Le Burkina Faso a été bénéficiaire d’un compact avec le Millenium challenge corporation, qui a fait ses preuves dans le domaine agricole. Après ce compact, le pays réussit à décrocher un second compact, mais cette fois-ci dans le domaine des énergies. Pour ce faire, une unité de coordination a été mise en place et a procédé à la formulation du second compact qui a été approuvé par le MCC. Une bouffé d’oxygène pour soutenir le privé à accroitre ses investissements et soutenir la croissance économique. Pour en savoir davantage sur ce compact, Lefaso.net a rencontré le coordonnateur de l’unité de formulation du compact, Dr Tambi Samuel Kaboré. Les détails de l’entretien dans l’interview ci-dessous.
Lefaso.net : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Dr Samuel T. Kaboré : Merci d’abord pour l’opportunité d’échanges. Ça donne effectivement l’occasion d’apporter des éléments d’informations au public et à vos lecteurs. Je suis Kaboré Tambi Samuel, je suis docteur en économie, enseignant chercheur à l’université Thomas Sankara. C’est de là que j’ai été retenu pour diriger le processus de formulation du second compact et c’est ce que nous avons fait jusqu’à maintenant.
Lefaso.net : Qu’est-ce que le second compact du Burkina Faso et quelle est la mission de votre Unité ?
Dr Samuel T. Kaboré : Je commencerai d’abord par la mission. Il faut dire que l’unité de coordination et de formulation du second compact a été créée par décret en avril 2017, avec pour mission principale de conduire au nom de l’Etat burkinabè le processus d’élaboration du second compact, conformément aux priorités du PNDES et aux procédures du MCC. Et partant de là, nous avons commencé le travail en avril 2017 que nous avons conduit jusqu’à mai 2017.
Cela nous a permis de faire les quatre phases de la formulation de ce second compact qui est centré sur le domaine de l’électricité avec trois projets. Donc le compact est un ensemble de trois projets visant à atténuer les contraintes d’accès, de faible qualité et de coût élevé de l’électricité. Il a été approuvé à l’unanimité par le Conseil d’administration du MCC le 17 juin 2020 et le 13 août 2020 il a été signé à Washington entre le gouvernement du Burkina et le MCC.
Lefaso.net : Au tout début il a été dit que le Burkina a été sélectionné au regard d’un certain nombre de critères dont la bonne gestion. Comment expliquez-vous le fait que le MCC ait accepté de financer le second compact avec la corruption qui a « la peau dure » au Faso ?
Dr Samuel T. Kaboré : Je dois d’abord préciser que le MCC est résolument engagé dans la lutte contre la corruption. Le MCC en a défini des politiques et des principes, et même la gestion quotidienne des compacts ont amplement montré la détermination de l’institution a lutté contre la corruption. Ce qui fait que l’institution a un excellent classement mondial. Voilà pour moi une précision nécessaire avant de répondre à votre question. Maintenant comment la sélection se fait ? Le MCC sélectionne les pays sur la base d’un tableau de bord de 20 indicateurs. Il est attendu que le pays valide au moins 50% des indicateurs. Pour un pays donné, l’indicateur est dit validé lorsque sa valeur est supérieure à la médiane.
C’est-à-dire qu’il y a une note médiane qui a été définie pour l’indicateur et lorsque la valeur du pays est au-dessus de cette médiane, le pays a validé cet indicateur. Il faut au moins que la moitié des indicateurs soit validée pour que le pays puisse être éligible. Ce sont des indicateurs qui sont publiés par des organisations internationales telles que la Banque mondiale, l’OMS, l’UNESCO, etc. Pour revenir maintenant à l’indicateur qui est l’indicateur contrôle de la corruption, qui figure parmi les 20 cités, cet indicateur pour le Burkina a eu en 2020 la valeur de 0,81 qui est supérieure à la médiane (qui est de zéro pour l’ensemble des pays observés). Donc le Burkina a validé cet indicateur.
Donc vous comprenez que c’est un ensemble d’indicateurs produits par les institutions internationales. Un indicateur pris individuellement ne peut pas déterminer la décision, c’est la moyenne des indicateurs qui la détermine.
