Les groupes terroristes au Sahel dans « une dynamique nouvelle », selon Wassim Nasr, journaliste et spécialiste des mouvements djihadistes
L’invité de la rédaction est Wassim Nasr, journaliste à France24 et spécialiste des réseaux djihadistes. Avec lui il est question du sommet du G5 Sahel tenue lundi et mardi à N’Djamena au Tchad. Quels ont été les enjeux de ce sommet ? Le Tchad qui préside désormais le G5 Sahel, quelle impulsion cela donnera dans la lutte contre le terrorisme au Sahel ? Que faut-il faire pour endiguer le terrorisme dans la région ? Ce sont autant de questions auxquelles notre invité répond. Wassim Nasr est interrogé́ par Lamine Traoré.
OMEGA : Bonjour Wassim NASR, un an après Pau le G5 Sahel et ses partenaires notamment la France, se sont rencontrés lundi et mardi à N’Djamena, quelle symbolique, ce sommet peut-il avoir ?
Wassim NASR : Il y a une grande symbolique politique, que l’an 1 de la réunion de Pau qui s’est passé en France, soit dans un pays Africain au Tchad, parce que c’est le Tchad qui prend le relais de la Mauritanie. Donc diplomatiquement parlant, c’est très important, dans une démonstration qui se veut plus africaine ».
OMEGA : Vous qui suivez la situation sécuritaire au Sahel, une telle rencontre est-elle nécessaire aujourd’hui ?
Wassim NASR: Si on parle strictement sécurité ou militaire, je dirai non. Ce n’est pas nécessaire parce que ça n’a pas d’impact direct sur les opérations militaires ou sécuritaires sur le terrain. L’agenda politique et diplomatique où il était nécessaire de faire le bilan de l’an 1 d’engagement depuis la réunion de Pau. Un an après, il fallait réunir ces mêmes pays Africains, par la passation par la Mauritanie et le Tchad et faire le bilan de ce qui s’est passé. Donc, quels étaient les objectifs ? Objectif premier, combattre l’Etat islamique dans les zones des trois frontières et essayer de le contenir, pour qu’il ne soit plus en capacité de mener de grandes opérations. D’un autre côté, il fallait donc réaffirmer cet engagement, avec des engagements qui peuvent être des politiques de développement.
OMEGA : Le Tchad qui prend donc la tête du G5 Sahel, on a toujours vu l’engagement du président Deby à combattre les terroristes, cela donnera-t-il une nouvelle impulsion à la lutte contre le terrorisme au Sahel ?
Wassim NASR : Je ne sais pas si ça donnera une nouvelle impulsion, mais en tout cas, ça vient dans la continuité de ce qui a été fait pendant l’année écoulée. Donc plus de partenariats entre les armées africaines du Sahel et plus de coordination avec la France, c’était le but premier du G5 Sahel quoi qu’il arrive. On a vu une réelle coordination et opération communes entre eux, armée malienne, Burkinabè, Nigérienne et Barkhane dans le gourma ».
OMEGA : La présence française au Sahel a toujours été décriée par une certaine population pour justifier l’engagement de la France au Sahel. Emmanuel Macron dans une discussion mardi sur twitter a affirmé que la stabilité au Sahel est cruciale non seulement pour les populations sahéliennes mais aussi pour notre sécurité et celle de l’Europe. Comment vous percevez une telle déclaration ?
Wassim NASR: Le mot sécurité englobe beaucoup d’aspects qui ne sont pas forcément sécuritaires, terroristes. Dans tous les cas au Sahel, il y a une dynamique qui est nouvelle. Il y a la dynamique d’Aqmi et du JNIM, et il y a la dynamique de l’Etat Islamique. Donc Aqmi et JNIM ont fait des déclarations ouvertes et publiques en disant que les guerres avec la France se limitent au Mali et au Sahel et que les armées africaines ou sahéliennes qui ne s’engagent pas dans la guerre au Mali seront épargnées. Ça c’est une déclaration du JNIM et Aqmi. D’un autre coté on a l’Etat islamique qui refuse la négociation à l’inverse du JNIM qui est ouvert à la négociation et donc les Maliens on en sait deux fois, que ce soit sous IBK ou le nouveau pouvoir qui est ouvert à la négociation. Et dernièrement le Premier ministre du Burkina Faso a fait une déclaration similaire en disant que le Pays était ouvert à la négociation. Ça c’est le côté Aqmi; et d’un autre coté on a l’Etat islamique qui, lui ne veut pas négocier et que lui qui constitue un danger transfrontalier et potentiellement pour l’Europe. Et ce que dit le Président français est compréhensible dans la mesure où il considère Aqmi et le JMIM comme un danger sécuritaire mais aussi politique pour la région.
OMEGA: La lutte contre le terrorisme dans les pays du Sahel n’est pas seulement que militaire il faut la lier au développement. Que faut-il faire pour endiguer le terrorisme au sahel?
Wassim NASR: Il est clair que la réponse militaire ou sécuritaire seule est loin d’être suffisante parce que la situation ne cesse d’aggraver surtout pour les populations civiles. Que ce soit au Mali, au Burkina Faso ou au Niger dernièrement. Des réponses doivent être plutôt aussi au niveau de l’administration, au niveau de la justice et que le retour dans les Etats respectifs soit au niveau des Etats de service mais pas que des Etats de répression, c’est très important. D’un autre côté, combattre la corruption pour pouvoir réinstaurer encore une fois les Etats respectifs aux yeux des populations concernées dans les zones ou la guerre se passe et qui subissent cette guerre. Je pense aux populations qui subissent les exactions des armées mais aussi des milices qui ont été improvisées pour épauler les armées. On voit que depuis qu’il y a des milices qui ont été montées pour épauler les armées, les exactions s’aggravent donc la restauration de l’Etat aux yeux des populations est importante et la restauration de l’Etat se fait par la restauration des services de l’Etat donc de la justice, de l’éducation et de l’administration présente auprès de la population bien avant ou en même temps du moins que les forces de sécurité ».
OMEGA : Merci à vous Wassim NASR
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