ANALYSE :
BURKINA FASO, A LA DECOUVERTE DE NOTRE PASSÉ COMMUN
WUROTÈDA IBRAHIMA SANOU, JOURNALISTE-AGENCIER ET ANALYSTE (AIB)
Ouagadougou, 17 déc. 2022 (AIB)-Suivez sur la WEB TV AIB, l’analyse historique du journaliste-agencier et analyste de l’AIB, Wurotèda Ibrahima Sanou sur la création de la colonie de la Haute-Volta, sa suppression, son rétablissement, sa décolonisation et son indépendance.
Face à l’impasse de notre présent commun et à l’incertitude de notre avenir commun, il y a nécessité pour nous de questionner notre passé commun.
Mesdames et messieurs, chers téléspectateurs de la WEB TV AIB, bienvenus à notre analyse hebdomadaire.
Le Burkina Faso a commémoré ce dimanche 11 décembre 2022, les 62 ans de son indépendance.
La célébration s’est déroulée dans la sobriété à la demande du président de la Transition, le capitaine Ibrahim TRAORÉ, au regard du contexte sécuritaire difficile du pays.
Un contexte sécuritaire qui nous interpelle tous en tant que Burkinabè et nous somme à intégrer dans nos esprits et dans notre vécu quotidien que le Burkina Faso est le fruit d’un consensus national de nos devanciers.
Le Burkina Faso, c’est la rencontre de plusieurs systèmes de gouvernance, certains centralisés avec un roi ou un émirat à la tête et d’autres, décentralisés au niveau village et famille.
Il s’agit d’un côté, les royaumes mossi et gourmantché ainsi que les émirats peuls et de l’autre côté, le pouvoir à la base des peuples du Grand Ouest : Bobo/Bwabas, Dagara/Lobi/Birifor/Gan, Sénoufos/Gouin/Toussian, Gourounsi/Lyélés et autres.
C’est donc cette mosaïque de peuples qui vivait librement et indépendamment, chacun sur son espace depuis de nombreuses décennies que le colonisateur français est venu conquérir à la fin du 19è siècle avec de gros moyens et beaucoup de difficultés.
Une fois la conquête terminée, le colonisateur va regrouper ces populations au gré de ses intérêts.
Les futurs voltaïques sont dans un premier temps, intégrés dans la « colonie du Haut-Sénégal et Niger » créée par le décret du 18 octobre 1904.
Les populations au pouvoir à la base refusent de se soumettre. Ils organisent une grande insurrection populaire entre 1915 et 1916 appelée guerre du Bani-Volta, contre le colon français, englué dans la première guerre mondiale.
Après la guerre mondiale, pour mieux contrôler ces peuples insoumis, le colon français crée par décret du 1er mars 1919, la colonie de la Haute-Volta avec pour chef-lieu Ouagadougou.
13 ans après sa création, la colonie de la Haute-Volta est supprimée par décret du 5 septembre 1932 pour des raisons économiques et financières.
Le territoire est répartit entre les colonies du Niger, du Soudan français et de la Côte-d’Ivoire.
La suppression de la colonie n’est pas du goût de la chefferie notamment du Mogho Naba Koom II car Ouagadougou perd son statut de chef-lieu de la colonie et le roi mossi perd son influence.
Aussi, en collaboration avec les autres rois et émirs, le Mogho Naba Koom II va se battre de toutes ses forces pour la reconstitution de la colonie de la Haute-Volta.
Le 25 janvier 1934, le train parti d’Abidjan arrive pour la première fois à Bobo-Dioulasso. Bobo-Dioulasso redevient un centre économique important et incontournable de l’Afrique de l’Ouest.
Par décret du 13 juillet 1937, Le colon français divise la colonie de la Côte d’Ivoire en deux régions administratives qui sont la Basse Côte d’Ivoire qui représentait l’actuel Côte d’Ivoire et la Haute Côte d’Ivoire qui représentait l’actuel Burkina Faso.
Au cours de la même année 1937, un jeune enseignant voltaïque de 28 ans, Daniel Ouézzin COULIBALY crée au Sénégal, le premier syndicat des enseignants de l’Afrique occidentale française avec son collègue enseignant originaire du Mali Modibo Kéita, futur premier président du Mali en 1960.
