2020 au Burkina : Une économie beaucoup éprouvée
L’année 2020 a été très éprouvante au plan économique pour le Burkina Faso. À la crise humanitaire liée à l’insécurité, s’est ajoutée la crise sanitaire avec le Covid-19. Celle-ci a eu pour conséquence de paralyser les différents secteurs économiques et partant la croissance de façon générale. 2020 n’aura pas été une année de prospérité à tout égard pour l’économie burkinabè, dira-t-on. Il est alors judicieux de faire un feedback sur quelques évènements qui ont marqué la vie économique du pays.
C’est une année comme on n’en a pas l’habitude de vivre. Avant 2016, les Burkinabè pouvaient aller et revenir sans en être inquiétés. La crise sécuritaire est venue mettre en péril cette libre-circulation à l’intérieur du pays. Comme si cela n’était pas suffisant, une crise sanitaire s’est invitée dans la danse, mettant à mal la mobilité des Burkinabè, les voyages à l’étranger. Cet état de faits a impacté négativement sur l’économie burkinabè en 2020. Selon une enquête de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso (CCI-BF) réalisée auprès de 1 400 entreprises formelles et informelles des treize régions, les entreprises ont perdu, au 30 avril 2020, plus de 685,4 milliards de F CFA.
Le chiffre d’affaires moyen, qui était de 606 831 F CFA, a chuté à 79 359 F CFA, du fait des mesures restrictives instaurées par le gouvernement, soit une réduction moyenne de 88,95%. A la même date 78% des entreprises font face à des méventes, 57% ont suspendu les investissements et 52% font face à des difficultés de trésorerie. D’autres, soit 41% des entreprises, sont confrontées à des difficultés d’approvisionnement et 8% à des pertes liées aux péremptions de marchandises.
Pour mesurer l’ampleur de la situation, il faut se référer au message du président Roch Kaboré du 2 avril quand il annonçait les mesures d’accompagnement. Le chef de l’État dit ceci : « Les conséquences attendues de cette pandémie sur notre économie sont : La réduction du taux de croissance de 6,3% à 2% en 2020 ; La baisse des recettes publiques, estimée à 306 milliards de FCFA, soit un déficit budgétaire de 5% ; Le ralentissement général des activités économiques, tous secteurs confondus avec pour conséquence des tensions de trésorerie de l’Etat. »
L’épreuve a été dure à porter pour le secteur privé. Cependant, tous les secteurs d’activités n’ont pas été affectés au même degré. Les secteurs du tourisme et de l’hôtellerie sont parmi les plus touchés. Les transports et la restauration également n’ont pas été en marge de ce problème. Pour lutter contre la pandémie le gouvernement a consacré plus de 394 milliards de F CFA annoncés par le président du Faso, Roch Kaboré, le 2 avril 2020.
Prise en charge des factures d’électricité et d’eau, prise en charge de loyers, suspension de recouvrement et redressements fiscaux, l’annulation de pénalités et amendes exigibles, appui au secteur informel, etc. C’est un Etat qui essaie d’amoindrir les pertes subies par les entreprises. Un Fonds de financement de la relance économique, doté d’une enveloppe de 100 milliards de FCFA, a même été institué avec pour objectif de contribuer à sauvegarder les emplois qui étaient menacés et soutenir les entreprises à surmonter les difficultés liées au Covid-19.
Une économie qui s’est malgré tout montrée dynamique dans plusieurs secteurs
L’ensemble des efforts ont permis d’amoindrir les effets de la pandémie et de remettre l’économie sur les rails. La crise sanitaire n’aurait donc pas eu raison de l’économie burkinabè. « En dépit d’un contexte national et international difficile, la croissance économique est au rendez-vous dans notre pays, grâce à une maitrise des grands équilibres macro-économiques et à la poursuite des réformes au niveau des principales régies financières, afin d’accroitre la mobilisation des ressources internes » a affirmé le président Roch Kaboré dans son message du 31 décembre 2020.
