2022, aura été l’année d’une diplomatie burkinabè audacieuse et ambitieuse. En témoigne notamment le départ sur ordre du gouvernement, de la coordonnatrice résidente du système des nations unies, Barbara Manzi. Mais aussi la visite en Russie, du Premier ministre Me Kyelem de Tambèla.
Dans sa quête de solutions efficaces à la crise sécuritaire qui bouleverse tous les domaines de la société, le Burkina Faso s’est résolument tourné vers une diversification de ses partenaires et surtout vers un partenariat gagnant-gagnant. Dans cette dynamique, le pays fait preuve de rigueur et de fermeté.
Expulsion de Barbara Manzi, coordonnatrice de l’ONU au Burkina
C’est ainsi qu’a été sommée Barbara Manzi, coordonnatrice résidente du système des nations unies, de quitter immédiatement le territoire. Cette décision du gouvernement publiée dans un communiqué en date du vendredi 23 décembre 2022, déclarait la diplomate onusienne « persona non grata ». Cela, après avoir refusé d’apporter la preuve des raisons qui la poussaient à vouloir évacuer les familles des diplomates de l’ONU, domiciliées à Ouagadougou.
Le ministre des affaires étrangères, Oliva Rouamba donne les motifs de l’expulsion de Barbara Manzi
Même si le secrétaire général de l’ONU a dit garder sa confiance en madame Manzi tout en regrettant l’action des autorités burkinabè, le gouvernement est resté campé sur sa position. Cette expulsion est intervenue quelques jours après celle de deux Français qui travaillaient pour une société burkinabè. Ils étaient soupçonnés d’être des espions.
La coopération franco-burkinabè décriée
Depuis maintenant quelques années, plusieurs voix se sont élevées pour décrier la coopération avec la France, en l’occurrence dans le secteur de la lutte antiterroriste. De nombreux mouvements et manifestations ont vu le jour afin de dénoncer les insuffisances de la coopération franco-burkinabè. Ayant le sentiment de ne pas se faire comprendre, certains manifestants sont passés par des actes de vandalisme en attaquant des structures françaises.
L’Institut français de Ouagadougou vandalisé par des manifestants le 1er octobre 2022
Parmi les organismes pris pour cibles, l’on a enregistré le saccage des instituts français de Ouagadougou et Bobo-Dioulasso. Si l’ambassade de France non plus n’a pas été épargnée, les dégâts ont été négligeables grâce à l’intervention des forces de l’ordre.
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En dépit de ces actes perpétrés à l’encontre de la France, l’ambassadeur Luc Hallade a annoncé qu’il n’avait pas l’intention de quitter le Burkina Faso. Cette déclaration a été faite à l’issue d’une audience avec le Premier ministre, Me Apollinaire Kyelem de Tambèla. « On a intérêt à ce que le Burkina reste débout », a-t-il indiqué. Luc Hallade disait avoir eu des discussions franches avec le Premier ministre sur les nouvelles orientations de coopération militaire qui lie les deux États.
La volonté manifeste d’aller vers des partenariats fructueux
Face donc à ces multiples interpellations sur la nécessité de réviser les partenariats en général, et celui d’avec la France en particulier, le gouvernement de la transition scrute d’autres horizons. Ainsi, plusieurs initiatives de coopération ont été menées. L’on se souvient de la récente visite du Premier ministre Me Apollinaire Kyelem de Tambèla en Russie. C’était le 7 décembre 2022. Lors de ce déplacement, le chef du gouvernement burkinabè a accordé une interview à la correspondante en France de RT (Russia Today), Vera Gaufman. L’essentiel de leurs échanges portait sur la coopération entre le Burkina Faso et la Russie.
« Nous aimerions que la Russie prenne la place qui lui revient en tant que grande nation », Me Kyelem Apollinaire de Tambèla, chef du gouvernement burkinabè
« Nous avons rencontré pas mal de personnalités dans les ministères et les services. Ils sont ouverts. Ce que nous aimerions, c’est renforcer la coopération dans tous les domaines possibles entre la Russie et le Burkina Faso », avait-il déclaré.
Bien avant la visite de Me Kyelem de Tambèla, l’actuel président de la transition, Ibrahim Traoré, s’était rendu au Mali, le 2 novembre 2022. L’un des objectifs visés est de renforcer la coopération entre les deux États dans la lutte contre le terrorisme. Avant le capitaine Ibrahim Traoré, Bamako, la capitale malienne avait reçu la visite du lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, président de la transition sous le MPSR1, le 3 septembre.
Les autorités maliennes, elles, ont répondu favorablement à la proposition du gouvernement burkinabè. Elles ont par conséquent, effectué le déplacement sur Ouagadougou le 11 novembre 2022 pour confirmer leur accord. La délégation était conduite par le ministre de la défense et des anciens combattants du Mali, le colonel Sadio Camara.
Salutations des deux premières autorités burkinabè et malienne, lors de la visite du capitaine Ibrahim Traoré, président de la transition burkinabè (à droite) à Bamako
Alors que les relations se bonifient avec le Mali, celles entre le Burkina Faso et le Ghana ont tendance à se dégrader. En effet, Boniface Gambila Adagbila, ambassadeur du Ghana au Burkina Faso a été convoqué d’urgence au ministère des Affaires étrangères le vendredi 16 décembre. Cela pour des explications sur les allégations de son chef d’État, Nana Akufo-Addo qui affirmait que le Burkina Faso a passé un accord avec le groupe russe de sécurité privée Wagner. Dans le même temps, le général Pingrenoma Zagré, ambassadeur du Burkina au Ghana, est été rappelé pour « consultation ».
L’année 2022, rien qu’à travers ces faits, aura été celle d’une diplomatie burkinabé marquée de décisions inédites dans le pays, à l’instar de la suspension de la Radio France internationale (RFI). Que réserve l’année 2023 sur le plan diplomatique ? En tout d’état de cause les initiatives déjà entreprises sont annonciateurs de grandes mutations dans la collaboration du Burkina Faso avec ses partenaires.
Hamed NANEMA Lefaso.net
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