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Message de pardon de Blaise Compaoré : des acteurs politique et coutumier se prononcent

L’ancien président Blaise Compaoré a, dans un message, demandé pardon au peuple burkinabè et à la famille de son « frère et ami » Thomas Sankara. Interrogés sur cette demande de pardon, quelques figures de la scène nationale livrent leurs impressions.

Maitre Tintinga Frédéric Pacéré, Naaba de Manega : « je souhaite que cette réaction suscite une prise de conscience » « Dans notre culture au Burkina Faso, on dit en langue moré : « Sugr nkaï ti yel sanme » (si le pardon est absent, tout se détériore dans l’échiquier). Dans nos traditions africaines, tous les hommes par principe se sentent frères de sorte que, quels que soient les désagréments qu’une situation ait pu créer, avec la reconnaissance et la demande de pardon de l’auteur supposé (même à tort), la personne victime ou sa famille en règle générale, est poussée vers le rétablissement de l’équilibre social et la quiétude. Dans le système judiciaire des 67 grands groupes ethniques (évaluation de mes travaux de l’opération Lafi de Belgique et du Danemark), les ethnies et les nationalités des traditions de l’Afrique noire, il n’existe aucun système judiciaire qui a prévu pour répression la prison. Au palais de Luxembourg de Paris au 1er Congrès de la justice pénitentiaire représentant l’Afrique noire, devant les représentants du gouvernement dont le ministre de la Justice, Jacques Toubon, devant les députés du palais de Bourbon, les sénateurs et de très hautes personnalités telles que le maire de Paris, j’ai déclaré que la prison est une invention de l’occident et envoyée en Afrique. Par principe, l’Africain et le système organisationnel de la société et la gouvernance accordent une prééminence sinon, un sacré au concept du vivre-ensemble. Pour un véritable Africain, pour un Burkinabè de conscience, son pays est sacré. C’est pour cela que cette lettre du président Blaise Compaoré demandant pardon répond de la nature de l’Africain et du Burkinabè. Probablement que le président Blaise Compaoré avait l’envie de cette demande depuis quelques années, mais l’opportunité difficile, s’il n’était pas sur le territoire de ses ancêtres ou s’il n’y était pas reparti pour réflexion. Pour ma part, je souhaite que cette réaction suscite une prise de conscience malgré notre contexte sensible et difficile ».

Eddie Komboïgo, président du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) : « Je demande au peuple d’accepter le pardon » « Elle est très profonde, empreint d’humanisme qui rappelle notre culture, la demande du pardon. Et venant du président Compaoré, c’est très profond pour notre histoire. C’est à ce titre que je demande à l’ensemble du peuple burkinabè d’être attentif, d’entendre le message et le pardon demandé ; et aux victimes d’entendre et d’accepter le pardon. Pardonner pour l’histoire, pardonner pour construire une nation, une grande Nation de demain. Je l’avais déjà précédé dans ma demande de pardon. Et j’ai été agréablement surpris par la hauteur de vue qu’il a eue en envoyant ce message. Je ne peux donc qu’adhérer à tout le contenu de sa lettre. Je demande aux militants du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) d’être les ambassadeurs de ce message auprès du peuple burkinabè. Je pense que c’est le début du processus de la réconciliation nationale ».

Abdoulaye Mossé, président du Parti panafricain pour le salut (PPS) : « Il fait preuve d’humilité » « Nous saluons cette demande de pardon hautement symbolique par lequel, il fait preuve d’humilité. Et nous sommes convaincus que le peuple burkinabè qui est reconnu pour être tolérant, ne restera pas insensible à cet acte. Vu l’état dans lequel il s’est rendu au Burkina Faso au vu et au su de tout le monde. La vie est faite de hauts et de bas. Nous demandons à Dieu Tout-puissant d’apaiser davantage les cœurs des Burkinabè. Ce qui permettrait de taire nos différends et de regarder l’intérêt supérieur de la Nation à l’unisson. Nous luttons contre les groupes armés terroristes en vue de recouvrir l’intégralité de notre territoire. C’est en cela que nous pourrons bâtir ensemble notre pays dans l’union, la paix, la quiétude et nous inscrire dans la dynamique de la réconciliation nationale. Depuis notre adresse, le 2 avril 2022, lors de la création de notre parti, nous avons invité les Burkinabè et nous avons dit que le Parti panafricain pour le salut (PPS) est issu des jeunes provenant de plus de 10 partis politiques. Ce que nous voulons, c’est l’union des Burkinabè. Et pour ce faire, nous devons nous pardonner. Nous avons demandé que notre parti soit le tombeau de la haine, de Maurice Yaméogo jusqu’à Roch Marc Christian Kaboré. Nous restons toujours dans notre logique et ce qu’il ne faudra pas ignoré, il est vrai que la justice vise à mettre de l’ordre dans la société et nous pensons qu’en tout état de cause, les juges, les magistrats doivent jouer leur partition pour que le pays ne s’éclate pas. Les politiciens doivent jouer les leurs, la société civile aussi, mais chacun doit penser à l’intérêt supérieur de la Nation. Vivement que la paix revienne au Faso ».

Moussa Zerbo, secrétaire général par intérim de l’Union pour le Progrès et le Changement (UPC), porte-parole de l’UPC : « une faute reconnue est à moitié pardonnée» « L’Union pour le progrès et le changement (UPC), à travers son président Dr Zéphirin Diabré, a toujours été dans cette dynamique de réconciliation entre les Burkinabè. Et cela a toujours été son cheval de bataille. Raison pour laquelle, il a même accepté aller dans le gouvernement du Président Roch Marc Christian Kaboré au nom de la réconciliation. Cela donc ne peut que susciter des lueurs d’espoir pour nous. Si ce message est effectivement de Blaise Compaoré, nous pensons comme le dit un adage qu’une faute reconnue est à moitié pardonnée. Et il n’y a rien de plus grand que le pardon. Dans toutes les religions révélées, le pardon est la chose la plus prônée. Et si l’ancien chef d’Etat venait à demander pardon, nous pensons que c’est une bonne chose. Il appartient à la femme de Thomas Sankara et aux orphelins d’apprécier ce pardon parce que ce sont eux qui ont subi le plus lourd tribut dans cette situation. Par ailleurs, la justice s’est prononcée en condamnant Blaise Compaoré. L’exécution de cette décision judicaire relève d’un autre niveau. Mais nous pensons qu’avoir l’humilité de demander pardon est une grande chose dans nos sociétés traditionnelles. Nous apprécions donc cela positivement ».

Propos recueillis par

Oumar P. OUEDRAOGO & W. Aubin NANA

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