Bien sûr que les efforts de lutte contre la corruption doivent être maintenus et renforcés pour qu’on continue d’améliorer les indicateurs.
Puisque chaque année on continue de produire les indicateurs. Et même si vous avez déjà un compact, si vous n’arrivez pas à valider les 50% on suspend. Donc vous pouvez ne pas continuer à bénéficier du compact si vous n’arrivez pas à performer au niveau des indicateurs. Donc c’est une lutte permanente qu’il faut conduire pour pouvoir bénéficier toujours de décisions favorables en matière de poursuite des compacts.
Lefaso.net : Avant la signature le 13 août 2020, il y a eu un processus qui a abouti à la signature du compact. Pouvez-vous nous faire le bilan de ce processus ?
Dr Samuel T. Kaboré : Je disais tantôt qu’il y a eu quatre phases dans le processus de formulation. La première phase a consisté à l’analyse des contraintes à l’investissement privé et à la croissance économique. Cette phase s’est déroulée entre avril et août 2017. Quand nous l’avons achevée c’était à travers un rapport sur l’analyse des contraintes qui a été validé en août 2017.
Il y a deux contraintes majeures à l’investissement privé et à la croissance économique qu’on a pu identifier. C’est d’abord l’accès à l’électricité qui est faible (la qualité est faible et le coût est très élevé). La deuxième est la faible qualification de la main-d’œuvre. Cette étape a permis de cibler le domaine d’intervention du second compact. Nous sommes ensuite passés à la deuxième phase pour analyser les causes profondes des contraintes qu’on a identifiées à la première étape. Qu’est-ce qui fait que le problème de l’électricité se pose en ces termes ? Qu’est-ce qui fait que la main-d’œuvre est faiblement qualifiée ?
C’était entre septembre 2017 et janvier 2018.
Maintenant avant d’aller à la troisième phase, il a fallu faire des arbitrages parce que c’était difficile de couvrir les deux. Donc le gouvernement en accord avec le MCC a décidé de mettre l’accent sur la question de l’électricité plutôt que sur la main-d’œuvre. Voilà pourquoi le second compact est centré sur l’électricité. C’est ainsi que nous sommes passés à la phase trois, c’est-à-dire la définition des projets du second compact, qui s’est déroulée entre février et juin 2018.
Cette phase a permis de définir trois projets. Enfin pour la quatrième phase, il fallait maintenant faire les études de faisabilité de ces projets. Montrer que les projets satisfont les critères de choix du MCC. C’est-à-dire entre autre que le taux de rentabilité économique dépasse 10%, que le projet va bénéficier aux populations les moins nanties, et qu’également il va impacter la croissance et l’investissement privé. Voici des critères qui sont retenus et qui sont analysés pendant le processus d’étude de faisabilité. C’est à l’issue de ce processus qu’on peut décider si tel projet peut être maintenu ou pas suivant qu’il remplisse ou non les critères définis.
C’est ce qui nous a permis de maintenir les trois projets pour le second compact, qui fort heureusement satisfaisaient les différents critères. Ce qui a permis ensuite de passer à la phase des négociations qui ont abouti à la signature le 13 août du compact. Normalement on devait se rendre aux Etats-Unis, une forte mission composée des ministres concernés, des directeurs généraux, pour la phase des négociations. Mais étant donné le covid, on a fait des négociations virtuelles par visioconférence. C’est ainsi donc que les ajustements sont faits pour qu’on aboutisse au document du projet qui a été signé le 13 août.
Lefaso.net : Est-ce que vous pouvez revenir de façon plus précise sur les trois projets du compact dont vous venez de faire mention et nous donner aussi les objectifs et le coût du second compact ?
Dr Samuel T. Kaboré : Le coût global du second compact est de 500 110 595 dollars US. Quant aux trois projets le premier concerne le renforcement de l’efficacité dans le domaine de l’électricité. Il vise à opérer les réformes nécessaires et à renforcer la capacité des acteurs du secteur. C’est surtout pour faire en sorte que le cadre institutionnel, le cadre règlementaire, etc. s’améliorent et que les institutions dont par exemple le ministère, la SONABEL et les autres agences du ministère puissent voir leurs capacités renforcées de manière à pouvoir jouer efficacement leur rôle. Et c’est environ 62 millions de dollars pour ce projet.
