Y a-t-il un seul Burkinabè qui ne s’est pas senti fier, ragaillardi, le samedi 21 mai 2022 à l’annonce de la déroute des terroristes par le détachement militaire de Bourzanga dans le Centre-Nord ? Une riposte qui a permis de neutraliser au moins trente-cinq assaillants, avec malheureusement cinq vaillants soldats décédés et une dizaine de blessés. C’est une victoire d’étape, pour parler comme les cyclistes. Bon à prendre. C’est aussi une bataille de gagner sur de milliers d’autres, en attendant la victoire de la guerre. Ce n’est donc pas la guerre que le Burkina a gagnée, pour paraphraser le général Charles De Gaulle.
Somme toute, le message est clair, ensemble réunis dans un même élan pour la même cause, rien ne pourra ébranler les Burkinabè. Bourzanga est, ou devrait être un tournant majeur pour les forces armées nationales dans la lutte. Celui qui clôt l’épisode des revers à l’image de Madjoari et ouvre l’ère de l’anticipation, de la coordination efficace, de la puissance de feu capable de mettre n’importe quel ennemi, en toute circonstance, hors d’état de nuire. Chez nous, les HANI (hommes armés non identifiés), IANI (individus armés non identifiés) ou GANI (groupe armés non identifiés) se sont mués en Bani (lire bannis), ou bandes armées non identifiées, qui, malgré tout, ont une identité ou des identités que les Forces de défense et de sécurité (FDS) ont affiché sur les réseaux sociaux et par voie de presse. De toute évidence, il est encore temps que nous cessions nos querelles vénielles pour ensemble bander l’arc et lâcher les flèches si nous voulons un Faso prospère, paisible pour nos enfants. Nous devons faire nôtre, cette maxime de Antoine de St Exupéry :
« Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants ». Si par nos égoïsmes, nos calculs divers, nos faiblesses, nous échouions à sublimer l’intérêt collectif, notre capacité à faire bloc, nous devons pouvoir regarder la faune où la loi du plus fort est la meilleure. Une théorie souvent mise à mal quand les plus faibles, en dernier recours, se mettent ensemble. Les buffles réunis mettent en déroute les lions. Quand les poussins font bloc, ils déroutent l’épervier. Il y a cette belle histoire des fourmis qui, dans la discipline, construisent leur antre et arrivent à vaincre tout corps étranger qui se hasarderait dans leur biotope. Quand nous allons comprendre cela, quand nous allons cesser les invectives inutiles, nous aurons marqué un pas très décisif vers la restauration de l’intégrité du territoire et celle de la dignité des personnes déplacées, c’est à dire leurs retours dans leurs patelins.
Ce ne sera la victoire d’aucun camp, parti politique sur un autre. Ce sera la victoire de la tolérance et de la responsabilité historique. Est-ce vraiment la mer à boire ? Nous avons le choix entre être ces supposés faibles qui comprennent que leur survie dépend de leur capacité à laisser tomber le superflu, les égoïsmes, les « moi ou rien ». Leur capacité à conjuguer les efforts en commun. Nous sommes longtemps restés dans cette posture concurrentielle inutile qui a permis au monstre de pénétrer dans la maison, de dépasser le salon et d’en être propriétaire. Nous laissant la chambre. A nous maintenant d’user de stratagème pour pouvoir l’amadouer et le bouter hors de la case. Voire loin de la cour. Nous en avons les ressources. Nous avons la légitimité de le vaincre pour nous et pour nos enfants. Vaincre ensemble ou périr ensemble, semble être la solution. Pas d’alternative, ce qui induit que désormais chaque Burkinabè est bien ce militaire en permission qui, à l’occasion, devra être aussi ce civil en tenue, comme le professait le président Thomas Sankara. En République, nul ne prend la place de quelqu’un, mais tous remplacent un jour quelqu’un pour la continuité et la survie de la Nation. Bourzanga, où une semaine plus tôt, une cinquantaine de dignes fils ont fait les frais des terroristes, sonne comme cette lueur d’espoir qui montre que rien n’est joué.
Que les Burkinabè peuvent être maîtres du jeu et donc qu’ils peuvent tenir les manettes et imposer un rythme. N’oublions pas, les terroristes, jusqu’à l’installation de la saison hivernale, viendront titiller les FDS. Ils veulent de l’espace, ils veulent créer la psychose de la faim. Leur agenda est connu, c’est à nous de le contrarier.
Mahamadi TIEGNA
mahamaditiegna@yahoo.fr