La nouvelle est tombée tôt hier mardi 24 août, annonçant la mort de l’ex-Président tchadien, Hissène Habré (1982 à 1990) des suites de la maladie à coronavirus au Sénégal où il purgeait une peine de prison à perpétuité pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité. L’ex-président a eu le même destin que ses prédécesseurs à la tête du Tchad : celui d’hommes liges qui, après avoir bénéficié du soutien direct de la France pour accéder au pouvoir, ont voulu s’émanciper et prendre leur « indépendance ». Des généraux Félix Maloum et François Tombalbaye à Goukouni Weddeye, il y a toujours eu comme un destin implacable à subir.
Habré, de retour dans son pays, après ses études dans l’Hexagone, a rejoint le Front de libération nationale du Tchad (FROLINAT), dont il prend la tête, avant de fonder, avec un autre Nordiste, Goukouni Weddeye, le conseil des Forces armées du Nord (FAN). Devenu Premier ministre de ce dernier, il le combat jusqu’à la chute en 1982, avant que son chef d’état-major général, le colonel Idriss Déby, le chasse à son tour en décembre 1990. Depuis, la vie de celui que l’on surnommait le roi du désert était celui d’un exilé au Sénégal où il a été le premier Africain à être jugé par une Cour spéciale africaine et condamné à perpétuité.
Les Africains avaient suivi ce procès auquel le principal accusé avait d’abord refusé de participer, avant d’être porté, comme un fardeau, par la sécurité sénégalaise à l’audience. Puis, il avait préféré ne rien dire, peut-être aussi ne rien entendre. De Habré, l’histoire retiendra qu’il a signé son arrêt de chute politique en 1974 où il a fait enlever et retenir la chercheuse Françoise Claustre trois ans durant avant de l’exécuter. Un crime que la France ne pardonnera jamais, au point de lui faire payer cet entêtement huit ans après. Une longue procédure judiciaire sera ouverte contre lui en 2013 qui aboutira à ce procès historique et à sa condamnation à perpétuité. Les victimes des actes de torture, environ 40 000 personnes, après ce verdict, étaient entrées dans la suite des dédommagements qui tardaient à se concrétiser.
La mort de Habré, quatre mois après celle de Deby, pourrait-elle permettre à ce peuple, qui vit depuis des lustres dans un climat d’hostilité, d’espérer d’autres horizons ? Le défunt part en laissant à sa famille biologique l’image d’un père exemplaire, d’un leader qui s’est battu pour les autres. Mais pour bien de Tchadiens, Hissène Habré a la renommée de tyran, de despote et de dictateur. Car Habré représente le Tchad des années 1980, empêtré dans une guerre interminable et encastré dans des alliances contre nature. C’est bien une page qui se referme sans réellement apporter avec elle les tourments que ce grand pays connaît depuis son indépendance. L’ex-président Habré allonge la liste des dirigeants chassés par leurs successeurs et morts en exil comme Mobutu, Ahidjo, Ben Ali…
Jean Philippe TOUGOUMA
L’article Tchad : destins croisés de « grands » hommes est apparu en premier sur Quotidien Sidwaya.
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