De façon générale en 2020, il a été constaté un dynamisme important dans les différents secteurs d’activités de l’économie. Dans le secteur de la cotonnade, il y a le Salon international du coton et du textile (SICOT) tenu en janvier 2020, qui a vu l’inauguration de l’usine d’engrenage du coton biologique à Koudougou.
Le Burkina a aussi mis sur le marché ses premiers tissus 100% coton local, grâce à l’ouverture en 2020 de l’usine de retordage de fil et de tricotage (COTEXA) installée à Tanghin Dassouri. On peut également citer l’initiative « une région une unité industrielle », la poursuite avec la labélisation des produits made in Burkina, aussi avec l’assainissement du marché des huiles alimentaires et la lutte contre la fraude, la contrefaçon et les boissons frelatées, ainsi que la régulation des importations.
Un Burkina mieux armé pour affronter 2021
Sur le plan de la coopération, le Burkina a bénéficié d’énormes appuis de ses partenaires techniques et financiers. L’appui financier de la Banque mondiale intervenu le 15 décembre 2020, ne passe pas inaperçu, tant le montant suscite la curiosité. En effet, c’est un total de trois projets que cette institution a approuvé pour le Burkina Faso pour un portefeuille global d’environ 1,15 milliards de dollars US, soit plus de 600 milliards de F CFA au prix actuel du dollar (1 dollar = 531 F CFA). C’est un soutien pour appuyer la prévention des conflits, la résilience face à la crise humanitaire et sanitaire et enfin le développement territorial et de résilience. On peut également citer le Projet d’appui à la compétitivité en Afrique de l’ouest volet Burkina Faso (PACAO-BF) financé par l’Union européenne à hauteur de 5 milliards de F CFA.
Ce projet est destiné aux secteurs de l’huile des grains de coton, du miel et du solaire.
Avec la Chine, le Burkina a obtenu une exonération de droits de douane pour 97% de ses produits. C’est un certificat d’origine que la Chine populaire a lancé en vue d’élargir le champ d’exportation du Burkina. Faut-il le signaler, les exportations de produits burkinabè vers la Chine populaire ont connu une croissance, passant de 5 milliards en 2017 à 7 milliards de francs CFA en 2018 et 8 milliards de francs CFA en 2019 ; soit une croissance de 1,6 % entre 2018 et 2019.
On peut donc affirmer sans risque de se tromper que le Burkina est mieux armé pour affronter 2021. Dans son message de nouvel an, le président du Faso affirmait : « Pour le peuple burkinabè, c’est une année chargée d’espoir qui commence, comme pour faire oublier les souvenirs douloureux et les situations difficiles qui ont marqué l’année qui s’achève ». Avec un peu de volonté et de rigueur, les choses devraient aller pour le mieux au pays des Hommes intègres.
- Passage F CFA à Eco (photo pas trop sûre)
Des sujets très attendus par les populations ont manqué au rendez-vous
En 2020, il y a eu également des rendez-vous manqués. Celui du passage du franc CFA à l’Eco pour les huit pays membres de l’UEMOA, dont le Burkina Faso. C’était un sujet très attendu par les populations, qui semblent finalement désintéressées. Jugée être une simple réforme du franc CFA ou un néo CFA, cette réforme a finalement déçu les populations qui ont fini par abandonner le débat. Qu’à cela ne tienne, c’est toujours un sujet qui probablement va refaire surface en 2021.
Il y a eu également le report de plusieurs évènements à caractère festif au Burkina Faso, dont le SIAO, la SNC à Bobo-Dioulasso, etc. Enfin au plan économique, l’installation des usines de transformation de la tomate, dans trois régions du Burkina, a également manqué au rendez-vous. La liste est longue et 2021 s’annonce très chargée et pleine de défis au plan économique.
Etienne Lankoandé
Lefaso.net