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Soudan : le peuple résiste

Après le coup de force du général Abdel Fattah al-Burhan au Soudan, le 25 octobre 2021, le peuple opte pour la résistance à l’imposture. Les syndicats et les comités de résistance populaire, qui ont chassé Omar el Béchir en avril 2019 ont, à cet effet, appelé à une grève générale sur toute l’étendue du territoire. De Khartoum, la capitale, en passant par Atbara, Port-Soudan, Dongola, El-Obeid, Kosti et à Nyala, au Sud-Darfour, le peuple se mobilise pour faire barrage au général al-Burhan.

En dépit des communica-tions qui sont sérieusement dégradées depuis le coup d’arrêt porté à la Transition, les comités de résistance populaire ont trouvé la parade en faisant passer leurs messages de mobilisation générale à travers les mosquées. Ils ont même appelé à « une marche du million », le samedi 30 octobre prochain pour obliger le général al-Burhan à écouter la voix du peuple. Pour avoir chèrement acquis sa liberté en mettant fin au régime d’el-Béchir en 2019, le peuple soudanais n’entend plus être sous la férule d’un pouvoir militaire répressif. Par respect de la mémoire des martyrs tombés en 2019 sous les balles assassines des sbires d’Omar el-Béchir, les Soudanais sont prêts à affronter à tout prix le général Abdel Fattah al-Burhan et ses hommes. Au regard de cette détermination populaire, il est fort à parier que l’actuel homme fort du Soudan aura mille et une peines pour s’imposer. D’autant plus que du côté de l’armée, les soutiens à son initiative tardent à se faire entendre ouvertement. Au moment où le peuple soudanais a pris son destin en main pour dire non au coup d’Etat du général al-Burhan, c’est l’occasion idéale pour lui exprimer un soutien et une solidarité concrets. Les condamnations tous azimuts formulées de part et d’autre n’auront de portée réelle que si elles se muent en pressions contre l’auteur de ce putsch anachronique.

L’Union africaine (UA) a suspendu le Soudan de toutes ses instances. Mais il faut bien plus que cela pour contraindre le général Abdel Fattah al-Burhan à étouffer son appétit du pouvoir et laisser la transition soudanai-se poursuivre son cours normal. Les difficultés économiques accentuées par la pandémie de la COVID-19 ont certes paralysé la Transition dans sa volonté de se pencher sur les vraies préoccupations du peuple, mais cela ne devrait pas être un prétexte pour un militaire de faire irruption sur la scène publique. Le Soudan a été éprouvé pendant plusieurs décennies à cause de la dictature d’Omar el-Béchir pour se retrouver à nouveau à mendier un espace de liberté et de démocratie. Dans tous les cas, ce coup d’Etat ne pourra pas mettre fin aux malentendus entre civils et militaires qui ont pris en otage la bonne marche de la transition. Il est temps que les affidés de l’ancien président Omar el-Béchir qui occupent encore des postes stratégiques dans l’armée tirent véritablement les leçons de la révolte populaire de 2019. Ils doivent comprendre que le peuple a amorcé une autre trajectoire dans sa quête d’un Soudan libre et démocrati-que. Après s’être affranchi d’un dictateur, il refuse de courber l’échine devant un autre. Le général al-Burhan doit avoir l’humilité de comprendre qu’on ne peut éternellement hypothéquer l’avenir d’un peuple assoiffé de liberté et de démocratie.

Karim BADOLO

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