Roch Kaboré vient de manquer un rendez-vous avec son peuple, un rendez-vous avec l’histoire. « Encore ! » , a-t-on envie de dire. Le pays s’enfonce dans l’abîme et chaque attaque terroriste, chaque âme fauchée, chaque arme passée à gauche devrait être une occasion pour le premier des Burkinabè pour rassurer ses concitoyens quant à un avenir meilleur, lui qui a été élu pour, entre autres, garantir la sécurité des Burkinabè.
L’après-Solhan est encore plus symbolique, puisque le Burkina vient de subir l’attaque la plus meurtrière qui a visé des civils sur son territoire. Malheureusement, ce discours du Président du Faso a convaincu peu parmi ses compatriotes. Ce discours a péché, il faut le reconnaître, et ce, sur au moins 3 points : D’abord, le timing : on avait espéré une adresse à la Nation, au lendemain de l’attaque de Solhan.
Le porte-parole du gouvernement Ousséni Tamboura qui s’exprimait le jour même n’excluait pas cette éventualité. Peut-être une façon pour lui de le suggérer au chef de l’Etat. Selon lui il n’était pas exclu non plus que le Président du Faso himself se rende à Solhan. Que nenni ! C’est le Premier ministre qui est allé au témoigner la solidarité de la Nation aux rescapés de Solhan. Et on aura attendu en vain la fameuse adresse à la Nation. Beaucoup n’y espéraient plus. Jusqu’à ce 27 juin, 3 semaines après le lâche assassinat de 132 personnes, 160 ou même plus encore selon les sources, à seulement une quinzaine de km d’un détachement militaire. Un massacre qui a duré au moins 3 heures. Nul besoin de revenir sur les questions que nous nous posions tous sur ce qui visiblement n’avait pas marché. Curieusement, le Président du Faso décide de sortir de son mutisme 2 jours après l’annonce de marches de protestation par l’opposition, et juste le lendemain de marches de colère à Titao dans le Loroum et à Kaya dans le Samnatenga.
A chacun de faire sa déduction. Mais il est clair que ce timing ne plaide pas en faveur du Président du Faso. Ensuite, la forme-même du discours laisse un goût d’inachevé. Rien de nouveau ; aucune émotion ; pas l’once d’une quelconque gravité dans le ton choisi. Dans ce discours, Roch Kaboré est tout simplement resté égal à lui-même. Pourtant, pour être grave, la situation l’est, au dessus de toute subjectivité. Et cela devait se traduire dans les mots mais aussi dans l’expression du visage, dans le gestuel, et dans le ton. Bref, les victimes de Solhan et toutes les autres méritaient mieux.
Que dire du contenu ? Roch Kaboré, comme à son habitude, et c’est de bonne guerre, a appelé les Burkinabè à l’union, à la responsabilité et à une confiance plus accrue en l’Etat. Seulement, les décisions fortes attendues par nombre de Burkinabè n’étaient pas au rendez-vous. Pas de limogeage de ministre, pas de dissolution du gouvernement, et pas d’actions claires à mener tout de suite. Peut-être que des décisions suivront ce discours. « Des réaménagements stratégiques (sont) imminents », selon Thierry Hot l’un des proches conseillers du Président du Faso qui a réagi sur Facebook.
Mais avant d’en arriver là, ce discours devait servir au Chef de l’Etat à dire courageusement à la Nation « qu’est-ce qui n’a pas marché », pour parler comme le commun des Burkinabè. Qui n’a pas fait son travail, ou qui l’a fait mal ? Quel maillon de la chaîne a-t-il été défaillant ? Quelles leçons l’Etat et le Président du Faso en particulier, en tirent-il ? Et enfin, que comptent-ils faire concrètement, et urgemment ? Les orientations données par le Chef de l’Etat restent trop générales et ne permettent pas aux Burkinabè d’être assez confiants en l’avenir. Mais comme le disent certains, tout ne peut pas être dit dans un discours.
En tout cas, Roch Kaboré promet que notre stratégie sera adaptée aux nouvelles réalités du terrain. Wait and see !
Abdoul Fhatave TIEMTORE
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