Economie

Fiscalité des coopératives agricoles : Désorientée, la confédération paysanne du Faso veut y voir plus clair

La Confédération paysanne du Faso (CPF), en collaboration avec l’association « Agriculteurs français et développement international » (AFDI), organise les 14 et 15 novembre 2022, à Ouagadougou, un atelier de réflexion sur la fiscalité des coopératives agricoles au Burkina. L’objectif final est de produire une note argumentaire pour mener le plaidoyer en faveur de la mise en place d’une fiscalité adaptée aux coopératives agricoles.

5% de retenue à la source pour les personnes justifiant d’une immatriculation à l’identifiant financier unique (IFU) et 25% pour celles qui n’en disposent pas, 18% de taxe sur la valeur ajoutée, déclaration douanière, impôt unique sur les traitements et salaires, impôt sur le revenu foncier, bénéfice industriel et commercial, certificat d’origine, etc. Voici autant de taxes que payent les organisations paysannes de production et de commercialisation lorsqu’elles obtiennent des marchés publics. Cette panoplie de taxes n’est pas souvent bien comprise des acteurs.

Léon Zongo, coordonnateur national du projet « Paysans engagés dans l’évaluation des politiques sectorielles (PEPS) »

S’informer, comprendre pour mieux plaider

D’où l’organisation d’un atelier de réflexion en vue de renforcer le niveau de compréhension des organisations paysannes en matière de fiscalité des coopératives agricoles au Burkina Faso. Selon le président du conseil d’administration de la Confédération paysanne du Faso, Bassiaka Dao, l’objectif à terme est de mener un plaidoyer pour la suppression ou l’allégement de certaines taxes et prélèvements.

Une vue des participants lors des travaux

« Ça nous embête »

« La fiscalité est un problème récurrent sur lequel les paysans n’ont jamais réfléchi. À chaque fois, on se retrouve pris au piège. Ça nous embête. Chacun dans cette salle a une expérience sur la question. Nous, nous avons livré du maïs au mois de mai et c’est fin octobre qu’on nous a payé. Et sur 500 tonnes, on nous a prélevé 750 000 F CFA en nous disant que ce sont les frais de fonctionnement… Les paysans ne comprennent pas quand on dit de faire une retenue de 5% à la source. Ils ne comprennent pas quand on dit qu’il faut verser 3% du montant global pour l’enregistrement d’un marché ou quand on dit qu’il faut mettre des stickers sur les factures », a dressé Bassiaka Dao, président du conseil d’administration de la CPF.

Bassiaka Dao, président du conseil d’administration de la Confédération paysanne du Faso

« La confusion »

Selon le secrétaire général de la Fédération des éleveurs du Burkina (FEB), Hamadou Tamboura, les sociétés coopératives bénéficiaient de certains privilèges fiscaux prévus par la loi No 014/99/AN du 15 avril 1999 portant réglementation des sociétés coopératives et groupements au Burkina Faso. « Mais depuis l’acte uniforme de l’OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires) relative aux droits des sociétés coopératives, les agents des impôts veulent nous traiter comme si nous étions des entreprises privées. À la FEB, nous sommes une société coopérative de production et non de commercialisation. Nous ne comprenons pas cette confusion », s’offusque M. Tamboura.

Hamadou Tamboura, secrétaire général de la Fédération des éleveurs du Burkina

« Vous êtes un peu les pionniers »

Anne Souharse de « Agriculteurs français et développement international » (AFDI) s’est réjouie de la tenue de cet atelier au regard de la pertinence du sujet qui va survenir dans l’ensemble des pays membres de l’OHADA. « Vous êtes un peu les pionniers en termes d’organisation paysanne à dire qu’il y a un sujet de fiscalité qui n’est pas vraiment traité dans l’OHADA, mais que nous voulons traiter dans notre pays. Je suis sûre que cela va faire des émules avec d’autres organisations. C’est un sujet qui est complexe et qu’il est possible d’appréhender dans sa globalité. Mais, il faut se creuser la tête, parce que c’est un sujet sur lequel on a besoin d’expertise. », a-t-elle déclaré.

Anne Souharse, représentante de « Agriculteurs français et développement international » (AFDI)

Apprendre de l’expérience française

« La fiscalité peut mettre en difficulté un certain nombre de coopératives, elle peut aussi être dissuasive quant à l’organisation en coopérative alors que dans la dynamique de l’agriculture d’un pays, la formule “coopérative” est l’un des éléments importants pour faire progresser l’ensemble du monde agricole” », pense l’expert Francis Lamisse, ancien délégué général du Haut conseil de la Coopération agricole (HCCA). En tant qu’expert, il partagera l’expérience française sur la fiscalité des coopératives. Il s’entretiendra avec les participants notamment sur l’évolution historique de cette fiscalité, les différents impôts et taxes, les forces et faiblesses et l’argumentation pour l’exonération fiscale de ces coopératives.

Le projet « Paysans engagés dans l’évaluation des politiques sectorielles (PEPS) est financé à 90% par l’Union européenne

En rappel, l’atelier de réflexion entre dans le cadre de la mise en œuvre du projet « Paysans engagés dans l’évaluation des politiques sectorielles (PEPS) », cofinancé à 90% par l’Union européenne. Ce projet vise à contribuer au renforcement des capacités de coordination, de redevabilité et de dialogue des organisations paysannes burkinabè dans la gouvernance des politiques de développement rural pour la période 2020-2022.

Fredo Bassolé
Lefaso.net

Comments

comments

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page