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Crise sécuritaire : « Pourtant on va droit dans le mur… »

Ceci est une tribune de Ousmane Paré, journaliste, sur la situation sécuritaire au Burkina Faso.

Le Burkina Faso fait face à l’une des pires crises de son histoire post coloniale. La situation qui s’empire le jour au jour a atteint un niveau inquiétant au regard des dernières attaques et du nombre très élevé des populations qui ont dû quitter leurs villes et villages ces derniers mois pour trouver refuge dans d’autres localités aussi bien sur le territoire national que dans des pays voisins. Une crise sécuritaire doublée d’une crise alimentaire dont les conséquences les mois à venir s’annoncent catastrophiques.

L’heure est grave. Aucun euphémisme ou saupoudrage ne sauraient voiler ce drame que vivent des millions de Burkinabè. Ni le verni sur les effectifs des personnes déplacées internes ni le choix des mots pour décrire la situation ne pourraient empêcher l’apocalypse qui pointe à l’horizon. Oui l’apocalypse ce n’est ni de l’apatridie, ni de l’exagération ni de la méchanceté.

Le pire est à venir si nous n’agissons pas. Se jeter la responsabilité n’y pourra absolument rien. Aujourd’hui c’est une bonne partie du territoire burkinabè qui est sous le contrôle de groupes armés terroristes qui y dictent leurs lois. Ils décident, ces terroristes de qui entre ou sort de ces zones passées sous leur contrôle. Ils tuent qui ils veulent, quand ils veulent comme ils veulent.

Difficile de comprendre l’inefficacité de la réponse militaire après le jeu de chaise musicale qui nous a fait voir quatre chefs d’État-major général des Armées en six ans sans parler des ministres de la défense et de la sécurité qui se sont succédés dans la même période.

Chose oh combien inadmissible surtout pour un peuple qui chante à cor et à cri à longueur de journée « La patrie ou la mort nous vaincrons! ». Nous avons échoué… Incapables que nous sommes de protéger ces terres que nous ont léguées nos aïeux. De l’Est à l’Ouest, du Nord au Sud, le pays est pris en sandwich tenaillé de toute part par ces hommes qui ont convaincu bien de Burkinabè de leur suprématie sur notre armée nationale.    

Cet échec c’est d’abord celui du chef de l’État Roch Kaboré qui, en six ans de gestion de l’appareil d’État n’a pas été en mesure d’endiguer le mal. Personne absolument personne ne doit endosser cette responsabilité si ce n’est lui le président du Conseil des ministres, le Chef suprême des armées. Un échec dont il doit tirer toutes les conséquences.

C’est aussi l’échec de toute l’armée nationale qui se fait malmener par de petits enfants en tapettes sur des mots. Qu’on tue des civils désarmés pour ensuite prendre la fuite, on peut expliquer. Mais que pendant des années, des individus puissent attaquer des camps militaires, tuer des soldats, emporter des armes une fois, deux fois, trois fois et bien plus… l’honneur et la dignité exigent que des gens quittent leur fonction à défaut de leur exiger bien plus.

 Le code d’honneur dans toute organisation exige qu’on ait honte de reconnaitre qu’on était là quand de tels événements arrivaient.  Mais comme l’honneur et la dignité semblent les choses les moins bien partagées chez nous, il faudra développer d’autres mécanismes pour arrêter la saignée pendant qu’il est encore temps. 

Difficile de comprendre l’inefficacité de la réponse militaire après le jeu de chaise musicale qui nous a fait voir quatre chefs d’État-major général des Armées en six ans sans parler des ministres de la défense et de la sécurité qui se sont succédés dans la même période.

Qu’est-ce qui n’a pas marché? C’est quoi le problème qui nous empêche de gagner des batailles malgré les initiatives déjà lancées. Ces questions méritent d’être posées afin que le diagnostic soit bien fait pour ne pas commettre de nouvelles erreurs dans le traitement.

La solution ultime pour bien de Burkinabè semble aujourd’hui le départ du président Kaboré. Des gens le lui demandent et d’autres exigent de passer par tous les moyens pour l’obtenir.

Si rien n’est fait, cela surviendra d’une manière ou d’une autre. Nul ne peut rien contre cela. Ni les pleurs, ni les prières. Mais est-ce la solution? Sommes sûrs d’avoir tout essayé avant?

Pas si sûr. C’est pour cela que de plus en plus je me laisse convaincre que loin des mouvements de foule, il faut envisager une réflexion prospective qui débouche sur des actions concrètes pour sauver ce qui peut encore l’être.

Elles sont certes nombreuses, les hautes personnalités à avoir soumis d’une manière ou d’une autre les recettes au chef de l’État sans avoir obtenu la moindre réaction en retour.  Ils sont nombreux les motifs du découragement… Mais le pire peut être évité si les actions sont mieux concertées.

Qui va succéder à Roch Kaboré ?

Fera-t-il mieux que Roch Kaboré si l’on sait qu’il a réussi à mobiliser à ses côtés les meilleurs candidats des dernières élections présidentielles. 

Ou songe-t-on à remettre le pouvoir à l’armée. Quel militaire alors pour gouverner le pays pendant combien de temps? 

Voilà pourquoi je me permets de ma modeste position, d’appeler, sur initiative du chef de l’État ou d’une quelconque autorité morale que soit mise en place une commission de crise avec un pouvoir certain pour tenter le tout pour le tout pour sauver ce qui peut encore l’être.

Une commission à l’image de la Commission de la réconciliation nationale et des reformes mises en place sous la transition et dont le rapport a été royalement ignoré par le régime en place. Des personnalités comme les anciens chefs d’État

Michel Kafando et Jean Baptiste Ouédraogo, l’archevêque de Bobo-Dioulasso Mgr Paul Ouédraogo et bien d’autres figures intellectuelles et représentant des confessions religieuses pourraient constituer une telle cellule qui doit avoir un réel pouvoir jusqu’à ce qu’on engrange des résultats réels sur le terrain. L’appellation, la composition et les missions pourraient être déterminées par des spécialistes de la gouvernance. Toutefois elle doit compter parmi ces membres aucun représentant de parti politique.  

Cela me semble la meilleure option car une démission du président Kaboré laisse entrevoir un tableau peu reluisant.

Qu’adviendrait-il en cas de démission du président du Faso? La voie constitutionnelle? En ce moment on est en droit de se demander ce qui peut survenir les quatre-vingt-dix jours qui vont précéder l’élection présidentielle. Pourra-t-on tenir battre campagne et tenir les élections? Qui va succéder à Roch Kaboré ?

Fera-t-il mieux que Roch Kaboré si l’on sait qu’il a réussi à mobiliser à ses côtés les meilleurs candidats des dernières élections présidentielles. 

Ou songe-t-on à remettre le pouvoir à l’armée. Quel militaire alors pour gouverner le pays pendant combien de temps ? 

La population a le moral dans les chaussettes. Et quand on se noie, on s’accroche à tout, même à un serpent comme on le dit souvent.

Mais il faut que les plus sages d’entre nous aient le courage de tenter une dernière opération de sauvetage.

Biendjeda Ousmane Paré, journaliste-écrivain.

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