Politique

Burkina : Gouvernement et classe politique ficèlent l’agenda de la transition

Sur convocation du ministre en charge des libertés publiques, les composantes de la classe politique nationale se sont retrouvées autour du Premier ministre, ce vendredi 26 août 2022 à Ouagadougou. À l’ordre du jour, le chronogramme de la transition, qui prend fin en juillet 2024 avec les élections.

Cette rencontre fait suite à celle tenue le 29 juin 2022 au cours de laquelle, le gouvernement a informé la classe politique sur le dialogue avec la CEDEAO au sujet du délai de la transition. Au sortir de ladite séance, l’ex-Alliance des partis et formations politiques de la majorité présidentielle (APMP) avait déploré d’avoir été exclue des discussions sur l’agenda électoral.

A cette rencontre de vendredi, 26 août 2022, toutes les « tendances » politiques étaient présentes. Il s’agit de l’ex-Chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso (CFOP-BF) avec Eddie Komboïgo, l’ex-Alliance des partis et formations politiques de la majorité présidentielle (APMP) avec Bala Alassane Sakandé, l’ex-Opposition non-affiliée (ONA) représentée par Pr Abdoulaye Soma, les autres partis avec l’ancien Premier ministre Luc Adolphe Tiao et les partis politiques nés après le 24 janvier 2022, conduits par Abdoulaye Mossé.


La rencontre a consisté pour le gouvernement à présenter à la classe politique, les termes de référence du nouveau chronogramme de la transition, avec pour objectif que l’agenda soit adopté ensemble, après observations et apports des acteurs politiques. « Nous remercions le Premier ministre pour cette démarche inclusive, nous l’avons encouragé à poursuivre sur cette lancée de faire en sorte qu’il y ait moins de contestations. Et nous allons accompagner ensemble, courageusement, pour que la transition puisse être dans le délai », s’est exprimé l’ex-Chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso (CFOP-BF), Eddie Komboïgo.


« De tout temps, nous avons relevé cet état de fait, qui consistait à un peu mettre de côté la classe politique pour faire ce travail, parce qu’un comité technique, composé essentiellement par des membres du gouvernement (qui ne sont pas politiques à priori) a été mis en place. On s’est dit pourquoi ne pas associer la classe politique à ce comité technique qui va faire en sorte que nous puissions échapper à un certain nombre de préoccupations plus tard. C’est vrai, on a été entendu, même si cela n’a pas été à la hauteur de nos attentes, à partir du moment où c’est une seule personne par entité que le Premier ministre a accepté de mettre dans ce comité technique qui doit réfléchir et proposer un chronogramme. Les acteurs politiques seront consultés par la suite. Ce que la transition est en train de mettre en place, c’est pour la classe politique. Donc, si elle n’est pas associée, au finish, ça va poser des problèmes. Mieux vaut que dès le départ, la classe politique puisse donc être associée, cela évite qu’il y ait beaucoup de discussions sur ce que le comité technique aurait arrêté comme chronogramme », a poursuivi le président de l’APMP, Bala Alassane Sakandé, rapportant également que des reformes politiques sont incessamment annoncées.


Pour lui, « c’est bon, mais ce n’est pas arrivé, ça commence à venir. Nous avons félicité à 80 % (j’ai bien dit qu’on ne peut pas le féliciter à 100%), on ose espérer qu’ils vont changer le fusil d’épaule pour associer les acteurs politiques. Nous parlons d’inclusivité, parce que dans l’exclusivité, on ne peut rien faire. Mais dans l’inclusion, on peut faire beaucoup de choses. Exactement, nous avons dit également, aujourd’hui, les FDS (Forces de défense et de sécurité) à elles seules ne peuvent pas lutter contre le terrorisme, les civils également à eux seuls ne peuvent pas. C’est la conjugaison de toutes ces forces-là, tout le peuple burkinabè, qui peut parvenir à vaincre le terrorisme ».


