Retour annoncé de Blaise Compaoré au Burkina : A Ouagadougou, les avis sont tranchés
Depuis l’annonce du retour de l’ancien président, Blaise Compaoré, au pays qui serait prévu ce vendredi 7 juillet 2022 les commentaires et polémiques vont bon train. Les pros et les contre s’affrontent sur la toile. Mais pour connaître les avis réels des citoyens, Lefaso.net est allé à leur rencontre.
Idrissa Nanéma, commerçant :
« En ce qui nous concerne, le retour de Blaise Compaoré est une question qui devait être résolue depuis longtemps. Après-demain, c’est trop long. S’il pouvait rentrer aujourd’hui, c’était mieux. Huit ans, ce n’est pas huit jours. Depuis qu’il est parti, rien ne va. Des plus vieux aux plus jeunes, tous savent que la vie a changé, parce que ce n’est plus comme avant, rien ne marche. Les affaires ne vont plus bien et le prix des produits ne font qu’augmenter, et on n’a pas de solution. Donc, les gens mêmes qui l’ont chassé le regrettent maintenant. Et ils se disent que même s’ils pouvaient le laisser mourir au pouvoir, c’était mieux qu’aujourd’hui. S’il arrive comme prévu, vous allez voir, tout va rentrer dans l’ordre, parce qu’il a ce pouvoir ».
Idrissa Nanema, commerçant
Alida Idogo, déléguée médicale :
« Cette décision nous va droit au cœur. Cela va nous faire plaisir qu’il vienne pour régler la situation du pays et rester dans son pays, parce que, c’est le fils du pays et c’est la terre de ses ancêtres. Pour ne pas être plus long, je pense qu’il est le bienvenu. Je suis contente, nous étions assoiffées de lui et nous sommes même pressées qu’il rentre parce que ça ne va pas. Depuis qu’il est parti ça ne va pas et on l’attend ».
Alida Idogo, déléguée médicale
Saïdou Maïga, technicien :
« Pour moi, c’est une très bonne idée et il est le bienvenu, malgré qu’il y ait eu beaucoup de problèmes. Mais on dit que dans la vie, tout se pardonne et il faut aller vraiment du bon côté. Donc s’il vient, si la justice a besoin de lui, il faut qu’il se présente et réponde. Parce que, dans la réconciliation, il faut aussi la vérité ».
Saïdou Maïga, technicien
Adama Ouédraogo, gestionnaire et éducateur de l’enseignement général et technique :
« Si on considère le cadre global, ce n’est pas une mauvaise chose, parce qu’on a besoin de réunir tous les fils et filles du Burkina pour que nous puissions ensemble faire face aux défis. Mais malheureusement, compte tenu du dossier judiciaire pendant, qu’est-ce que les autorités disent par rapport à cette question ? Est-ce que cette décision ne va pas remettre en cause les différents pouvoirs ? Ont-elles consulté les autorités judiciaires pour savoir si quelqu’un qui est condamné peut revenir sans problème et repartir ? C’est la question qui reste posée. Sinon, en tant que Burkinabè, il n’y a pas de problème ».
Adama Ouédraogo, gestionnaire et éducateur de l’enseignement général et technique
Victor Nikièma, vendeur de fournitures scolaires :
« La décision a été prise par les autorités pour le retour manu militari de Blaise Compaoré dans la situation actuelle. Je ne pense pas que c’est pour apaiser les choses. Je connais l’histoire du Burkina Faso depuis 1987 et tout est lié. Donc, ce que nous vivons aujourd’hui, je pense qu’il en est en grande partie responsable. Et je me dis que le président Damiba ne connaît pas bien ce qu’il a été et a fait.
Au Burkina, si on parle de cohésion et de pardon, c’est dû au passage de Blaise Compaoré au pouvoir et je ne pense pas que qu’on puisse régler nos problèmes sans une justice. Il n’y aura pas de paix sans justice. Il faut reconnaître ses torts, savoir qui a fait quoi et ce qui est à rembourser. Qu’ils le fassent pour que nous puissions avancer. Ceux à qui on doit pardonner, qu’on leur pardonne et on avance parce que chacun a un cœur qui saigne. Sinon, je ne pense pas qu’on doit léser des gens pour donner la priorité à d’autres. Nous sommes tous des humains et je ne pense pas que ce soit la solution de notre réconciliation ».
Victor Nikiema, vendeur de fourniture scolaire
Issouf Sawadogo, entrepreneur
« Cette décision relative au retour de Blaise Compaoré au pays nous met dans une situation très inconfortable, parce qu’on se dit que si c’est pour la réconciliation, il doit y avoir un processus. Et on ne peut pas faire de réconciliation sans d’abord situer les responsabilités et faire justice. Je pense que le Burkina Faso a déjà fini avec le dossier Blaise Compaoré et consort.
Nous savons que Blaise Compaoré a été condamné et nous nous pensons que s’il retourne au pays, c’est pour répondre à cette condamnation. Mais si aujourd’hui il vient de façon libre, cela veut dire que c’est une façon d’aller à l’encontre de notre justice qui se veut indépendante et le politique ne peut pas enjamber cette décision de justice.
Si on ne peut pas situer les responsabilités par rapport à tout ce qui a été fait de mal à des personnes dans ce pays, je ne pense pas qu’on puisse aller à la réconciliation. Donc, il faut la vérité, il faut que chacun reconnaisse ses torts avant qu’on aille à la réconciliation. Il faut qu’il réponde à la décision de justice et qu’on l’amène là où il faut l’amener, c’est-à-dire, dans les prisons avant qu’on ne sache comment entamer la réconciliation nationale ».
Issouf Sawadogo, entrepreneur
Yvette Zongo
Lefaso.net