Après l’appel à l’assassinat de Newton Barry et de tous ceux qui critiquent le gouvernement lancé la semaine dernière par Sinon Mohamed et ses camarades, le Front patriotique donne de la voix dans la déclaration ci-contre. Il condamne l’escalade de la violence diffusée sur les réseaux sociaux et rappelle que « les libertés d’expression, de presse, d’opinion et de pensée ont été chèrement acquises par nos devanciers, et ne sauraient être remises en cause par des groupuscules fanatiques ».
La crise sécuritaire que notre pays traverse depuis 2015 a généré une crise humanitaire sans précédent et une instabilité politique marquée par deux coups d’Etat successifs opérés en l’espace de huit (08) mois par le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR). Les deux premiers responsables de ce Mouvement ont prétexté la dégradation continue de la situation sécuritaire et la mauvaise gouvernance au sommet de l’Etat pour justifier leur coup de force.
Connaissant l’attachement de notre peuple aux principes et valeurs démocratiques, ils ont, tous les deux, prêté serment devant le Conseil constitutionnel, et juré sur leur honneur, entre autres, de faire respecter et de défendre la Constitution, la Charte de la transition et les lois, de tout mettre en œuvre pour garantir la justice à tous les habitants.
Or, depuis quelques temps, le vernis constitutionnel dont s’est revêtu le MPSR montre des signes de dégradation. En effet, nos droits fondamentaux garantis par notre Loi fondamentale, la Charte de la transition et les engagements internationaux du Burkina Faso sont de plus en plus menacés par des groupuscules fanatiques qui se réclament bruyamment du MPSR, sans que celui-ci ne fasse cesser leurs agissements qui menacent de ruiner notre vivre-ensemble déjà ébranlé par des groupes armés terroristes. L’intolérance de ces groupuscules qui manifestent dans nos villes et l’extrémisme des groupes armés terroristes qui écument nos campagnes traduisent de plus en plus une symétrie qui n’échappe à personne.
Certes, le Front patriotique se félicite de la récente condamnation de ces dérives par le porte-parole du Gouvernement. Mais il appelle, de toute urgence, les autorités du MPSR à faire plus, et à recadrer leurs soutiens, en les éduquant à observer le respect des lois de notre Faso qu’ils foulent aux pieds, à l’instar des groupes armés terroristes qui imposent leur férule aux populations locales.
Le Front patriotique, attaché à la recherche d’un pacte républicain victorieux contre le terrorisme, comme il a signifié dans sa Plateforme, reconnaît que la situation sécuritaire actuelle requiert des Burkinabè une union sacrée. Mais ce n’est pas en faisant taire les médias, les journalistes et les leaders d’opinion critiques qui s’expriment dans le respect des lois de la République que l’on y parviendra.
Les appels au meurtre contre des citoyens (le cas notamment du journaliste Newton Ahmed Barry), les discours haineux qui circulent dans les réseaux sociaux et l’impunité de leurs auteurs sont inacceptables dans un régime dont le premier responsable a juré de respecter et de faire respecter la Constitution. La Justice, gardienne de nos libertés individuelles et collectives (article 125 de la Constitution) doit demander des comptes et les autorités doivent lui donner les moyens de le faire.
A quelques jours de la commémoration de l’assassinat le 13 décembre 1998 du journaliste Norbert Zongo qui a donné sa vie pour la vérité des faits et pour que les médias et les journalistes puissent aujourd’hui exercer librement leur métier, les messages de haine, les menaces sur les hommes de médias et les appels au meurtre sont tout simplement écœurants. Les libertés d’expression, de presse, d’opinion et de pensée ont été chèrement acquises par nos devanciers, et ne sauraient être remises en cause par des groupuscules fanatiques qui en usent et abusent pour dénier à d’autres citoyens leurs droits fondamentaux.
Et la lutte contre l’insécurité ne saurait justifier la mollesse des autorités face à toutes ces dérives. Du reste, ce qui est en jeu dans cette lutte, c’est avant tout la sécurité de tous les individus et de toutes les communautés sans exclusive qui vivent sur notre territoire. Cette lutte contre l’insécurité ne saurait donc être menée efficacement en mettant en insécurité des individus paisibles ou des communautés.
Nous appelons donc l’Etat à prendre ses responsabilités pour garantir à tous les Burkinabè sans exclusive leurs droits fondamentaux, condition indispensable pour éviter à notre pays les affres de la division, de la haine, de l’intolérance et de l’obscurantisme outrageant.
Fait à Ouagadougou le 07 décembre 2022
Le Cordonnateur
Germain Bitiou NAMA