Longtemps attendues par l’ensemble de la classe politique ivoirienne et, même, par de nombreux observateurs internationaux, les conclusions du Dialogue politique ivoirien sont maintenant connues. Relancés le 16 décembre 2021, après moult atermoiements, le clap de fin des pourparlers est intervenu, vendredi 4 mars 2022 à Abidjan, à l’issue de son cinquième round.
Les travaux, qui se sont soldés par d’importants recommandations et points d’accords, ont été conduits sous les auspices du Premier ministre, Patrick Achi. Ont participé à ce conclave, des représentants, non des moindres, de partis politiques de la majorité présidentielle, de l’opposition et des leaders d’organisations de la société civile. A ce qui se dit, les acteurs impliqués dans ce dialogue se sont « félicités des résultats » atteints, en espérant surtout que leur mise en œuvre puisse servir de socle à une véritable décrispation du climat politique et social.
Faut-il le rappeler, le processus a été lancé par le président Alassane Ouattara, à la suite de l’élection présidentielle de 2020 où sa candidature, jugée anticonstitutionnelle, avait été violemment contestée par l’opposition. Il s’agit, de toute évidence, pour le locataire du palais de Cocody, en initiant ces concertations inclusives, de garantir un avenir radieux pour son pays en renforçant la démocratie.
Il s’agit également pour le gouvernement de faire en sorte que la Côte d’Ivoire retrouve son lustre d’antan où la stabilité et la paix durable seront une réalité. Pour l’heure, ce sur quoi l’on peut, d’ores et déjà, se féliciter est l’engagement ferme que les parties prenantes ont pris allant dans le sens de l’apaisement : c’est-à-dire celui de travailler à l’apaisement de l’environnement politique et de se départir de la violence comme moyen d’accès au pouvoir.
Cela dit, loin d’être pessimiste, il reste à souhaiter vivement que la mise en œuvre des termes de ce dialogue politique ne rencontre pas trop de difficultés liées à un éventuel manque de volonté de certains acteurs du landerneau politique ivoirien, voire de ses propres initiateurs.
Par-delà tout, ce dialogue politique va-t-il permettre au pays de Félix Houphouët- Boigny de ne plus revivre les affres de son passé douloureux et qui hante encore nombre d’Ivoiriens ? Peut-on, tout de go, dire que les conclusions de ces discussions offrent dorénavant de véritables clés pour une décrispation, ad vitam aeternam, du climat sociopolitique ivoirien ? Difficile d’y répondre pour l’instant.
Car, les professions de foi des politiciens sous nos cieux n’engagent que ceux qui y croient. Malheureusement, la Côte d’Ivoire a cette mauvaise tradition d’avoir des négociations dont les points d’accord sont paraphés sans que personne ne veuille les mettre en pratique. Ces cas de figure ne manquent pas. Il suffit de jeter un coup d’œil sur les pays ayant connu des soubresauts sociopolitiques pour s’en convaincre.
En effet, il n’est pas rare de constater, non sans pincement au cœur, que les lendemains des dialogues politiques, chantés urbi et orbi, ont quelquefois donné raison aux opposants pour avoir refusé de prendre part à des échanges dont l’issue est connue d’avance. Si tant est que le gouvernement ivoirien poursuit l’objectif de concilier les filles et fils du pays, nécessaire à la consolidation de son développement socioéconomique, il ne devrait pas se faire prier pour une mise en œuvre diligente de ces accords.
Cela, en toute transparence doublée d’une volonté affichée d’aller vers une réconciliation nationale réussie. Et l’opposition politique, elle, gagnerait à accompagner le processus en évitant de jeter de l’huile sur le feu et à s’écarter de toute action aux antipodes des objectifs fondamentaux du dialogue politique. Toute chose qui sera à l’honneur des principaux animateurs du jeu politique ivoirien accusés, à tort ou à raison, d’être les artisans des turbulences meurtrières dans le pays.
Soumaïla BONKOUNGOU
L’article Les clés de la décrispation ? est apparu en premier sur Quotidien Sidwaya.