Pr Abdoulaye Soma de l’ONA apporte des précisions en relevant que la rencontre avait pour objet de dégager la manière suivant laquelle, le chronogramme de la transition va être arrêté. « Donc, ce n’est pas encore le fond du chronogramme de la transition, mais quelle va être la méthode de travail pour déterminer les différentes séquences de la transition. La transition doit gérer un certain nombre questions, notamment les élections. (…). Nous avons plus travaillé sur les conditions préalables, c’est-à-dire, les méthodes de travail. Et à ce titre-là, il y a une équipe technique qui a été mise en place et qui va consulter les forces-vives de la nation pour recueillir les points de vue, les propositions, les recommandations de chacune des composantes des forces-vives pour pouvoir arrêter le chronogramme final de la transition. C’est au titre de cette proposition que nous avons suggéré que les acteurs politiques soient déjà dans le comité technique qui doit conduire le processus pour pouvoir prendre déjà en charge un certain nombre de questions qui peuvent être délicates. Je suis ravi de voir que le Premier ministre a été attentif (il a accepté la recommandation) et nous le remercions et le félicitons pour cette ouverture d’esprit », détaille Pr Soma, IVe vice-président de l’Assemblée législative de transition.


Représentant des « autres partis », Luc Adolphe Tiao apprécie cette démarche inclusive du gouvernement, car, de son avis, le processus de la transition ne peut atteindre ses objectifs s’il fonctionne de façon unilatérale. « Ayant assisté à la première rencontre, je pense que déjà aujourd’hui, l’atmosphère avec la classe politique était très positive. Cela prouve qu’il y a un travail qui a été fait et que de plus en plus, nous évoluons ensemble vers le même objectif. Mais ce qui a été le plus positif, je pense, c’est qu’aujourd’hui, à la demande des partis politiques, il y aura un représentant de chaque composante dans le comité technique chargé de finaliser l’agenda de la transition. Par ailleurs, nous avons souhaité que dans le cadre du dialogue, nous puissions l’élargir davantage avec les partis politiques (pas seulement les seuls représentants des partis qui assisteront à ce genre de discussions et le Premier ministre a accepté que le comité technique pourra rencontrer les partis membres des différentes composantes). Je pense qu’en faisant de la sorte, nous allons avoir sans doute beaucoup plus de propositions, de consensus, de telle sorte qu’on espère que dans les deux années à venir, nous puissions atteindre les objectifs, que les élections puissent se tenir parce que nous aurions retrouvé la paix, nous en aurions fini avec cette guerre que nous menons avec le terrorisme », rend-il compte avant de souhaiter que les choses commencent le plus tôt possible, l’agenda de la transition ayant déjà démarré.


« Ce qui manque dans l’agenda d’aujourd’hui, on a simplement donné des perspectives. Maintenant, il faut fixer des dates, un planning qui va dire que de telle date à telle date, on aurait fini, à telle date, on aurait atteint une partie de la sécurisation du territoire. Cela va permettre aussi de mettre la pression sur le gouvernement, mais aussi sur l’ensemble des acteurs politiques pour que nous puissions évoluer. Nous pensons que dès que le comité aura fini ses concertations (et je crois que c’est le plus tôt possible), on devra aboutir à un agenda avec des dates précises », confie l’ancien Premier ministre, Luc Adolphe Tiao.


Le chef de la délégation des « partis politiques reconnus après le 24 janvier 2022 », Abdoulaye Mossé, a, quant à lui, jugé pertinente l’idée d’associer toutes les composantes politiques à ces discussions. « Le 24 janvier est un ensemble de situations associées qui ont conduit à cela. On doit tirer leçons sur le plan sécuritaire et politique également. Pour nous, partis crées après le 24 janvier, c’est de ne pas répéter ce que nos devanciers ont fait pour nous amener où nous sommes aujourd’hui. Nous pensons que nous avons assez d’éléments pour essayer de faire autrement les choses sur le terrain. C‘est d’ailleurs pour cela qu’après l’ex-CFOP-BF, l’ex-APMP, l’ONA, les autres partis, ils ont associé les partis crées après le 24 janvier. D’ailleurs, vous voyez aussi que ce n’est pas seulement lors des élections que nous devrons animer la vie politique ; avant même les élections, que ce soit socialement ou autrement, sur le terrain, ces partis essaient de donner le mieux d’eux pour essayer de se rapprocher des populations et faire autrement la politique », a soutenu Abdoulaye Mossé.


O.L.O
Lefaso.net

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