Politique

Burkina Faso : « Si les populations sont sorties acclamer Ibrahim Traoré, cela veut dire qu’elles voient en lui un Thomas Sankara », Idrissa Nogo

Le capitaine Ibrahim Traoré a été à l’issue des assises nationales, désigné pour conduire la transition qui va durer 21 mois. Idrissa Nogo, membre du bureau exécutif du parti panafricain pour le salut (PPS) dit avoir peur que « l’on ne fasse du neuf avec du vieux », au regard de la configuration des organes de la transition, qui ressemblent à bien de niveaux à ceux du MPSR 1. Il dit déplorer aussi la présence de la même classe politique qu’il juge “usée”, et dénonce le fait que les nouvelles autorités n’aient pas associé les partis politiques créés après le coup d’Etat du 24 janvier, parmi lesquels figurent le PPS.

Pour ce qui est du choix du capitaine Traoré, on dit que c’est au pied du mur que l’on voit le vrai maçon. Le capitaine Traoré qui jusqu’à présent était inconnu du grand public, a été hissé au plus haut sommet de l’Etat par les circonstances. Donc il faut faire avec, il n’y a pas d’homme providentiel.

Le 30 septembre 2022, lors du coup d’Etat de rectification du MPSR 1 perpétré par le jeune capitaine Ibrahim Traoré et ses hommes, la population s’est retrouvée dans la rue en scandant le nom de Thomas Sankara et en scandant des slogans révolutionnaires. C’est pour vous dire, que le peuple burkinabè a soif d’un nouveau Thomas Sankara. Et un nouveau Thomas Sankara, c’est celui qui incarne les valeurs, l’intégrité et la vérité. Les populations espère un nouveau Thomas Sankara qui sera l’incarnation de l’insoumission politique tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Burkina Faso, face à un certain nombre de décisions à prendre. On veut d’un Thomas Sankara, mais on ne veut pas du Sankarisme, qui regroupe ceux qui ont fait de l’assassinat de Thomas Sankara un fonds de commerce. Donc, si les populations sont sorties acclamer Ibrahim Traoré, cela veut dire qu’ils voient en lui un Thomas Sankara, donc on s’attend à ce qu’il se comporte dans les faits, dans les paroles, dans les actes, comme le père de la révolution.

Maintenant, j’ai peur que l’on fasse du neuf sur du vieux. Je vois que c’est plus ou moins les 71 députés qui ont été reconduits, 25 ministres qui ont été validés. Ça ressemble un peu au MPSR 1 de Paul Henri Damiba, et cela me fait peur. Il faut définitivement rompre avec la vieille pratique prédatrice, sangsue de Paul Henri Damiba et de ses collaborateurs, qui en réalité étaient mus par des intérêts égoïstes.

Il faut que le capitaine Traoré mette en place un gouvernement ouvert, sans exclusion, et ne pas se presser pour parler de la réconciliation qui est tout un processus. Et je souhaite que ce processus soit laissé, soit réservé aux nouvelles autorités qui vont être démocratiquement élues après la transition.

Je déplore cependant, le format pris par les assises nationales. On a convié les partis politiques sous la composante de l’ex-majorité, l’ex-CFOP et l’ex-ONA et cela me pose un problème, car ces regroupements ont volé en éclat après le coup d’Etat. Maintenant qu’il n’existe ni majorité ni opposition, les nouvelles autorités ont oublié qu’après le coup d’Etat de Paul Henri Damiba, il y a eu huit partis politiques qui ont été créés. Ces huit partis-là, on les met sous quelle composante ? Quel est le format qui leur a été adressé pour les inviter à prendre part aux assises ? Quel est le quota de députés qui va leur être réservé ? Quand on regarde le résultat des assises, l’ex-majorité et l’ex-opposition ont des quotas à l’Assemblée.

Et nous, les partis créés après le coup d’Etat du 24 janvier dont le PPS, on nous met sous quelle composante ? On nous donne combien de députés ? Donc, à ce niveau, je trouve qu’il y a exclusion et il faut rapidement que les nouvelles autorités corrigent cela. Et pendant qu’on y est, on a aussi invité des citoyens au niveau des régions, en tenant compte de l’ancienne configuration de l’ALT qui n’existe plus. Les correspondances adressées aux gouverneurs précisaient deux représentants par région dont l’ex- député de l’ex-ALT. À ce niveau aussi je ne suis pas d’accord, on ne peut pas inviter des gens au nom d’une structure qui n’existe pas. L’ex-majorité n’existe plus, l’ex-CFOP n’existe plus, l’ex-ONA n’existe plus. On a invité des gens à venir aux assises au nom de ces composantes et cela me pose un problème. Il ne faut pas que l’on fasse du neuf avec du vieux en reconduisant ces mêmes citoyens sangsues, prédateurs qui ne pensent qu’à leur ventre. Et pour choisir les membres qui vont siéger dans la future Assemblée, il ne faut pas que ce soit des députés loubards, vandales, qui pour un rien enlèvent leurs écharpes poser à l’Assemblée et descendre dans la rue pour donner des coups de poing à des citoyens. Il faut des critères clairs de désignation.

La principale raison pour laquelle Ibrahim Traoré a fait irruption dans la vie politique pour stopper la marche du MPSR 1, c’est l’insécurité. Donc, ce qu’il faut rapidement faire, c’est restaurer l’intégrité du territoire, stopper les attaques terroristes. Il faut aussi traiter avec diligence la question du retour des déplacés internes. Le capitaine Ibrahim Traoré a aussi dit que la haute hiérarchie militaire est devenue milliardaire.

Il faut rapidement que cette hiérarchie militaire soit répertoriée et qu’on leur fasse valoir leurs droits à la retraite anticipée. Nous ne voulons plus d’une hiérarchie militaire qui s’est embourgeoisée, qui fait du commerce, qui construit des bunkers et des immeubles, qui roulent des V8. Nous ne les voulons plus. Aussi, cette vieille figure politique usée, qui nous gouverne depuis 1980, il faut aussi les répertorier et les mettre à la retraite politique anticipée. Aussi, ces OSC qui n’ont pas de contenance et qui n’ont même pas souvent de récépissés de reconnaissance, il faut exiger qu’ils présentent des rapports d’activités.

Lefaso.net

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