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Valeurs africaines : La « Team Féodale », une communauté virtuelle pour « se réconcilier avec certaines traditions »

Sur le réseau social Facebook, ils se font appeler les « féodaux ». Avec plus de 1000 likes sur leur page officielle « Team Féodale », cette communauté dit prôner les valeurs africaines telles que la responsabilité de l’homme, la soumission de la femme au foyer, la polygynie et le mariage arrangé. Cette communauté ne cesse de lancer des piques aux féministes. Zakaria Guingani alias Zakys Guingani, le président de la Team féodale, nous présente sa communauté.

Lefaso.net : Qu’est-ce que la Team Féodale et quand est-ce qu’elle a été créée ?

Zakaria Guingani : La Team féodale est une initiative citoyenne d’hommes et de femmes burkinabè qui a été créée virtuellement sur Facebook en début d’année 2020 dont l’objectif principal est de sensibiliser et d’inciter les jeunes frères et sœurs à se réconcilier avec certaines traditions quel que soit le degré de modernité auquel nous sommes confrontés.

Les valeurs africaines que nous défendons essentiellement sont conjugales telles que la responsabilité de l’homme dans le foyer, la soumission de la femme au foyer, la place de l’homme et de la femme dans nos familles africaines, la polygynie et le mariage arrangé qui est différent bien sûr du mariage forcé, car la différence ici est que le mariage arrangé de notre entendement doit se faire avec le consentement des deux partenaires.

Pourquoi vous faites-vous appeler des « féodaux » ?

Il faut dire que le terme féodal est une étiquette que nos adversaires idéologiques (les féministes 2.0) nous ont collée, mais en gros, c’est une méconnaissance de nos champs d’intérêts due au fait que nous sommes intransigeants avec nos valeurs cardinales, donc on nous trouve un peu rétro mais au finish on a décidé de porter fièrement ce nom comme nom de combats d’idées et l’étiquette est devenue pour nous un symbole du refus de l’acculturation.

Pourquoi le choix d’un coq comme emblème de la Team Féodale ?

Le coq représente beaucoup de choses dans nos sociétés traditionnelles et nous nous identifions au coq pour plusieurs raisons. D’abord, c’est le roi de la basse-cour et il est souvent utilisé dans nos sociétés traditionnelles comme l’intercesseur entre le monde visible et le monde invisible, donc un trait d’union ou une courroie de transmission entre nous et nos ancêtres. Vous savez aussi que c’est lui qui réveille les populations chaque matin à travers son chant cocorico, nous le voyons comme un symbole de l’éveil de conscience et nous nous inspirons de lui pour éveiller les consciences. Ensuite, il représente pour nous un symbole de la polygynie qui est l’une des cultures africaines que nous défendons car le coq, pour s’épanouir il a besoin de plusieurs poules autour de lui ; enfin il représente un symbole de la responsabilité pour nous.

Pourquoi créer une communauté pour défendre les valeurs ancestrales africaines ?

Seul on va vite, mais ensemble on va plus loin. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de porter ce combat, cet idéal par une communauté. Nous sommes mieux organisés et l’esprit de fraternité et de solidarité y règne.

Quel a été le déclic ?

Disons, à partir d’un moment, nous avons compris que les dérives féministes que nous voyions en dehors du continent africain étaient déjà à nos portes, et il fallait monter au créneau pour sauver ce qui peut encore l’être. Il y a un foisonnement inquiétant du féminisme mal compris sous nos cieux.

Êtes-vous contre les valeurs occidentales ?

Pas du tout. Il n’existe pas de culture bonne à cent pour cent, ni de mauvaise à cent pour cent. Mais ce que nous déplorons, c’est la condescendance des Occidentaux à vouloir tout nous imposer. Et aussi, le mimétisme des Africain(e)s qui adoptent parfois des concepts étrangers sans tenir compte du contexte.

Au-delà des réseaux sociaux, qu’est-ce que cette team fait concrètement pour préserver toutes les valeurs qu’elle prône ?

Pour le moment, toutes nos activités sont menées sur les médias sociaux à travers nos analyses et réflexions pour sensibiliser la jeunesse africaine en général et la jeunesse burkinabè en particulier afin qu’elle fasse un retour à la source, car tout n’était pas si mauvais. Mais disons que nous n’excluons pas dans un avenir proche d’aller sur le terrain pour des actions concrètes.