L’année suivante en 1938, Daniel Ouézzin COULIBALY instaure à Rufisque, au Sénégal, une rencontre hebdomadaire des intellectuels africains pour échanger sur l’égalité des droits de l’homme dans l’espace africain.
Au cours de l’année 1939, la deuxième guerre mondiale éclate en Europe et de nombreux jeunes africains sont enrôlés pour aller combattre pour la France et ses alliés.
Le 12 mars 1942, le Mogho Naba Koom II meurt à Ouagadougou. Son fils Mogho Naba Sagha II, devient nouveau roi de Ouagadougou et poursuit la lutte pour la reconstruction de la Haute-Volta.
En Février 1943, Daniel Ouézzin COULIBALY devient secrétaire général de l’Amicale des anciens élèves de l’école William-Ponty.
Dans son programme, il exige l’égalité entre Africains et Européens et exige aussi, l’ouverture aux Africains, des postes de cadres supérieurs et généraux de la fonction publique par voie de concours professionnels.
Nous arrivons à l’année 1945, c’est la fin de la seconde guerre mondiale et le début de la vie politique dans toute l’Afrique noire.
Pour récompenser les africains pour avoir participé à ses côtés à la seconde guerre mondiale, la France décide de les associer à la gestion de leur territoire. Un siège de député est donc offert à chaque colonie française.
La Haute Volta et la Côte d’Ivoire qui forment une même colonie sont invités à élire un seul député pour les représenter à la future Assemblée constituante française.
Cette élection met en scène deux acteurs politiques voltaïques, à la culture, à la formation et à la conception différente.
L’un est un monarque autrement absolu dans son royaume. Il rêve d’une Haute-Volta reconstitué et monarchique dont il serait le chef.
L’autre est un brillant intellectuel et syndicaliste hors pair. Il rêve d’une Haute-Volta reconstituée ou non mais républicaine et libérée avec toute l’Afrique noire, de la colonisation, de l’exploitation et de l’injustice.
L’un est le Mogho Naba Sagha II, roi de Ouagadougou et l’autre Daniel Ouézzin COULIBALY, fondateur du premier syndicat des enseignants de l’Afrique occidentale française.
Ces deux acteurs influents de la Haute-Volta soutiennent chacun un candidat.
Le Mogho Naba Sagha II soutient la candidature de son ministre Tenga OUEDRAOGO dit Baloum Naaba âge de 70 ans.
Daniel Ouézzin COULIBALY soutient la candidature d’un jeune médecin et planteur ivoirien Félix Houphouët-BOIGNY âge de 40 ans.
Le premier tour de l’élection se déroule le 21 octobre 1945. Sur 14 candidats en liste, Félix Houphouët-BOIGNY et le Baloum Naaba Tenga OUEDRAOGO arrivent en tête et s’affrontent pour un second tour.
Le second tour se déroule le 4 Novembre 1945. Le candidat du Mogho Naba Sagha II est battu.
Félix Houphouët-BOIGNY remporte le poste de député grâce à l’action déterminante de Daniel Ouézzin COULIBALY.
Félix Houphouët-BOIGNY devient ainsi le premier député de la Haute et de la Basse Côte d’Ivoire, à la première Assemblée constituante française pour un mandat de 7 mois.
Cette élection a été un tournant décisif dans l’histoire de la décolonisation de notre territoire jusqu’à son indépendance.
A l’Assemblée nationale française, à Paris, le député Félix Houphouët-BOIGNY comme convenu avec Daniel Ouézzin COULIBALY, propose le 5 avril 1946, la loi pour la suppression du travail forcé.
La loi Houphouët-BOIGNY pour la suppression du travail forcé est votée grâce au soutien des députés du Parti communiste Français (PCF). La loi est promulguée le 11 avril 1946.
Partout en Afrique noire et particulièrement en Haute-Volta, c’est le soulagement, l’explosion de joie des populations qui retrouvent une certaine liberté.
En novembre 1946, au cours d’une nouvelle élection législative, le colonisateur français octroie cette fois, trois sièges de députés à la colonie de la Haute et de la Basse Côte d’Ivoire.
