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Ecoles de Cinéma au Sénégal : relever le défi de la spécialisation

Dans le but d’accompagner le développement du secteur cinématographique sénégalais, plusieurs écoles publiques ou privées de formation aux métiers du cinéma et de l’audiovisuel, aux fortunes diverses, existent à Dakar, et à l’intérieur du pays.

Selon le directeur de Forut Sénégal, Gilbert Diatta, la formation aux métiers du cinéma et de l’audiovisuel constitue une solution au chômage et à l’immigration des jeunes sénégalais.

Au Sénégal, plusieurs centres ou écoles de formation, privés et publiques, mettent à la disposition du secteur, chaque année, des dizaines de professionnels du cinéma. Installées dans la capitale, Dakar ou à l’intérieur du pays, ces structures contribuent à la professionnalisation de la chaine cinématographique.

Créé en 1998 par l’ONG Forut Sénégal, avec l’appui des norvégiens, Média centre de Dakar, est l’une des structures pionnières dans le domaine de la formation cinématographique au Sénégal. Chaque année, ce centre forme une quinzaine d’étudiants âgés de 18 à 35 ans (avec une parité filles/garçons) à plusieurs métiers du cinéma et de l’audiovisuel. Il s’agit de la réalisation, la prise de vue, la prise de son, le montage, l’infographie sans oublier l’enseignement à la sémiologie, fait savoir le directeur général de Forut Sénégal, Gilbert Diatta. Dans cet institut, la durée de la formation est de 9 mois, dont 6 mois d’enseignement théorique et pratique, et 3 mois de production. L’étudiant doit boucler son apprentissage par la réalisation d’un court métrage, fiction ou documentaire, indique M. Diatta. Cette année, l’une des productions de l’école est sélectionnée au Fespaco dans la catégorie films d’école. Il s’agit du film « La résilience » de Pierre Maurice Lopy. Mieux, selon son directeur général, en deux décennies d’existence, Média centre a formé environ 200 professionnels de cinéma et de l’audiovisuel.

Une solution au chômage et à l’immigration

Certains d’entre eux sont devenus des réalisateurs confirmés remportant même des prix lors des festivals de cinéma à travers le monde, poursuit-il. Mamanding Koté, Babacar Sougou, Touty Mbengue, Yankhoba Ndiaye, Khardiata Pouye, Jupiter, Aïcha Thiam, Cheikh Ahmadou Bamba Diop, Angèle Diabang, etc. ; font partie de ceux qui font aujourd’hui la fierté de ce centre, ajoute son DG. Il contribue également à alimenter les médias audiovisuels sénégalais en personnel qualifié. « La plupart des techniciens de la RTS (Radiodiffusion télévision sénégalaise, ndlr) sont issus de notre école. Nous avons d’anciens étudiants dans des médias comme TFM, ATN, ETV, RDV. Ils y exercent comme caméraman, monteur, réalisateur, chargé de production… », se réjouit le premier responsable de Média centre. Pour donner une tribune d’expression aux films réalisés par ses étudiants, le centre organise chaque année, un festival international de films de quartiers.

Le directeur général de l’école nationale des arts, Dr Salif Diedhiou : « Avec l’appui de la direction de la cinématographie, nous sommes en réflexion pour développer davantage l’enseignement du cinéma d’animation ».

« L’objectif de ce festival est de permettre à nos étudiants de repartir dans les quartiers pour rendre aux populations leur vécu qu’ils ont filmé en vue de réaliser des films documentaires », soutient Gilbert Diatta. Son ambition à court terme est de faire de Média centre un institut de référence en matière de formation aux métiers du cinéma et de l’audiovisuel, délivrant des parchemins de niveau licence et master. Pour lui, au-delà de la contribution au développement du 7e art, la formation dans le domaine cinématographique constitue « une grande solution au chômage et à l’immigration des jeunes sénégalais ». C’est d’ailleurs l’une des raisons qui l’a amené à ouvrir cette année deux centres de formations en régions, notamment à Ziguinchor et à Saint-Louis. Pour accéder au centre, l’étudiant doit débourser 550 000 FCFA, dont 100 000 F CFA à l’inscription et le reste en 9 mensualités. Mais pour faciliter l’accès à cette formation, des mairies, dans le cadre d’un partenariat avec le centre, offrent des demi-bourses à certains apprenants.

