Le temps de la patrie : l’insubmersible et éternel revenant
Un raccourci rapide de notre histoire nous donne le déroulé suivant :
– 1er mars 1919 : la Haute Volta coloniale est créée. Elle comprend les cercles de Ouagadougou, Bobo-Dioulasso, Fada N’Gourma, Dédougou, Dori et Say ;
– 1927, premier dépeçage : le cercle de Say est rattaché à la colonie du Niger ; – 5 septembre 1932 : la Haute-Volta est supprimée et son territoire réparti entre la Côte d’Ivoire (qui reçoit le plus gros du « gâteau »), le Niger et le Soudan français (Mali) ;
– 4 septembre 1947, la Haute-Volta redevient un territoire ouest-africain ;
– 11 décembre 1958 : elle est une république autonome au sein de la fameuse Communauté française ; – 5 août 1960 : elle devient un Etat indépendant ;
– 3 janvier 1966 : premier coup d’Etat qui porte le Général Sangoulé Lamizana au pouvoir. Suivront plusieurs autres coups d’Etat et des changements de régime avec des qualificatifs divers : soulèvement, révolution, insurrection…populaire, Etat de droit, Etat d’exception, régime militaire, régime militaro-civil, civilo-militaire, etc., avec leurs comités militaires, leurs Constitutions rétablies, établis et régulièrement révisées et des répondants : les républiques. Saye Zerbo, Jean-Baptiste Ouédraogo, Thomas Sankara, Blaise Compaoré, Isaac Zida, Michel Kafando, Roch Marc Christian Kaboré. Quand la Haute-Volta entra dans la danse des coups d’Etat à la suite d’autres pays voisins, certains responsables politiques de la sous-région s’en moquaient, disant qu’eux, ne connaîtraient jamais des situations du genre, considérant que ce genre d’évènement n’était que la maladie infantile de pays qui ne méritaient pas d’être honorés du titre d’ « Etat ».
Depuis, ils ont percé le plafond avec une guerre civile ! Comme quoi, quand on n’a pas atteint l’autre rive, il ne faut jamais se moquer de celui qui se noie !, Notre pays a connu le chant de nombreux oiseaux de mauvais augure. Des charlatans de haut vol lui avaient prédit un enterrement de première classe. Mais, par la grâce du Tout-puissant, le Burkina est resté, cahin-caha, à la surface de l’eau, se révélant insubmersible. Toujours secoué, souvent instable, parfois bafoué, mais aussi…toujours présent ! Parfois dans le désespoir, comme par ces temps qui courent, avec le terrorisme et la crise sanitaire, parfois créant de l’espoir, mais incontestablement résilient, courageux dans l’adversité, fier et digne, prêt à affronter le pire, résilient en toutes circonstances, parfois malgré le doute bruyamment exprimé et distillé par certains de ses fils sur sa capacité à se relever et s’élever au-dessus de ses drames.
Aux couleurs de six frontieres
C’est que notre pays est socialement composite ! – Il est un carrefour naturel par sa situation géographique qui lui reconnaît six frontières qu’il partage avec des pays aussi bien sahéliens que côtiers, certains faisant pratiquement quatre fois son territoire en termes de superficie ; – Il est, par la force des choses, un pays d’émigration, par sa population studieuse et travailleuse ; – Il est aussi et beaucoup n’en n’ont pas toujours conscience, un pays d’immigration et d’accueil de citoyens de nations environnantes qui se sont toujours réjouis de leur présence au pays des Hommes intègres, créant même dans notre capitale et certaines de nos grandes villes, des quartiers qui portent des noms de leurs origines (Zangouétin pour les Nigérians, Koulouba pour le Mali, etc.).
Quoi de plus normal donc que, quand ça tousse à Bamako, ça s’enrhume à Ouagadougou ! Quand il fait froid sur les rives de la Lagune Ebrié, on se couvre au Faso ! Quand une case prend feu au Burkina, nos frères du Ghana se précipitent à la Volta pour apporter l’eau qui éteindra l’incendie ! Et quand toute la sous-région est en proie à des troubles, quoi de plus logique que notre pays qui n’est pas « surnaturel », même s’il est de toute évidence béni de Dieu, soit traversé de part en part par des secousses et des soubresauts multiples et divers ! Situé au cœur de ce puzzle, de ce conglomérat d’intérêts divers et parfois divergents malgré les apparences, le Burkina est condamné à danser le warba à la mode zouglou, au rythme du High life, à chanter le Mali à la mode Abidjanaise et Nigérienne à l’Aube nouvelle, sur la Terre de nos aïeux, dans l’espoir que Dieu bénisse notre pays, au son du Ditanyè, notre Hymne de la victoire ! Dieu bénisse l’Afrique entière, la sous-région, nos voisins et le Faso ! Qu’il nous donne la paix, la vraie, agrémentée de justice et de développement économique et social dans la cohésion et la fraternité !
A bientôt !
Dr Jean-Hubert BAZIE
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