Daniel Ouézzin COULIBALY, Félix Houphouët-BOIGNY et Mogho Naba Sagha II se concertent à Ouagadougou pour présenter une liste unique appelée «liste d’union sacrée».
La liste comprend trois candidats : Félix Houphouët-BOIGNY (représentant la Basse Côte d’Ivoire), Daniel Ouézzin COULIBALY (représentant l’Ouest de la Haute Côte d’Ivoire) et Philippe Zinda KABORE (représentant les régions mossés).
Le 10 Novembre 1946, la liste est brillamment élue, elle remporte les trois sièges.
Le 20 Février 1947, le député Philippe Zinda KABORE adresse des lettres au ministre de la France d’Outre-mer pour demander le rétablissement de la Haute-Volta.
Malheureusement, le jeune pharmacien député Philippe Zinda KABORE meurt le 25 Mai 1947 à Abidjan alors qu’il se préparait à prendre l’avion pour Paris, à l’âge de 27 ans.
Au parlement français Daniel Ouézzin COULIBALY est membre de deux groupes parlementaires. Le premier groupe est chargé d’étudier les questions relatives à l’enseignement et à la jeunesse.
Le second groupe est chargé d’étudier les questions relatives à la Défense nationale et au régime tirailleur.
A partir de l’année 1946, l’on assiste à la création de mouvements et partis politiques partout en Afrique noire.
En Haute-Volta, pendant 8 ans de 1946 à 1954, deux partis politiques vont s’affronter sans relâche jusqu’à la disparition de l’un.
Il s’agit du Rassemblement démocratique africain (RDA) et de l’Union Voltaïque (UV).
Derrière ces deux partis, on retrouve les deux hommes qui se sont déjà affrontés, l’enseignant et syndicaliste Daniel Ouézzin COULIBALY et le chef traditionnel Mogho Naba Sagha II.
Le Rassemblement démocratique africain (RDA) est créé à Bamako au Soudan français (actuel Mali), au cours d’un congrès tenu du 18 au 21 octobre 1946, en présence d’environs 800 délégués.
Félix Houphouët-BOIGNY est élu président du mouvement et Daniel Ouézzin COULIBALY est le secrétaire politique chargé d’assurer la coordination des activités du RDA.
Daniel Ouézzin COULIBALY sillonne toute l’Afrique occidentale Française (AOF) pour installer les sections du mouvement. Il est au Soudan (Mali), en Guinée, au Niger, au Dahomey (Bénin), au Cameroun, au Sénégal, au Congo, etc.
En Haute-Volta, il installe à partir de mai 1946, les sous sections du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) dont il est l’un des pères fondateur.
Le Mogho Naba Sagha II lui crée en juin 1946, l’Union Voltaïque (UV) sur les centres de son association Union de défense des intérêts de la Haute-Volta (UDIHV).
Dans ce parti monarchiste, adhère, un jeune enseignant Nazi BONI, fortement engagé pour la reconstitution de la Haute-Volta.
Plusieurs jeunes intellectuels monarchistes adhèrent à l’Union Voltaïque. On retrouve Joseph Issoufou CONOMBO, Christophe KALENZAGA, Henri GUISSOU, Bernard Tibo OUEDRAOGO et Français BOUDA.
Pendant 8 ans, l’Union Voltaïque (UV) sera soutenu par l’administration coloniale.
Pendant 8 ans, le Rassemblement démocratique africain (RDA) sera combattu par l’administration coloniale.
Pour affaiblir le RDA qui était fortement implanté dans le Grand Ouest de la Haute-Volta grâce à Daniel Ouézzin COULIBALY, le colon français décide du rétablissement de la colonie.
Le 4 Septembre 1947, un projet de loi déposé par le gouvernement français à l’Assemblée nationale rétablit le territoire de la Haute-Volta.
Avec le rétablissement de la colonie, le député Daniel Ouezzin COULIBALY transforme le 20 Décembre 1947, la sous-section du PDCI en Parti démocratique voltaïque (PDV), section du RDA au cours d’un Congrès du RDA à Bobo-Dioulasso.
Le rétablissement de la colonie permet la création d’un conseil général en Haute-Volta. Le conseil général est l’ancêtre de l’Assemblée nationale.
