La rentrée parlementaire est inscrite dans la mémoire collective comme un moment où les députés se retrouvent au cours d’une cérémonie solennelle pour ensemble accomplir leur mission. Cependant, cette tradition n’a pas été respectée, le lundi 12 septembre dernier, à l’hémicycle au Sénégal. En lieu et place des poignées de main empreintes de courtoisie, c’est à un spectacle désolant que les élus du peuple sénégalais se sont livrés. En effet, l’espace démocratique par excellence de débats a été transformé à un ring de boxe entre des députés de la coalition présidentielle et ceux de l’opposition. Il a fallu l’intervention de la gendarmerie pour éviter le pire et permettre d’élire le président de l’Assemblée nationale. Et, c’est in extremis que le candidat de la majorité Benno Bokk Yaakaar, Amadou Mame Diop, a obtenu 83 voix sur un total de 165 parlementaires.
Ce député-maire de Richard-Toll a été élu à l’issue d’un scrutin boycotté par l’opposition. Deux raisons ont servi de prétexte pour une montée fulgurante de l’adrénaline dans les deux camps. La première pomme de discorde se situe au niveau des députés qui occupent des postes ministériels. Pour l’opposition, ces parlementaires devraient renoncer à leur poste de ministre avant de siéger à l’hémicycle. L’autre divergence concerne les bulletins de vote pour le poste à la présidence de l’Assemblée nationale. Dans le souci de garantir un scrutin accepté de tous, il aurait fallu que les ministres issus de la majorité rendent le tablier. Surpris par la percée historique de l’opposition, au soir des législatives du 31 juillet 2022, le pouvoir en place pourrait se livrer à des manœuvres pour tenter de sauver les meubles. Sur les 165 sièges à pourvoir, la majorité n’a obtenu que 82 sièges contre 80 pour l’opposition. Pourtant en 2012 et 2017, la coalition présidentielle avait respectivement récolté 119 sièges sur 150 et 124 sièges sur 165. Cette année, l’opposition avait une occasion en or pour se hisser au perchoir avec trois voix de plus, soit 83 voix. Malheureusement, elle a péché pour n’avoir pas réussi à présenter un candidat unique. Le maire de Dakar, Barthélemy Dias et celui de Guediawaye, Ahmed Aidara, tous du même camp, étaient candidats en plus de Mamadou Lamine Thiam du parti Wallu Sénégal. Dans une telle situation, l’opposition ne peut que s’en prendre à elle-même. Elle doit tirer leçon de ses propres erreurs.
Les députés de la majorité ne doivent pas, à contrario, dormir sur leurs lauriers. A commencer par le nouveau président de l’Assemblée. Le pharmacien de formation parviendra- t-il à apporter la thérapie nécessaire pour apaiser les cœurs ? Après son élection, il a tenu un discours plutôt rassembleur. Il a laissé entendre qu’il sera le président de tous les députés pour relever ensemble les défis d’une Assemblée constructive. Vivement qu’après le discours, les actes suivent, à la grande satisfaction du peuple sénégalais. La démarche doit être soutenue par les deux parties afin que cette page noire du parlement sénégalais soit définitivement tournée.
Abdoulaye BALBONE
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