Fin de suspens pour ceux qui attendaient la réponse de l’opposition politique, regroupée au sein du Chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso (CFOP-BF), à la demande du président du Faso de surseoir aux manifestations. L’opposition a décidé de maintenir les marches annoncées à travers les 45 provinces.
« Nous avons maintenu nos activités de marche », informe un membre du cadre de concertation du CFOP-BF, au sortir de la rencontre sur le sujet, tenue dans la soirée de lundi 28 juin 2021. Il précise cependant : « Nous allons, par respect, répondre à sa demande, en lui disant (président du Faso) que nous avons pris acte de sa demande, mais décidons de maintenir nos activités ».
Au-delà de l’opposition réductible, c’est-à-dire le CFOP-BF, les positions dans la grande famille de l’opposition politique divergent en degrés. Si certains semblent être pour une démarche à minima (interpellation et piqûre de rappel aux dirigeants), d’autres poussent plus loin le bouchon, en demandant la démission du président du Faso, Roch Kaboré, lui-même.
« C’est aussi trop de demander le départ de Roch Kaboré. Ce n’est pas que ceux qui demandent sa démission n’ont pas raison. Mais, la réalité est que ce n’est pas évident que ceux qui demandent cela pourraient faire face à la situation, si on leur remettait le pouvoir dans ce contexte. Si Roch Kaboré part aujourd’hui du pouvoir, on risque de tomber dans un cafouillage, je ne vois pas qui peut prendre le pouvoir, rassembler les gens et diriger « , se confesse cet autre membre du CFOP-BF.
Ce dernier, comme dans une sorte d’embarras, se révolte cependant que dans une situation aussi grave, le message du président Roch Kaboré ne soit immédiatement suivi, 48 heures après, d’aucune « décision forte ».
« Je me demande ce qui se passe au sommet de l’État. Il aurait pu même annoncer la dissolution du gouvernement pendant son adresse à la nation, annoncer la réorganisation de l’armée et des VDP (Volontaires pour la défense de la partie). Les Burkinabè n’ont pas dit qu’ils attendent une solution magique, mais le fait de sentir que les choses bougent au sommet de l’État donne un espoir à ceux qui sont désespérés, et l’espoir fait vivre ! », justifie l’interlocuteur.
Du côté du parti au pouvoir, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), l’on « dénonce fermement et met en garde contre les manœuvres politiciennes qui sous-tendent certaines manifestations dites spontanées » (déclaration d’une session extraordinaire du Bureau exécutif national du parti, le 26 juin).
En commentaires, cet « élu » du Bureau politique national (BPN) du parti au pouvoir pense que « le président Roch Kaboré a parfaitement pris en compte dans son message à la nation, toutes les attentes exprimées » et que la sincérité aurait voulu qu’on l’encourage et l’accompagne dans la lutte. D’ailleurs trouve-t-il que la situation est tellement critique que « certains » se devraient de ne pas vouloir en tirer des « bénéfices individuels ».
« Malheureusement, même au sein de la majorité, il y a des gens qui ne jouent pas franc-jeu, oubliant qu’on est dans le même bateau », lâche cet autre cadre du pouvoir, membre du BEN (Bureau exécutif national) du parti.
Aux lendemains des marches-meetings au nord (Titao) et au Centre-nord (Kaya), du message à la nation du président du Faso, ce choc des positions annonce les couleurs des jours à venir, notamment à partir des 3 et 4 juillet 2021 avec l’appel à la mobilisation générale du CFOP-BF.
En dépit de tout, le président du Faso reste le maître de ce qu’il voudra que demain soit ! De ce fait, ses actions d’ici au 3 juillet pourraient contribuer à décrypter ou à envenimer la situation, dans ce contexte où son message est diversement accueilli au sein de l’opinion nationale.
Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net
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