En 1952, à la demande du président du Conseil général de la Haute-Volta, Joseph OUEDRAOGO, le gouverneur de la colonie transfère les directions des services administratifs de Bobo-Dioulasso à Ouagadougou.
Cette décision va entrainer le départ de nombreux fonctionnaires de la ville et la chute de l’économie de Bobo-Dioulasso au profit de Ouagadougou.
Le député Nazi BONI proteste vigoureusement contre cette mesure qui vise, selon lui à tuer économiquement Bobo-Dioulasso mais personne ne l’écoute.
Le 8 juillet 1953, Nazi BONI se rend au ministère des Colonies à Paris en France pour proposer au gouvernement français, la création d’un 9è territoire colonial de l’AOF qui aura pour chef-lieu Bobo-Dioulasso. Après plusieurs tractations la requête n’aboutira pas.
Nazi BONI va donc démissionner du parti monarchiste l’Union Voltaïque, pour créer en 1954 avec Diongolo TRAORÉ, un nouveau parti politique appelé Mouvement populaire d’évolution africaine (MPEA) qui deviendra Mouvement populaire africain (MPA).
Avec le départ de Nazi BONI, l’Union Voltaïque va se désintégrer et disparaitre pour donner naissance la même année, au Parti Social d’Education des Masses Africaines (PSEMA) dirigé par Joseph CONOMBO.
En juillet 1956, un nouveau parti politique voit le jour dans le nord. Le Mouvement Démocratique Voltaïque (MDV), animé par des hommes comme Michel DORANGE et Gérard Kango OUEDRAOGO.
L’année 1956 est aussi un tournant dans les colonies françaises d’Afriques avec l’adoption de la loi-cadre Defferre du 23 juin 1956.
Cette loi autorise pour la première fois, la mise en place dans les colonies africaines, des Conseils de gouvernement élus au suffrage universel et dotés d’un pouvoir exécutif local autonome vis-à-vis de la métropole.
Au moment où ces élections sont annoncées, la Haute-Volta, n’a pas de parti politique d’envergure nationale.
Daniel Ouézzin COULIBALY et Joseph CONOMBO fusionnent leurs deux partis le 23 septembre 1956 pour former un parti national appelé le Parti démocratique unifié (PDU).
Le Parti démocratique unifié (PDU) remporte les élections du 31 mars 1957 en Haute-Volta avec 37 sièges sur 70. Le MDV obtient 26 sièges, le MPA obtient 5 sièges et 2 pour les indépendants.
Le PDU et le MDV se concertent et forment ensemble le 17 mai 1957 par consensus le premier gouvernement de l’histoire de la Haute-Volta présidé par Daniel Ouézzin COULIBALY, le plus important homme politique voltaïque de l’époque.
Dans son premier discours, le vice-président du Conseil de gouvernement de la Haute-Volta Daniel Ouézzin COULIBALY affirme :
« Notre réussite dépend de notre étroite collaboration et du constant souci de transmettre à ceux qui vont nous suivre non pas un bilan de faillite mais un collectif qui laissera apparaître que, si faillite il devait y avoir, elle adviendrait contre la volonté de tous ».
Dans ce premier gouvernement, Maurice YAMEOGO est ministre de l’Economie agricole pour le compte du Mouvement Démocratique Voltaïque (MDV).
Pour le compte du même parti, Yalgado OUEDRAOGO est élu président de l’Assemblée Territoriale le 15 mai 1957 mais trouvera la mort le 21 juillet 1957 au cours d’un accident de la route.
Pendant que le premier gouvernement voltaïque fait ses premiers pas, le Mogho Naba Sagha II qui avait rêvé de monarchie meurt le 12 novembre 1957. Son fils Mogho Naba Kougri lui succède le 28 novembre 1957.
En décembre de la même année, le consensus qui a prévalu lors de la formation du gouvernement va voler en éclat. Les querelles politiques reprennent.
Le Mouvement Démocratique Voltaïque (MDV) de Gérard Kango OUEDRAOGO et le Parti Social d’Education des Masses Africaines (PSEMA) dirigé par Joseph CONOMBO vont quitter la coalition avec le RDA de Daniel Ouézzin COULIBALY.