Combler l’absence de formation supérieure

A Thiès, à environ 70 km de Dakar, l’Institut Supérieur d’Enseignement professionnel (ISEP), à travers son département Technologies de l’information et de la communication, forme également depuis 2018 aux métiers du cinéma et de l’audiovisuel. Il s’agit notamment de la production cinématographique et audiovisuelle, des arts graphiques numériques, de la création et le management des produits multimédia et du journalisme reporter d’images. « Dans le métier de la production cinématographique et audiovisuelle, nous formons des techniciens supérieurs qualifiés et polyvalents pour faire de la réalisation, de la prise de vue, de son, de la post-production, l’écriture de scénario et la gestion de la production », fait savoir le responsable du département TIC de l’ISEP, Arfang Sarr. Selon lui, l’objectif de cette formation est de pallier le manque d’écoles de cinéma de haut niveau dans l’enseignement supérieur en Afrique subsaharienne et de permettre aux jeunes sénégalais et sénégalaises d’accéder à la formation cinématographique.

L’ISEP a livré sur le marché cinématographique, sa première cuvée de 47 impétrants en 2020. « Nous avons beaucoup d’atouts en ce qui concerne la qualité des productions, le niveau de technicité et de créativité de nos apprenants, même s’il y a de nombreuses difficultés liées au développement du plateau technique, l’acquisition du matériel de haut niveau qui coûte cher », souligne-t-il. Pour preuve, cette année, confie M. Sarr, l’ISEP sera présent au Fespaco, dans la catégorie films d’école, à travers le film  » Polia » d’un de ses pensionnaires, Ndeye Astou Bassene. A l’ISEP, les apprenants intègrent l’institut avec le Bac pour deux années de formation. Sans être une véritable structure de formation cinématographique, l’Ecole nationale des arts (ENA) s’intéresse néanmoins à un segment peu développé du cinéma sénégalais, voire africain : le cinéma d’animation. Depuis quelques années, l’ENA dispense un module sur ce cinéma d’animation.

S’orienter vers la spécialisation

Les étudiants y reçoivent des notions de base sur les différentes techniques d’animation, le dessin, l’animation manuelle avec des cartons, des fils de fer, l’écriture de scénarios du cinéma d’animation, etc., affirme l’enseignant en cinéma d’animation à l’ENA, Kheraba Traoré. Pour lui, le cinéma d’animation, est un métier d’avenir mais malheureusement, peu de cinéastes s’intéressent à ce type de création. « Avec les possibilités qu’il y a dans ce domaine, nous devons travailler à vulgariser le cinéma d’animation. Il faut amener les gens à comprendre que cette formation s’ouvre sur des débouchés », souligne le directeur général de l’ENA, Dr Salif Diedhiou. Et d’ajouter que son école, avec l’appui de la direction de la cinématographie, est en réflexion pour développer davantage l’enseignement du cinéma d’animation.

A l’instar des autres pans du cinéma sénégalais, les écoles de formation cinématographique connaissent aussi leurs lots de difficultés. « Les autorités nous accompagnent certes mais pour la formation au cinéma, il faut encore plus d’investissements qui égalent les standards internationaux. Il faut un système d’incubation de projets cinématographiques pour mieux accompagner les diplômés à l’entame de leur carrière de cinéaste », préconise Arfang Sarr. Aux côtés des efforts de l’Etat, Gilbert Diatta, invite les centres de formation à s’orienter vers la spécialisation. Car, dit-il, le Sénégal regorge de beaucoup d’écoles de formation qui malheureusement font toutes la même chose. « La collaboration entre les écoles de formation est nécessaire. Que ce soit au niveau de la production, de la post-production ou de la formation, il est important que les gens se mettent ensemble, à l’échelle nationale comme sous-régionale », conclu-t-il.

Joseph HARO (josephharo4@gmail.com)

Mahamadi SEBOGO (Windmad76@gmail.com)

De retour de Dakar, Sénégal

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