Le deuxième projet, est le projet d’accroissement de l’offre d’électricité moins coûteuse, qui vise à augmenter la production de l’électricité, par exemple l’énergie solaire conformément à la vision du gouvernement d’accroitre la part des énergies renouvelables dans le mixte-énergétique. Et donc ce projet va contribuer à accroitre l’investissement du secteur privé dans la production d’électricité. Y a des conditions qui vont être mises en place, je pourrai citer par exemple une facilité d’assurance à travers l’adhésion du Burkina à l’agence des assurances du commerce.
Ce qui va permettre de couvrir un certain nombre de risque du secteur privé et de permettre d’investir davantage dans la production d’électricité. Il y a également dans ce deuxième projet la construction d’un centre de télé-conduite à Zagtouli aux standards internationaux. Celle qui se trouve vers Bogodogo, le dispatching, va aussi être rénovée pour servir de centre de repli au cas où le premier à des difficultés.
L’objectif c’est de pouvoir suivre le mouvement de l’énergie à travers le pays notamment être capable de démarrer ou d’arrêter une unité de production fixée quelque part. Donc il y aura un système de communication et de commande qui permettra à partir de ce centre de piloter l’ensemble des sources d’énergie avec possibilité d’alignement selon les coûts. Comme on connait le coût moyen par source, on aligne principalement les sources qui coûtent moins cher, de manière à réduire le coût de revient de la production du kilowattheure.
Le troisième projet c’est le projet réseau et accès. Ici il s’agit de renforcer et étendre le réseau de Ouagadougou et le réseau de Bobo-Dioulasso pour pouvoir rapprocher davantage l’électricité des usagers. Il y a un volet également accès et là il y aura des fonds qui vont être dédiés, pour soutenir l’accès, c’est-à-dire la connexion des ménages, l’usage productif, etc. pour permettre aux ménages d’accéder à l’électricité et aux PME/PMI de pouvoir utiliser plus efficacement l’électricité. Alors c’est le plus gros, c’est 235 millions de dollars. Le reste du budget est destiné bien évidemment aux autres charges telles que les charges administratives, suivi-évaluation, équipements, etc.
Lefaso.net : Vous avez parlé de renforcement de capacité, est-ce que ce volet ne concerne pas la problématique de la faible qualification de la main-d’œuvre ?
Dr Samuel T. Kaboré : On est resté dans le domaine de l’électricité. Mais à l’intérieur du domaine on a essayé de traiter la question de la faible qualité de la main-d’œuvre dans le secteur. On ne pouvait pas traiter cette question dans sa globalité parce qu’elle est très large et demande des investissements de très long terme.
Mais cette fois-ci pour le domaine de l’électricité il y a un effort qui est fait pour renforcer les capacités des acteurs. Il y a même un système de bourses qui est en train d’être étudié pour des filles par exemple, pour leur permettre d’aller étudier dans le domaine de l’électricité. Tout cela entre dans le cadre du renforcement des capacités dans le domaine de l’électricité.
Lefaso.net : Dans le second compact il y a beaucoup de termes techniques tels que le MCC, le MCA, l’aide-mémoire, est-ce que vous pouvez nous définir plus clairement ces termes pour nous étrangers au milieu ?
Dr Samuel T. Kaboré : L’aide-mémoire est un document qui définit les principaux engagements qui vont être respectés avant et pendant la mise en œuvre du compact. Ce document a été élaboré et signé le 6 décembre 2009 entre le Burkina et le MCC. Et dans ce document on consigne les principaux engagements des différentes parties. Avant que le compact ne rentre en vigueur, pendant le processus de mise en œuvre du compact, voici les engagements de chaque partie.
Le MCC c’est le sigle de Millenium challenge corporation. Il désigne l’organisme américain qui gère les fonds, qui fait les sélections des pays bénéficiaires, qui étudie avec le pays les projets du compact, qui suit le processus de validation et qui à la fin, confirme si les projets sont bons pour passer à la signature. C’est l’organisme américain qui gère les fonds et les compacts à travers le monde.
