Après l’épisode de juillet 2019 pour préparer les élections couplées de novembre 2020, et corrélativement parler de la situation sécuritaire, l’Alliance des partis de la majorité présidentielle (APMP) et le chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso (CFOP-BF) sont réunis du 17 au 19 juin 2021 à Ouagadougou, pour discuter élections de mai 2022 et préoccupation sécuritaire.
C’est dans un tout autre décor que le président du Faso, Roch Kaboré, a ouvert les travaux du dialogue politique, en cette matinée du jeudi 17 juin 2021. En lieu et place d’un Zéphirin Diabré (président de l’UPC), poussé à la majorité présidentielle par la force du scrutin couplé du 22 novembre 2020, c’est Eddie Komboïgo (président du CDP), chef de la délégation du CFOP-BF, qui co-préside l’instance avec Simon Compaoré (président du MPP), chef de la délégation de l’APMP.
Une dynamique qui ne fait pas perdre de vue l’essentiel, semble rappeler le président du Faso, pour qui, « le dialogue politique obéit à notre commune volonté de consolider en permanence un consensus national fort sur les questions politiques préoccupantes, en vue de renforcer la cohésion des Burkinabè ».
Pendant 72 heures donc, les deux délégations vont plancher sur la relecture à minima du Code électoral (avec en perspectives, l’élection des maires et présidents de conseils régionaux par suffrage universel direct), le projet de relecture du Code général des Collectivités territoriales et le projet de redécoupage du territoire.
De réelles préoccupations, lorsqu’on sait que les municipales passées (mai 2016) ont été des plus violentes dans l’histoire (du moins, récente) des élections au Burkina.
Aussi, l’atmosphère délétère en cours, due à ce que d’aucuns qualifient de « nomadisme politique », et les tensions que soulève cette situation, tant au sein des partis politiques mêmes qu’entre les personnes mises en cause et les institutions, montre la nécessité de bien baliser le terrain avant ces joutes démocratiques. Et le tout, dans une sécurité qui a connu un niveau de dégradation considérable par rapport à celui du dernier dialogue politique national en juillet 2019 (le comité de suivi s’était cependant réuni en urgence le 10 juillet 2020 pour décider du maintien du calendrier électoral).
La situation sécuritaire constitue d’ailleurs le deuxième grand axe de réflexion de ce cadre qui vient de s’ouvrir. Si les législatives de novembre 2020 ont été contraintes dans certaines circonscriptions (la carte électorale de certaines provinces s’est vue modifiée, avec parfois des tensions entre le parti au pouvoir et les autres, le premier accusé à tort ou à raison de tailler les choses en sa faveur), les municipales de mai 2022, elles, s’annoncent dans un contexte encore plus difficile, au regard du nombre de communes (circonscription électorale) qui échappent à l’autorité étatique.
La rencontre s’ouvre aussi à seulement une dizaine de jours de l’hideuse attaque de Solhan. Ce drame apparaît comme une étape de franchie dans la dégradation de la situation, avec pour entre autres conséquences, l’attente de certains Burkinabè de voir situer les responsabilités sur ce massacre qui a fait plus de 100 morts.
Le dernier dialogue politique, 2019, lui, avait fait plusieurs recommandations, y compris sur le plan de la sécurité. A ce jour, quel état des lieux peut-on faire de leur mise en œuvre ? Voir lesdites recommandations au bas de l’article.
Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net
Sur la question sécuritaire
Les participants au Dialogue politique ont formulé des recommandations :
– renforcer les capacités matérielles, financières et humaines des forces de défense et de sécurité ;
– instaurer une contribution financière patriotique de toutes les composantes de la nation pour soutenir les efforts des forces de défense et de sécurité ;
– susciter une mobilisation de tous les acteurs politiques autour d’une politique nationale de sécurité élaborée de façon consensuelle et fondée sur la réconciliation nationale qui induit le renforcement de la cohésion sociale ;
– organiser un panel intra-muros sur les fondements du terrorisme en impliquant les forces de défense et de sécurité et certains érudits de la question ;
– élaborer et adopter de façon participative et solennelle, un pacte patriotique national ;
– impliquer les sociologues, historiens, anthropologues, ethnologues, hommes de culture et personnes expérimentées etc. dans la réflexion sur le problème sécuritaire et dans la recherche des solutions ;
– instaurer un dialogue permanent entre les acteurs politiques sur les questions sécuritaires ;
– définir une stratégie pour canaliser l’intervention des Partenaires techniques et financiers dans les secteurs de la défense et de la sécurité ;
– renforcer le climat de confiance entre les forces de défense et de sécurité et les populations ;
– adopter en Conseil des ministres un plan national pour la mise en œuvre des résolutions 1325, 1820 et 2242 du Conseil de sécurité des Nations-Unies qui impliquent les femmes dans toutes les questions de sécurité et de paix, gage d’un développement sécuritaire et humain durable ;
– restaurer les normes et valeurs positives en impliquant les autorités morales (traditionnelles, coutumières et religieuses) dans la prévention et la résolution des problèmes liés à la sécurité ;
– renforcer la communication avec les populations sur la sécurité ;
– faire usage des moyens diplomatiques en faisant recours à des personnes expérimentées en complément des autres moyens de lutte ;
– observer la discrétion lors de l’acquisition et de la réception du matériel militaire ;
– appliquer les textes règlementaires sur l’utilisation des moyens de déplacement à deux roues ;
– impliquer les médias dans la sensibilisation et l’éducation citoyenne des populations ;
– mettre en place un fichier d’état-civil fiable et numérisé ;
– inclure la dimension sécurité dans le Service National de Développement ;
– assurer un traitement diligent des dossiers judiciaires des détenus pour faits de terrorisme.
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