Après trois jours de travaux, la conférence sur l’agroécologie, la souveraineté semencière, les politiques alimentaires et le changement climatique, organisée par l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique ou Alliance for Food Sovereignty in Africa (AFSA), en collaboration avec African Biodiversity Network (ABN), a pris fin ce mercredi 8 décembre 2021, à Nairobi, au Kenya, par une déclaration appelant l’Union africaine (UA) se doter d’une politique alimentaire continentale.
L’Union Africaine (UA) doit se doter d’une politique continentale en matière de souveraineté alimentaire. Cet appel de la société civile africaine constitue la principale information de la déclaration de clôture de la conférence sur l’agroécologie, la souveraineté semencière, les politiques alimentaires et le changement climatique, organisée par l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique ou Alliance for Food Sovereignty in Africa (AFSA), en collaboration avec African Biodiversity Network (ABN), du 6 au 8 décembre à Nairobi, au Kenya.
Dans cette déclaration sur la position des acteurs de la société civile africaine travaillant à la promotion de l’agroécologie et des systèmes semenciers, l’AFSA a demandé à « l’Union Africaine d’approuver l’initiative visant à élaborer une politique alimentaire africaine qui garantisse le besoin urgent et pressant pour l’Afrique de se nourrir dans le contexte actuel de volatilité mondiale, de crises à plusieurs niveaux et de changement climatique chaotique avec ses conséquences désastreuses ».
Elle a également demandé à l’UA et son organe politique, le Comité technique spécialisé sur l’agriculture, le développement rural, l’eau et l’environnement, d’approuver un mécanisme (ou un programme d’action) pour la participation des organisations de la société civile concernées par l’agroécologie, les systèmes semenciers et les systèmes alimentaires, afin que, conjointement avec la Commission de l’Union africaine, elles travaillent à soutenir et à influencer un programme de transformation des systèmes alimentaires africains qui soit respectueux des droits et inspiré par la souveraineté.
L’AFSA a également invité l’organisation panafricaine d’approuver la recommandation visant à ce que la Commission de l’Union Africaine dirige le processus d’élaboration d’un cadre pour la politique alimentaire de l’Afrique qui garantisse l’adhésion et la participation d’acteurs plus larges qui répondront exactement aux aspirations de l’UA à une Afrique souveraine sur le plan alimentaire.
Protéger les petits exploitants agricoles
Les organisations de la société civile africaine regroupées au sein de l’AFSA ont imploré l’Assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine et ses organes politiques, y compris le Parlement panafricain, à protéger les millions de petits exploitants agricoles, de pasteurs, de pêcheurs, de communautés autochtones, de gardiens de la nature, de femmes et de jeunes contre les actes d’exploitation et de manipulation ultra-capitalistes des systèmes alimentaires, en sanctionnant les investissements à grande échelle.
Les membres de l’AFSA ont réaffirmé la nécessité pour l’Afrique de sortir de sa dépendance alimentaire vis-à-vis de l’extérieure.
Autre décision importante de cette conférence est le soutien de la société civile africaine à l’appel mondial contre l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) et le rejet total de son imposition aux systèmes alimentaires du continent. L’UPOV est au cœur de la volonté de privatiser et de restreindre l’accès aux semences, et donc à la nourriture ; elle favorise l’uniformité des semences, et donc l’uniformité de l’approvisionnement alimentaire. « Elle accorde à un petit groupe de sociétés transnationales les moyens de s’approprier et de contrôler les semences. L’UPOV est au service du système alimentaire industriel et corporatif », a laissé entendre Juliet Nangamba de l’AFSA.
Répondant aux questions des journalistes sur qui s’oppose à la position de l’AFSA sur la souveraineté alimentaire en Afrique, sa secrétaire générale, Joséphine Atangana, a indiqué, sans les nommer, qu’il s’agit de tous ceux qui ont intérêt à dominer l’Afrique, à la maintenir dans une dépendance alimentaire. C’est le tout le système de lavage de cerveau, d’accaparement des terres, qui œuvre à faire des africains de simples consommateurs des produits alimentaires venus d’ailleurs, a-t-elle indiqué.
Pour le coordinateur général de l’AFSA, Dr Million Belay, l’action de son organisation intervient dans un contexte africain de crises nutritionnelle, sanitaire, climatique, de la biodiversité et marqué également par un certain nombre d’insuffisances en matière politiques publiques alimentaires.
L’agroécologie, la clé de la souveraineté alimentaire
Ces faiblesses ont trait, entres autres, à l’exclusion des petits producteurs dans le processus de formulation des politiques, à l’incohérence des politiques publiques alimentaires, à leur insuffisante mise en œuvre là où elles existent, à la non effectivité du droit à l’alimentation.
En Afrique, l’alimentation est bien plus qu’un bien économique. Elle a une dimension culturelle profonde ; des rites africains sont liés à l’alimentation, a laissé la trésorière de l’AFSA, Ali Aii Shetou. C’est pourquoi, a-t-elle poursuivi, le continent doit réaliser sa souveraineté alimentaire, en contrôlant tout le processus alimentaire, depuis les semences. Et l’agroécologie constitue une arme efficace pour instaurer cette indépendance alimentaire. Elle est un moyen pour lutter contre le changement climatique, l’utilisation des engrais chimiques, l’empoisonnement alimentaire de l’Afrique.
L’ambition de l’AFSA est de décliner une vision commune continentale, de tracer les sillons de l’avenir de l’agroécologie en Afrique, a conclu Dr Million Belay. En tout état de cause, les organisations membres de l’AFSA restent convaincues que les systèmes de production et d’agriculture familiale africains fondés sur des approches agroécologiques et autochtones sont absolument essentiels au maintien de la souveraineté alimentaire et des moyens de subsistance des populations urbaines défavorisées et essentiellement rurales. Elles en veulent pour preuve le rôle joué par les régimes alimentaires traditionnels africains dans le renforcement de la résilience de certaines communautés africaines face à la pandémie de COVID-19 et aux maladies non transmissibles (MNT), qui ont atteint des niveaux épidémiques.
L’AFSA est une alliance d’acteurs de la société civile qui participent à la lutte pour la souveraineté alimentaire et l’agroécologie en Afrique. Elle est un réseau de réseaux, qui compte actuellement 36 membres actifs dans 50 pays africains. Elle est composée notamment de réseaux de producteurs alimentaires africains, de réseaux d’ONG africaines, d’organisations de populations autochtones, d’organisations confessionnelles, de groupes de femmes et de jeunes, de mouvements de consommateurs et d’organisations internationales qui soutiennent la position de l’alliance.
Mahamadi SEBOGO
L’article Souveraineté alimentaire en Afrique: L’UA appelée à doter d’une politique continentale est apparu en premier sur Quotidien Sidwaya.
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