Politique

Primature du Burkina : Quels sont les atouts du nouveau « lutteur », Lassina Zerbo ?

C’est en vrai sauveteur, que le fonctionnaire international,Lassina Zerbo, a été appelé en cette soirée de vendredi, 10 décembre 2021. Arrivé dans un contexte difficile certes, mais il dispose de plusieurs atouts pour conduire une dynamique de sortir du bourbier dans lequel son pays est plongé depuis quelques années.

Le nouveau Premier ministre, le troisième de Roch Kaboré depuis son accession au pouvoir, dispose de plusieurs atouts pour exercer ses missions, à commencer par l’incontestable visage de virginité qu’il offre aux Burkinabè. Et c’est un défi majeur de relevé par Roch Kaboré : celui d’avoir réussi à nommer une personnalité dont l’image n’est associée à aucun des épisodes de crise que le Burkina a connus et qui hantent toujours le quotidien collectif.

Car, faut-il le dire, l’une des faiblesses du Burkina, c’est cette difficulté à présenter une personnalité dont le nom et/ou l’image ne sont pas mis en parallèle avec une des nombreuses crises qui agacent la vie des Burkinabè. Les plus en vue actuellement ont des images tramées à la vie politique de ces trois, voire quatre dernières décennies de la vie politique burkinabè et surtout des crises qui ont caractérisé cette période.

Pour preuve, à peine porté à son poste, Christophe Dabiré se verra coller la crise de l’année invalidée de l’Université de Ouagadougou (99-2000). Ce qui était déjà un passif qui ne plaidait pas à un élan total de solidarité dans le contexte de son arrivée et auprès d’une certaine couche de la société.

Lassina Zerbo sort donc du lot de ces nombreuses personnalités, qui auraient pu être appelées à ce poste à ce stade, mais dont le visage rime avec des moments difficiles. Ce, pas parce qu’elles sont forcément responsables ou coupables, mais tout simplement par effet du temps et de l’action conjugués.

Un autre atout, c’est le contexte de son arrivée. Ce qui lui donne, on présume, toutes les marges de manœuvre dans les conditions à poser pour conduire le navire et ainsi de jouer carte sur table avec son collaborateur hiérarchique, le président du Faso. Mieux, n’étant pas étranger à la vie nationale (il a été présent au Burkina depuis ces années à travers des évènements de diverses envergures), Dr Lassina Zerbo mesure sans doute les attentes des Burkinabè en ce moment précis.

L’autre élément à son avantage, qui découle du contexte, c’est la liberté vis-à-vis du parti au pouvoir. C’est quand la vie nationale se porte bien, qu’il y a gloire à être parti au pouvoir. De ce fait, le principal souci des cadres et militants devra être d’œuvrer à sauver les meubles, que de chercher le sexe des anges.

Un autre atout, c’est que, et contrairement aux interpellations et perceptions galvaudées d’hommes politiques à une « unité sacrée et au patriotisme », les Burkinabè, dans leur ensemble, ne sont pas dépourvus de ces valeurs. Il leur a simplement manqué des hommes capables de transformer leur solidarité et leur esprit patriotique en idéal commun de gouvernance.


Ils n’ont pas perdu leur fibre patriotique, encore moins leurs sens du sacrifice, ils désespèrent simplement de voir leurs efforts et leur amour pour la patrie, à la traîne, du fait de l’incapacité de leurs dirigeants à les porter à des fins d’intérêt national. Les évènements récents de l’insurrection populaire et du putsch manqué de septembre du CND en sont illustratifs.

L’« union sacrée et le patriotisme » tant clamés ne vont pas consister en une coalition de tous les Burkinabè pour alimenter les privilèges ou constituer un bouclier pour une minorité. En un mot comme en mille, les ressorts existent toujours pour relever les défis auxquels fait face le pays.

C’est de tout cela dont est riche le Premier ministre Zerbo. Dans ce décor, l’accompagnement déterminant reste, sans doute, celui de Roch Kaboré, le président du Faso, seul à qui est dévolu le pouvoir de nommer et de démettre. C’est aussi dire que le président Kaboré ne doit pas encombrer le nouveau promu de la maison blanche de Koulouba (primature) par des amitiés personnelles au détriment de l’intérêt du pays.

Lui-même, Roch Kaboré, dit avoir compris les Burkinabè. Eh bien, l’une des grognes de ces derniers, c’est à ce niveau. Valeur humaine d’amitié certes, mais pas au détriment du pays. Quelle fierté dans une amitié qui ne vit, voire ne se fertilise, qu’à proportion du nombre de veuves, orphelins et de Burkinabè malheureux qui fuient leur milieu de vie ?

Comme l’a dit le mouvement Balai citoyen à une de ses conférences de presse, le jeudi, 18 janvier 2018, « la gouvernance, ce n’est pas la gentillesse … » . Alors, nouveau Premier ministre certes, mais cela ne dédouane pas le président Roch Kaboré de ce qu’il doit faire, et pleinement. Bref, avec tous ces ingrédients, il ne devrait pas être trop difficile au nouveau Premier ministre, Dr Lassina Zerbo, de tirer les leçons pour mieux agir.

Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net

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