Ces derniers vont constituer à l’Assemblée territoriale, le groupe de la solidarité voltaïque avec le Mouvement populaire africain (MPA) de Nazi BONI.
Le groupe réussit à faire élire le 13 décembre 1957, son secrétaire général Nazi BONI comme président de l’Assemblée territoriale en remplacement de Yalgado OUEDRAOGO décédé.
Le groupe de la solidarité voltaïque exige le 16 décembre 1957, la démission du président Daniel Ouézzin COULIBALY et son gouvernement en s’appuyant sur la loi cadre Defferre.
Mis en minorité, le président Daniel Ouézzin COULIBALY s’appuie également sur la même loi et affirme qu’elle ne lui fait pas obligation de démissionner.
La Haute-Volta se retrouve donc en crise quelques mois seulement après la formation de son premier gouvernement.
La crise prend fin le 12 janvier 1958 avec le ralliement de Maurice YAMEOGO au président Daniel Ouézzin COULIBALY, avec son cousin Denis YAMEOGO et Nader ATTIE.
La nouvelle majorité obtenue par le RDA permet au président Daniel Ouézzin COULIBALY de former le 6 février 1958, un nouveau conseil de gouvernement entièrement composé de membres du RDA.
Dans ce nouveau gouvernement Maurice YAMEOGO, le ministre de l’Economie agricole devient, ministre de l’Intérieur et N° 2 du régime.
Le mardi 20 mai 1958, le président Daniel Ouézzin COULIBALY prononce à Ouagadougou, son discours programme devant les députés voltaïques.
« Dans un pays comme le nôtre situé à la limite de la zone sahélienne, le premier problème à résoudre est celui de l’eau. Si l’eau jaillit, la vie apparaît ».
Ce discours programme reste une boussole pour le Burkina Faso d’aujourd’hui. Les acteurs politiques et les jeunes doivent s’en inspirer.
Daniel Ouézzin COULIBALY était un travailleur infatigable dont le cabinet de travail, tout comme sa villa d’habitation, restaient ouverts de jour comme de nuit.
Le président Daniel Ouézzin COULIBALY lance les travaux de construction de l’hôpital de Ouagadougou.
Il lance les travaux de l’édification de la Radiodiffusion de la Haute-Volta. Il lance les travaux du grand marché de Ouagadougou.
Il lance les démarches auprès du Bureau minier de la France d’Outre-Mer en vue des études sur le terrain voltaïque.
Le président Daniel Ouézzin COULIBALY invite les députés à encourager dans leurs régions respectives la culture intensive du coton et du riz.
Le président Daniel Ouézzin COULIBALY annonce le bitumage de la route de Mopti, Nouna et Bobo, appelée route du poisson et de la route avec le Ghana.
Le gouvernement du président Daniel Ouézzin COULIBALY adopte un plan échelonné aux termes duquel la proportion d’enfants scolarisés en Haute-Volta, passerait de 6,6% en 1957 à 10% à la rentrée d’octobre 1961.
Une usine de la brasserie est installée à Bobo-Dioulasso, une seconde est prévue à Ouagadougou.
Malheureusement, le président Daniel Ouézzin COULIBALY meurt le dimanche 7 septembre 1958 à 7 heures 30 minutes à l’hôpital saint Antoine de Paris, d’un mal non déterminé jusque ce jour.
Peu avant son décès, il remet un message au président de la section voltaïque du RDA Christophe KALENZAGA, dans lequel il affirme :
« En Haute-Volta, je me savais bien malade, mais il me fallait choisir entre l’installation du parti et ma santé. Je suis tombé d’épuisement ».
Le président Daniel Ouézzin COULIBALY reçoit des funérailles nationales à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso les 14 et 15 Septembre 1958.
Plusieurs personnalités africaines participent aux funérailles : les présidents Houphouët BOIGNY (Côte d’Ivoire), Modibo KEÏTA (Mali), Hamani DIORI (Niger), Léon M’BA (Gabon).
Le président Sékou TOURÉ (Guinée) est représenté. Il décrète une journée de deuil national en Guinée pour le président Daniel Ouézzin COULIBALY.
Deux semaines après ces funérailles, les Voltaïques approuvent le 28 septembre 1958 à une écrasante majorité, la constitution de la communauté franco-africaine.