Maintenant le MCA c’est le Millenium challenge account. Lorsque par exemple un pays a été sélection et a pu définir avec succès le compact, on met en place cet organisme. C’est une structure plutôt de mise en œuvre. Cette structure va être mise en place d’ici là au Burkina Faso par décret. Il faut reconnaitre que les gens nous appellent abusivement le MCA, mais ce n’est pas juste. Le MCA est l’organisme de mise en œuvre du compact. Il n’est créé que lorsque vous avez un compact signé et par décret à l’intérieur du pays.
Lefaso.net : Est-ce qu’après création du MCA, le MCC a un droit de regard sur son fonctionnement ?
Dr Samuel T. Kaboré : Absolument. Le MCA fonctionne selon leurs principes. C’est-à-dire que les règles qui vont régir le fonctionnement du MCA sont selon les politiques qu’ils ont édictées, par exemple en matière de confidentialité, en matière de transparence, etc. C’est vrai qu’il y a un conseil d’administration qui va être mis en place au niveau national pour contribuer aux prises de décisions, à l’orientation, etc. mais la gestion financière suit les règles du MCC puisque c’est leurs ressources qui sont utilisées et doivent se conformer à leurs règles budgétaires. Par exemple les textes constitutifs du MCA sont discutés entre le gouvernement burkinabè et le MCC pour se mettre d’accord sur l’organigramme, le fonctionnement, l’administration, etc.
Lefaso.net : Après la mise en place du MCA, quelle sera la place et le rôle de l’unité de coordination et de formulation (UCF) du compact que vous dirigez ?
Dr Samuel T. Kaboré : On disparait tout naturellement. L’UCF fait place au MCA. Il est prévu qu’une fois que le MCA va être opérationnel, l’UCF disparait de facto. Avant que le MCA ne soit opérationnel nous on assure les activités qui préparent la mise en place du MCA. Mais une fois que c’est mis en place, l’UCF n’a plus de raison d’être.
Lefaso.net : Quand et comment la mise en œuvre va-t-elle se faire sur le terrain ?
Dr Samuel T. Kaboré : Repartons depuis la signature qui s’est tenue le 13 août. Après la signature le 13 août, il y a ce qu’on appelle l’entrée en vigueur. L’entrée en vigueur c’est une date à partir de laquelle les investissements sur le terrain vont démarrer. Alors entre la signature et l’entrée en vigueur il y a une période qu’on appelle période de préparation de la mise en œuvre. Donc actuellement nous sommes dans cette période. Elle comporte trois principales activités. Il y a le cadre institutionnel qu’il faut mettre en place.
On parlait tout à l’heure du MCA, il faut mettre en place cette structure. Il y aura donc des textes qu’il faut adopter, des recrutements qu’il faut faire, il y a aussi le conseil d’administration qu’on appelle Comité d’orientation et de suivi (COS) qu’il faut mettre en place. Ces membres il faut alors les trouver, puisque le gouvernement fait partie, le secteur privé aussi ainsi que la société civile. Il y a le comité national des parties prenantes qui est une structure qu’il faut mettre en place. Ensuite il y a un certain nombre de firmes qui vont aider au travail au quotidien qu’il faut recruter.
Tout ceci fait partie du cadre institutionnel. Ensuite il y a les réformes, qu’il faut également réaliser. Donc avant l’entrée en vigueur, il y a des conditions préalables qu’il faut remplir parce qu’après analyse des réalités du secteur, il s’est avéré que ces changements sont nécessaires pour que d’abord le programme puisse être réalisé adéquatement et ensuite qu’il puisse atteindre ses résultats. S’ils ne sont pas faits les investissements ne démarrent pas.
Le troisième bloc d’activités ce sont les études détaillées. Parce qu’entre les études de faisabilité réalisées il y a deux ans maintenant et la réalité du terrain, il y a des changements.
