Jauger l’efficacité du processus de digitalisation du système de gestion et de recouvrement des finances publiques au Burkina Faso, c’est le but de l’atelier de ce lundi 27 juin 2022 à Ouagadougou. Pour ce faire, les différents acteurs ont examiné le rapport final de l’étude sur la dématérialisation des procédures et processus des régies financières du ministère de l’Économie, des finances et de la prospective.
Après plus de vingt ans d’expérimentation, l’heure est venue pour le ministère de l’Économie, des finances et de la prospective (MEFP), d’évaluer la dématérialisation de son système de gestion et de recouvrement des recettes de l’État. Commandité par le ministère en question avec l’appui de la Banque mondiale, ces travaux se tiennent dans le but de faciliter les relations entre les usagers et l’administration.
Ce, face à une croissance exponentielle des données à collecter et traiter à la suite de nombreuses opérations d’offres de services publics-privés, notamment des directions générales des douanes, des impôts, du trésor.
Pour le secrétaire général du ministère de l’Économie, Nicolas Kobiané, cette évaluation va également dans le sens de passer en revue point par point les éléments du plan d’action pour une dématérialisation élargie des processus et procédures en matière de mobilisation et de recouvrement des recettes de l’État.
Nicola Kobiané, secrétaire général du ministère de l’Économie, des finances et de la prospective
« On a mené notre étude sur trois grand plans. D’abord au niveau du diagnostic pour savoir si l’accompagnement des hommes impliqués et le déploiement des ressources fonctionnent bien. Nous avons ensuite jeté un regard sur le fonctionnement des applications et des processus. Enfin, nous avons fait le rapprochement de ces éléments pour savoir si les recouvrements ont contribué à améliorer le budget de l’État via le nouveau système », a situé Dr Nouhoun Diallo, membre du Bureau d’analyse et des études stratégiques (BAES).
Les défis à relever
Ainsi, il ressort de l’étude évaluative des projets de dématérialisation/digitalisation des régies de recettes, certaines insuffisances auxquelles le BAES a proposé des pistes de solutions pour y remédier. À en croire Nouhoun Diallo, les faiblesses enregistrées se repartissent en plusieurs paliers : institutionnel, juridique, organisationnel et fonctionnel.
Sur le plan institutionnel, M. Diallo signale que la gestion des dossiers de dématérialisation confiée aux directions générales n’est pas appropriée. Il faut donc pour lui, la ramener au niveau ministériel.
Dr Nouhoun Diallo, spécialiste en gestion publique, représentant du Bureau d’analyse et d’études stratégiques (BAES)
Du point de vue juridique, l’analyste mentionne que les textes en vigueur au Burkina Faso, ne sont pas à mesure d’encadrer des nouvelles formes de monnaie comme la crypto-monnaie.
Quant à l’échelle organisationnelle, dans le cadre des ressources humaines, M. Diallo dit relever un manque de personnel informaticien à la fois qualitatif et quantitatif à même de conduire le processus de dématérialisation.
Concernant la partie fonctionnelle, le BAES a souligné un déficit de mise à jour de manuels et de guides qui permettent une description correcte des procédures et processus. À cela s’ajoute les difficultés liées à l’exécution des projets, retardée par la validation des marchés publics. Sans oublier l’absence d’interopérabilité entre les différentes directions quand on sait qu’elles demandent toutes, les mêmes dossiers aux usagers, selon Dr Diallo.
Les recommandations de la BAES
Au regard de ce qui précède, les recommandations faites par le BAES sont la mise en place d’un système de suivi-évaluation depuis le ministère de l’ l’Économie. Mais aussi d’aller vers un financement endogène des projets de dématérialisation. « L’idée est que les financements soient basés sur nos recettes propres soit sur une taxe quelconque afin d’éviter notre dépendance de l’extérieur », a indiqué l’expert en gestion publique, Nouhoun Diallo.
Les participants à l’atelier sur l’étude d’évaluation des projets de dématérialisation des régies de recettes
L’autre recommandation, c’est d’acquérir du personnel en qualité et en quantité, a-t-il insisté. « Comme le directeur général des impôts l’a dit, ce sont des personnes qui n’ont quasiment pas de vie sociale de par la façon dont elles travaillent pour aboutir aux résultats escomptés ».
Pour lui, il s’avère indispensable de valoriser ce personnel informaticien qui sont mieux payés par les institutions financières en l’occurrence les banques comparativement à l’État. Alors qu’au dernier bilan, la Direction générale des impôts a collecté deux milliards de francs CFA, un chiffre d’affaire qu’aucune banque n’a réalisé, a-t-il affirmé.
En conclusion, Dr Diallo a soutenu qu’il faille pour sécuriser les données, faire confiance aux informaticiens locaux qualifiés afin de leur donner l’opportunité de développer des applications beaucoup plus fiables et protégées.
Hamed NANEMA
Lefaso.net
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