Le 17 octobre 1958, l’Assemblée territoriale est convoquée pour désigner le successeur du président Daniel Ouézzin COULIBALY mais à la surprise de tous, un acteur inattendu entre en scène.
Ce jour-là, le souverain des mossi Moro Naba Kougri se présente devant le palais de l’Assemblée territoriale avec 3000 de ses partisans armés d’arcs, de flèches et de vieux fusils, pour faire pression sur les députés voltaïques pour l’instauration d’une monarchie constitutionnelle.
Il bénéficierait du soutien du colonel CHEVREAU, commandant de l’armée française en Haute-Volta qui aurait donné l’ordre à son régiment de rester en caserne.
A la demande du président intérimaire Maurice YAMEOGO ; la Police coloniale et la Garde républicaine interviennent, tirent en l’air et dispersent la foule et les partisans du souverain mossi.
La tentative de coup d’état du souverain des mossis rapproche la classe politique (opposition et majorité) et le 20 octobre 1958, les parlementaires s’entendent pour confirmer Maurice YAMEOGO, à la tête du gouvernement.
Le président Maurice YAMEOGO forme le 10 décembre 1958, un gouvernement d’union et proclame la République le lendemain, 11 décembre 1958.
L’Assemblée territoriale devient Assemblée législative et constituante et opte pour la fédération du Mali mais dans le cadre de la communauté.
Le président Maurice YAMEOGO se dit favorable mais fini par des calculs politiques à abandonner cette voie pour le conseil de l’Entente prôné par le président Félix Houphouët-BOIGNY.
Sans une carrure importante et une légitimité populaire, Maurice YAMEOGO va utiliser l’appareil de l’Etat entre ses mains pour réprimer ses adversaires politiques.
Le 29 août 1959, Maurice YAMEOGO dissout le conseil municipal de Ouagadougou dirigé par Joseph Ouédraogo, opposé à sa politique. Il confie le conseil municipal à Joseph CONOMBO, ex-opposant qui s’est rallié à lui.
Le président Maurice YAMEOGO fait interner le 2 juillet 1960, à Gorom-Gorom, plusieurs opposants : Joseph OUEDRAOGO, Diongolo TRAORÉ, Edouard OUEDRAOGO, Gabriel OUEDRAOGO et Paul NIKIEMA.
Face à la répression du président Maurice YAMEOGO, le député Gérard Kango OUEDRAOGO se rallie également à lui, à partir de septembre 1959 signant la mort de son parti le Mouvement de regroupement voltaïque (MRV).
Grâce à ce ralliement, Gérard Kango OUEDRAOGO sera le premier ambassadeur de la Haute-Volta en Grande-Bretagne de l’indépendance en 1960 à la chute du président Maurice YAMEOGO en 1966.
Nazi BONI refuse de se rallier à Maurice YAMEOGO, il part en exil d’abord au Mali chez le président Modibo KEÏTA, ensuite au Sénégal chez le président Léopold Sédar SENGHOR.
A la veille de l’indépendance, à 20 heures 15 mn, Nazi BONI s’adresse à Bamako, à travers Radio Mali, au peuple voltaïque nouvellement indépendant.
« L’indépendance imposée au gouvernement par le peuple (et) par l’opposition et littéralement offerte par la France sera proclamée par ceux qui en sont les ennemis les plus acharnés qui, aujourd’hui comme demain, sont prêts à la saboter.
C’est le paradoxe de la vie. C’est la comédie humaine. Mais, quelle que soit la forme revêtue par notre accession à la souveraineté internationale, celle-ci constitue un fait positif dont nous devons nous réjouir… », affirme Nazi BONI.
Le 5 août 1960, le président Maurice YAMEOGO proclame l’indépendance dans un pays où toute forme d’opposition est muselée.
« Aujourd’hui, 5 août 1960, à zéro heure, au nom du droit naturel de l’homme à la liberté, à l’égalité, à la fraternité, je proclame solennellement l’indépendance de la République de Haute-Volta ».
C’est dans un pays où toute forme d’opposition a été musélé que le président Maurice YAMEOGO proclame l’indépendance.
Ouagadougou, le samedi 17 décembre 2022
WUROTÈDA Ibrahima SANOU
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