Donc il faut faire une étude détaillée pour pouvoir faire les dossiers d’appel d’offre pour que les entreprises puissent soumissionner. Tout ceci c’est la période de préparation de la mise en œuvre, celle que nous sommes en train de faire actuellement. Après cela il y aura l’entrée en vigueur. On nous a donné deux ans maximum, donc jusqu’en août 2022, pour réaliser les trois grandes rubriques dont je parlais. Et lorsqu’on démarre on a cinq ans pour réaliser les projets 1 ; 2 et 3 et procéder à la clôture. Voilà ce qui est envisagé.
Lefaso.net : Après cinq années de mise en œuvre, à quel niveau est censé se situer le Burkina Faso en matière d’accès à l’électricité (résultats attendus, impact…) ?
Dr Samuel T. Kaboré : Il est attendu une amélioration nette de l’accès à l’électricité. L’extension des réseaux qu’on va faire c’est pour toucher plus de personnes, les facilités de branchements ou d’utilisation productive de l’électricité, c’est pour favoriser l’accès. Donc l’objectif c’est l’amélioration mais il est difficile de donner un taux précis d’accès à l’électricité. C’est peut-être trop hasardeux et trop tôt pour le faire mais ça devait s’améliorer significativement. Au-delà de ça, il y a beaucoup d’autres changements.
On veut construire par exemple construire une réserve d’exploitation. Pour que quand il y aura une source d’électricité qui tombera en panne, pour une raison ou une autre, une partie de cette réserve qui est en attente, puisse démarrer instantanément pour combler la source manquante. Et il y a une autre qui démarre quelques minutes après. Ça c’est ce qu’on appelle les réserves primaires, secondaires et tertiaires.
Donc c’est un ensemble d’éléments qui doivent permettre d’améliorer pas seulement l’accès, mais également la fiabilité, le coût, etc. Et on souhaiterait aussi que la part des énergies renouvelables qui coutent moins cher, dans le mixte-énergétique augmente. Ce qui va réduire le poids des énergies thermiques au profit des énergies renouvelables. Pour qu’à terme le coût de production de l’électricité soit réduit jusqu’à ce qu’on soit capable de réduire le prix de vente.
Lefaso.net : Quelles sont la forme d’énergie vers laquelle le second compact compte mettre l’accent et la place du secteur privé dans ce compact ?
Dr Samuel T. Kaboré : Le focus c’est l’énergie solaire. Mais vous connaissez également ses limites. Tant qu’il y a le soleil l’énergie est là et en l’absence de soleil il n’y en a plus. Alors l’idée c’est qu’on puisse adjoindre systématiquement le stockage. Par exemple s’il y a une centrale qui va se mettre en place qu’on puisse adjoindre le stockage.
Et il y a un volet d’accompagnement pour la mise en place des équipements de stockage. Maintenant on pense que beaucoup d’autres partenaires iront également dans le sens de promouvoir le stockage de l’énergie pour que toutes les énergies qui vont être stockées puisse permettre de répondre à une bonne partie de la demande. Ce qui peut conduire à terme à la réduction du coût de production.
Pour la place du secteur privé, je dirai qu’il est au centre de nos actions. On a commencé à chercher qu’est-ce qui bloque l’investissement privé. On souhaiterait alors que le secteur privé soit plus confortable pour investir. Qu’est-ce qu’on a prévu pour ça ? Il y a d’abord une unité d’IPP, qu’on envisage mettre au profit du ministère en charge de l’énergie pour que cette unité aide à la maturation des dossiers d’investissement avec le secteur privé. Cette unité va aider le ministère et les entreprises du secteur privé à pouvoir cheminer rapidement vers des conclusions d’accords. Deuxièmement il y a l’assurance. Il y a l’adhésion du Burkina à l’agence africaine pour l’assurance du commerce, qui est basée à Nairobi.
Pour permettre aux entreprises qui veulent faire certains investissements de pouvoir bénéficier d’assurance qui va couvrir par exemple les risques politiques, les risques de liquidité et éventuellement d’autres risques. En plus on voudrait aussi pouvoir accompagner des investissements en stockage. Tout ceci pour encourager le secteur privé et faciliter ses investissements au côté de l’Etat, pour que l’offre de l’électricité puisse s’accroitre. Donc il faut que le secteur privé prenne une part importante dans le processus parce que l’Etat à lui seul ne pourra pas combler le besoin.