Êtes-vous contre le féminisme ?

Non pas du tout, même si nous estimons que le féminisme tel que défini par le dictionnaire a déjà gagné ses combats depuis belle lurette en Afrique avec l’avènement de l’État de droit, car l’objectif principal du féminisme à la base était que l’homme et la femme soient égaux devant la loi, aujourd’hui nos Constitutions consacrent les mêmes droits pour tous.

Zakaria Guingani alias Zakys Guingani, président de la Team féodale

Par contre, nous sommes farouchement contre les abus, les méthodes libertaires et anarchistes que certaines personnes qui se réclament féministes veulent nous imposer car leurs méthodes qui consistent parfois à lyncher des présumés coupables sur les médias sociaux pour tenter d’influencer des décisions de justice ou de ruiner des carrières et des réputations avant l’heure du verdict.

L’un des cas récents et illustratifs est l’affaire Sidiki Diabaté (artiste musicien malien), et nous trouvons que cette manière de faire viole même les droits élémentaires des citoyens à savoir la présomption d’innocence, comme si l’objectif était de faire remplacer la présomption d’innocence par la présomption de culpabilité dans chaque affaire judiciaire qui oppose l’homme à la femme. Nous pensons que c’est inadmissible dans un État de droit.

Sur les réseaux sociaux, on se rend compte que le débat est toujours houleux avec les défenseurs du féminisme. Quels sont généralement les points qui vous « divisent » ?

On est essentiellement divisés par rapport à l’égalité qu’elles veulent rendre coûte que coûte arithmétique. Or, la nature nous a créés différents, donc complémentaires. On est aussi divisé par le regard que les féministes portent sur nos cultures africaines. Nous avons l’impression qu’elles banalisent la vie humaine à travers leurs positions favorables à l’avortement libertaire, puisqu’elles disent que la femme doit disposer de son corps et en faire ce qu’elle veut sans être soumise à l’avis de l’homme, qu’elles méprisent la polygynie et le mariage de façon générale à travers leurs slogans du genre « le mariage n’est pas une obligation ou une fin en soi », alors que pour nous, le mariage est le socle de la vie de nos foyers, de nos familles et de nos communautés.

Mépriser le mariage revient à mettre en danger nos foyers, nos familles et nos communautés. Nous avons aussi l’impression qu’elles prônent une liberté sans limite de la femme africaine. Pourtant, nous le savons tous, une liberté sans limite est un danger pour tous. Une liberté sans limite est un suicide pour la nation.

Arrivez-vous à créer un cadre avec les féministes pour mieux leur faire comprendre votre idéologie ?

Ce genre de cadre peut être possible lorsque vous avez en face de vous des personnes capables d’admettre que vous pouvez avoir un son de cloche, autre que le leur. Nous avons remarqué que certaines personnes qui se réclament féministes sont spécialistes en blocages automatiques sur les médias sociaux lorsqu’elles sont en panne d’arguments ou lorsque leurs lignes de défense ne tiennent plus en termes de durée. D’autres même, pour boucler la boucle, préfèrent nous insulter copieusement avant de nous bloquer (rires).

Fort heureusement, toutes les féministes ne sont pas pareilles et il y en a qui ont le sens de l’écoute, personnellement j’entretiens de bons rapports avec certaines d’entre elles et j’espère que tout est possible dans l’avenir.

Dans la Team Féodale, existe-t-il des femmes ?

Bien sûr ! Constatez par vous-même que je suis escorté par deux amazones pour cette interview. Elles sont intimement attachées aux valeurs que la Team Féodale défend. Elles sont représentatives de celles qui ne sont pas là.

Toute personne peut intégrer votre « cercle » ou bien c’est filtré ?

La Team Féodale est ouverte à toute personne qui partage les mêmes convictions que nous sans distinction de genre, d’appartenance religieuse ou politique, quitte à ce que la religion et la politique n’influencent pas nos idéaux. Mais bien évidemment, nous sommes très regardants sur les motivations, la bonne foi et la bonne moralité de chaque personne qui souhaite intégrer notre communauté car il est de notre devoir de prendre des dispositions chaque jour pour garantir la crédibilité de notre communauté.

Propos recueillis par Cryspin Laoundiki

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