m’encourage à suivre les pansements que me font les infirmières ».
Sa prestation ne coûte que 2 500 F CFA…
Mahamoudou Compaoré, lui, est diabétique depuis 2009. Il a également une plaie au pied, « vieille » de deux ans. Mais en dépit des soins qu’il recevait, sa plaie ne guérissait guère. C’est ainsi que son dermatologue lui recommanda le cabinet Hoffnung. Présentement, soutient-il tout ému, « je suis à mon premier pansement et la plaie est en train de finir. Actuellement, j’arrive à marcher sans difficulté. Mes pieds sont devenus légers, et mes orteils ont retrouvé leur sensibilité ». Son traitement lui a coûté la somme de 37 250 F CFA. Une somme dérisoire comparativement aux centaines de milles dilapidés ailleurs, et sans succès. Satisfait des résultats, M. Compaoré dit avoir suggéré à son tour, ce cabinet à des connaissances.
- Mahamoudou Compaoré
Assis au fond de la salle de pansement, Bachirou Rabo, un ancien couturier, souffre d’une plaie profonde au pied. Perdu dans ses pensées, il affiche un visage triste de douleur. « Je souffre depuis 2007. Au début, c’était la jambe gauche. Pour les soins, j’ai été à l’hôpital mais ça n’a pas marché. Ma jambe a été amputée. Présentement, je porte une prothèse. Un an plus tard, l’autre pied a pris la même maladie. Grâce à des proches, j’ai appris l’existence du cabinet. Maintenant, il y a de l’amélioration. Je rends grâce à Dieu et je compte sur Mme Ouédraogo qui me soutient socialement ainsi que d’autres bonnes volontés », a-t-il témoigné. Au cabinet Hoffnung, la qualité des soins est une exigence, voire un sacerdoce. Pour ce faire, il y est utilisé des techniques appropriées.
« Le simple outil de rinçage que j’utilise, ce n’est pas ce que les autres utilisent. Egalement, les pansements que j’ai appris au cours de ma formation, tout le monde ne les maîtrise pas. En effet, nous avons appris une technique qu’on appelle ‘‘Modern wund versorgung ». Du coup, quand on voit une plaie, on sait déjà quel genre de pansement faire et quel type de produits de rinçage utiliser. On n’a pas une seule manière de dispenser nos soins. Je peux faire un traitement aujourd’hui, demain quand le patient revient, je change la manière de faire », explique l’experte des plaies chroniques.
- Bachirou Rabo
Dans son univers, le côté social prend souvent le dessus, même si, avoue-t-elle, « mes forces et mes moyens sont limités ». Comme quoi, il y a encore sur cette terre des âmes généreuses qui mettent toute leur énergie au service du patient, quels que soient son âge, son sexe ou son statut social.
« Il y a certains patients qui viennent sans le minimum, et d’autres commencent le pansement et vers la fin, ils n’ont plus les moyens pour poursuivre le traitement. Pour ne pas que la plaie rechute, je finance les soins jusqu’à la fin. Et ça, ce n’est pas une personne ni deux personnes… Elles sont nombreuses », confie Mme Ouédraogo. Puis d’ajouter : « Je suis venue pour qu’on s’entre-aide ici. Il y a des patients qu’on avait programmés pour leur amputer un membre mais j’ai pu les récupérer. Je n’ai pas dit que je suis Dieu. Seulement, il a fait que j’ai eu la chance de faire la formation ».
Partie du néant, Safiatou Ouédraogo est en train de se frayer une place dans le milieu, par la qualité de son travail et surtout par son humanisme. Son souhait, c’est la mise en place d’un mécanisme de prise en charge financière pour les soins des membres malades chez les diabétiques. Car, il y a beaucoup de gens qui s’isolent à cause de leur plaie et qui font des dépressions.
- Yasmine Zoungrana
A court terme, elle espère avoir un local plus adapté que celui qu’elle occupe actuellement. Les travailleurs du cabinet ont une perception positive de leur employeur. « Je suis ici ça fait quatre mois. Quand je venais, je me disais que le début n’allait pas être facile vu que c’est une femme. Mais lorsque j’ai commencé le travail, j’ai vu que je m’étais trompée. Tout va pour le mieux. Elle n’est pas compliquée », avoue Yasmine Zoungrana, qui informe que les difficultés que le personnel rencontre, c’est souvent avec les patients. Néanmoins, ils arrivent à les surmonter. Car, ils sont animés par la volonté de soulager la douleur des malades.
Aïssata Laure G. Sidibé
Lefaso.net
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