Après six reports, l’audience du procès intenté par le président du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) Eddie Komboïgo contre Achille Tapsoba a finalement eu lieu à huis clos la semaine dernière dans le bureau du juge des référés. Le verdict tant attendu par les deux parties, qui est tombé cet après-midi plonge le néophyte en droit dans le brouillard qu’il ne lui apporte la lumière dans cette affaire opposant deux camarades qui se disputent à la paternité du parti fondé par Blaise Compaoré en 1996.
L’action engagée au nom du CDP par Eddie Komboïgo visait, faut-il le rappeler, à demander à la justice d’interdire à Achille Taposba le droit de parler et d’agir au nom du CDP.
Dans un communiqué publié peu après la décision du juge, ce dernier, qui revendique le titre de président par intérim du CDP, s’est réjoui, « au nom de la direction, de ce dénouement heureux qui met fin à une action malveillante d’un camarade à qui le CDP avait confié la plus charge de conduire sa destinée ». Pour lui, le juge des référés « n’a pas accédé aux prétentions et aux mesures sollicitées par Eddie Komboïgo ». Pis, il l’a condamné aux dépens.
Le Dans le camp du président Eddie Komboïgo, on se dit satisfait du contenu de l’extrait de l’ordonnance du juge, en attendant de connaitre l’intégralité de sa décision qui n’est pas encore disponible.
Explications avec Me Bouba Yaguibou, un des avocats du CDP.
Quelle appréciation faites-vous de la décision du juge des référés rendu publique cet après-midi ?
Il faut d’abord rappeler qu’agissant au nom du CDP, le président Eddie Komboïgo a introduit la procédure en référé pour demander au président du tribunal d’ordonner qu’il soit interdit à Achille de faire des publications, de poser des actes au nom du CDP et de cesser les troubles sous astreintes. Ceci après avoir fait le constat que le 8è congrès s’est régulièrement tenu les 18 et 19 décembre 2021 et que les actes de ce congrès ont été déposés au ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation.
Le juge a déclaré son action recevable, ce qui veut dire qu’il lui reconnait la qualité de président du CDP, car pour agir valablement au nom d’une personne morale, il faut avoir la qualité de représentant légal de cette entité. Le juge a aussi déclaré l’intervention volontaire d’Achille Tapsoba au nom du CDP irrecevable. Lorsqu’une personne n’est pas partie à un procès et qu’elle estime avoir des intérêts en jeu, elle fait ce qu’on appelle l’intervention volontaire. C’est ce qu’a fait Achille Tapsoba et que le juge a rejeté. Il a en revanche déclaré recevable les interventions volontaires des camarades de Achille Tapsoba comme Salifou Sawadogo, Sané Topan, Jean Koulidiati et autres. Tout simplement parce que ces derniers ont expliqué au juge qu’ils sont des militants du CDP et à ce titre, ils ne peuvent qu’agir en leur nom personnel et non au nom du CDP.
Le juge a également rejeté les exceptions de nullité que la partie adverse avait demandées contre l’action du CDP représentée par Eddie Komboïgo. Elle souhaitait qu’elle soit déclarée nulle parce que, toujours selon elle, Eddie Komboïgo n’avait pas la qualité de représentant du CDP et ne pouvait pas agir au nom du CDP.
Le juge n’a cependant pas accédé aux mesures sollicitées par le président du CDP. Il l’a même condamné aux dépens…
C’est exact, le juge dit qu’il n’y a pas lieu à ordonner les mesures sollicitées telles que présentées à la juridiction. Nous attendons de voir sa décision en intégralité parce que pour l’instant, il ne s’agit que de l’extrait de l’ordonnance. Il nous faut connaitre les motivations de sa décision avant d’aviser.
Il a aussi dit qu’il n’y a pas lieu de condamner au paiement des frais irrépétibles. Nous avions demandé que la partie adverse paie les frais d’avocat, tout comme elle aussi avait demandé au juge de nous condamner à payer les mêmes frais. Sur ce point, les deux parties ont été déboutées.
Quant à la condamnation du président du CDP, Eddie Komboïgo aux dépens, cela s’explique par le fait que le juge n’a pas accédé aux mesures qu’il avait demandées. L’enjeu de la communication lancée par Achille Tapsoba dans son communiqué est de travestir la réalité. On a l’impression qu’il est contre Eddie Komboïgo et non contre le CDP qu’il représente.
En l’état actuel, Achille Tapsoba a-t-il donc le droit d’agir et de parler au nom du CDP ?
Pas du tout ! Il ne peut agir et parler au nom du CDP parce que ce sont des troubles même si le juge ne l’a pas expressément dit. Mais nous n’avons pas demandé que ça. En tout état de cause, à l’étape actuelle, nous sommes confortés à l’idée que le président légal du CDP, c’est bien Eddie Komboïgo, sinon, l’action qu’il a introduite aurait été rejetée, déclarée irrecevable pour défaut de qualité de représentant légal du CDP. En d’autres termes, le juge aurait pu dire que Eddie Komboïgo n’est pas le représentant légal du CDP, donc il ne peut pas agir au nom du CDP et que son action est irrecevable.
Le juge estime-t-il que ce nous considérons comme trouble manifestement illicite causé par l’action de Achille Tapsoba ne l’est pas ? C’est une question qui mérite d’être posée. En tout état de cause, la décision du juge est susceptible d’appel et nous aviserons en conséquence.
Propos recueillis par Joachim Vokouma
Kaceto.net
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