Le moins que l’on puisse dire et comme il fallait s’y attendre, le retour de Blaise Compaoré au pays après sept ans d’exil aura suscité des débats passionnés voire passionnels entre contempteurs de cette démarche présidentielle et thuriféraires de l’ex-président. Les uns affirmant qu’il consacrait “la mort”(sic) de la République si tant est que la justice qui est le socle de celle-ci avait été désavouée, pendant que les autres clamaient qu’il ouvrait la voie à la paix et à la concorde civiles et conséquemment au renforcement de cette République. S’il y a du vrai dans les deux thèses, nous sommes de ceux qui préfèrent la voie médiane avec le doyen Frédéric Titinga Pacéré, vieux sage blanchi sous le harnais, pour dire qu’au-dessus de la justice il y a la Nation, dont la sauvegarde surpasse toute autre considération et querelle partisanes. Affirmer en effet que la Nation burkinabè est dans le dur au triple plan politique, économique et social serait enfoncer une porte ouverte.
Entre une situation politique très tendue, une conjoncture économique rendue difficile par des facteurs exogènes et endogènes à la fois et un tissu social en lambeaux du fait de la crise sécuritaire, le Burkinabè lambda ne sait plus où donner de la tête, sa préoccupation majeure étant d’assurer sa pitance quotidienne, plutôt que de conjecturer sur des questions super structurelles. On a, du reste, constaté que l’arrivée de Blaise Compaoré n’a pas suscité outre mesure un grand émoi en son sein, même si l’histoire politique nous enseigne qu’avec ce peuple, il ne faut jurer de rien. C’est dire que dans la division manichéenne actuelle du pays, et nous n’aurons de cesse de le dire, il faut avoir à l’esprit qu’il n’y a pas de gens définitivement mauvais et d’autres qui soient inéluctablement bons .Il faudra qu’il y ait une réelle volonté de se parler entre les deux camps, afin de sortir de l’impasse mortifère dans laquelle se trouve le pays. Sortir de cette guerre des tranchées pour aller à l’essentiel, à savoir la nécessité du dialogue pour l’intérêt supérieur de la Nation, voilà, nous semble-t-il, le leitmotiv du président Damiba lorsqu’il a initié ce dialogue de haut niveau. Cette démarche patriotique doit donc emporter l’adhésion de tous, principalement des élites politiques et sociales. C’est le devoir de la génération actuelle et si par extraordinaire elle venait à la trahir, elle mériterait bel et bien de figurer dans les poubelles de l’histoire du pays.
Boubakar SY