Lefaso.net : Le Burkina a d’abord eu un premier compact qui a fait place au second dont nous parlons. Quel est le lien des deux ?
Dr Samuel T. Kaboré : Le processus d’identification du domaine d’investissement est différent. Aujourd’hui si vous avez un problème de moyens de déplacement pour mener vos activités et on a résolu ce problème. L’année prochaine si on revient, pour chercher ce qui vous bloque à nouveau, ce serait probablement autre chose. C’est cela la logique de choses.
Donc premièrement on a l’interrogation des sources de blocage à la croissance économique. Et on avait trouvé des réponses qui ont guidé les choix pour les projets du premier compact. Maintenant on revient on pose la même question. On fait l’analyse et on trouve d’autres contraintes. Et c’est sur la base des réponses obtenues qu’il y a eu le second compact. C’est cette logique et si l’on va revenir pour un troisième compact on va trouver que les priorités ont changé.
Maintenant de façon fonctionnelle, là il y a des liens.
A savoir que si vous prenez par exemple le Sourou où il y a eu le projet développement agricole avec beaucoup d’investissements et d’aménagement de milliers d’hectares alors il y a de la production. La suite maintenant il faut écouler ou bien transformer et c’est là qu’on a besoin d’électricité. Donc c’est un autre niveau de contrainte. On a fini le premier niveau et nous sommes arrivés à un autre niveau où on a besoin d’énergie pour pouvoir faire des transformations, etc.
Lefaso.net : Quelles sont vos attentes à l’endroit des populations et à l’endroit du gouvernement ?
Dr Samuel T. Kaboré : Au niveau du gouvernement ce qu’on souhaiterait est qu’on puisse faciliter la réalisation des conditions préalables à la mise en œuvre du compact. Parce qu’on ne rentrera pas en vigueur tant que les conditions préalables et les réformes sous-jacentes ne seront pas réalisées. C’est ce plaidoyer que nous pouvons faire à l’endroit du gouvernement et des structures de l’Etat. Vis-à-vis de la population que je diviserai en deux, le secteur privé à part et les autres parties.
Pour les autres parties prenantes c’est vraiment un engagement effectif parce que ce qui se fait c’est pour que ça puisse leur profiter. Donc il faut être là, il faut participer, il faut communiquer et dire ce qu’on pense pour que les réalisations qui vont être faites lors de la mise en œuvre puissent répondre aux besoins et aux attentes des populations.
Le secteur privé quant à lui, est bénéficiaire sous deux ordres. D’abord les marchés. Tout ce qui va être fait, sera contractualisé avec des entreprises pour la réalisation. Mais il n’y a pas de préférence de nationalité. Ce qui veut dire qu’une entreprise pakistanaise, malienne ou sénégalaise peut venir soumissionner. Dans ces conditions le secteur privé doit se préparer conséquemment pour être capable de compétir victorieusement. Et cela on le répète tout le temps et on espère qu’il est en train de faire les efforts qu’il faut.
Nous restons ouverts pour leur apporter le maximum d’éléments qui leur permettent de se préparer parce que c’est une compétition ouverte au niveau international. Donc si les gens n’arrivent pas à dépasser leur clivage, leurs petites bagarres, etc. pour construire ensemble quelque chose de fort, ça va être difficile de prendre certains marchés. Parce qu’on ne va pas pouvoir saucissonner jusqu’à ce que ça soit suffisamment petit pour des petites entreprises.
C’est aux petites entreprises de dire ok, mettons-nous ensemble, on grossit pour rattraper le marcher, plutôt que d’attendre à ce qu’on taille le marché pour atteindre leur petite taille. Donc nous les invitons donc à réfléchir à comment se mettre en groupe, comment travailler avec des partenaires plus costauds pour pouvoir prendre les marchés. C’est le message qu’on voulait faire passer au secteur privé.
Propos recueillis par Etienne Lankoandé
Photographie : Bonaventure Paré
Source : lefaso.net
Faso24
Comments
comments