En dépit de la combattivité des forces de défense et de sécurité et des VDP déployés sur les différents théâtres d’opérations, les groupes terroristes continuent de s’en prendre avec une rare violence aux populations civiles désarmées.
Pour le mouvement SENS, si la victoire contre ces barbares ne fait pas l’ombre d’un doute, mais elle devra toutefois passer par l’unité des tous les Burkinabè, toutes couches sociales confondues.
Chers compatriotes, chers frères et sœurs,
La deuxième quinzaine du mois de février 2023 a été marquée par de multiples attaques qui ont visé nos FDS et VDP faisant plusieurs morts et de nombreux blessés dans des circonstances non encore élucidées. En ces moments de douleur, j’ai une pensée pieuse pour tous les FDS et VDP morts pour la patrie ainsi que pour toutes les autres victimes directes ou indirectes du terrorisme dans notre pays.
En mon nom personnel et au nom du Mouvement SENS :
je condamne avec la dernière énergie ces attaques barbares que d’ignobles individus font subir à la population civile, aux FDS et aux VDP ;
j’appelle tous ceux de nos compatriotes qui se sont égarés dans les rangs des terroristes à revenir à la raison et à déposer les armes ;
j’exprime ma reconnaissance et ma solidarité à toutes celles et à tous ceux qui, au risque de leur vie, se tiennent debout au quotidien pour que notre pays ne tombe pas.
Chers compatriotes, chers frères et sœurs,
Le Burkina Faso est désormais à la croisée des chemins. Nous entrons chaque jour dans une situation de plus en plus critique qui met à mal l’existence même de notre État.
Mais le plus grand danger auquel le terrorisme nous expose c’est la menace qu’elle fait peser sur notre vivre ensemble, car si la victoire est certaine, il est tout aussi certain qu’aucune victoire pérenne ne peut se gagner dans la division.
C’est pourquoi, nous devons prendre conscience, ensemble, que le combat pour la reconquête de nos territoires ne saurait justifier ou excuser, ni les graves exactions commises contre des populations civiles non armées, particulièrement, celles appartenant à la communauté peulh, ni les appels au meurtre de certains leaders d’opinion.
Cette crise sécuritaire actuelle pose à notre pays d’énormes défis aux plans humain, humanitaire, social, culturel, économique et politique. Ces défis ne sont pas hors de notre portée.
Nous pouvons les relever si nous demeurons unis et déterminés et si nous redonnons tout son sens à l’intelligence collective de notre peuple.
Le Burkina Faso regorge de femmes et d’hommes capables d’apporter les transformations sociétales nécessaires pour nous remettre en état de marche vers l’horizon radieux du bonheur collectif.
C’est une conviction forte forgée à partir de ma connaissance de la qualité des ressources humaines de notre pays et de l’immensité des ressorts socioculturels dont il regorge.
Pour autant, je suis particulièrement inquiet et préoccupé par les derniers événements en cours dans notre société. C’est la raison pour laquelle je m’adresse à vous.
Je suis en effet très préoccupé par les attaques publiques contre les autorités coutumières et religieuses, ciment de la cohésion sociale et de notre vivre ensemble.
Je suis très inquiet de devoir vivre dans un pays où la stigmatisation des communautés n’est plus un sujet tabou ; un pays où l’on peut, publiquement et à visage découvert, appeler au meurtre d’autres compatriotes sur la base de leur opinion et/ou de leur ethnie.
Je suis davantage préoccupé d’entendre aussi bien des autorités au sommet de l’État que des politiques et leaders d’opinion, dénier cette stigmatisation ou tenter de la justifier alors que le risque d’implosion habite désormais au cœur de notre cher pays.
Je suis d’autant plus préoccupé et inquiet que je suis Africain et Noir.
En effet, Africain et Noir, je sais les atrocités vécues par mon peuple, toutes les formes de stigmatisations et discriminations dont il a été victime depuis les colonisations en passant par les traites négrières et l’esclavage.
Le seul tort du peuple noir a été d’avoir la peau noire et de ne pas ressembler aux dominants de l’heure.
En tant que Noirs, nous vivons aujourd’hui encore d’une manière ou d’une autre, les horreurs de la stigmatisation.
Nous voyons chaque jour, le traitement différencié réservé aux migrants au Maghreb, en Europe et dans le monde, selon qu’ils ont la peau noire ou blanche. Et que dire des propos honteux et haineux du Président tunisien Kaïs Saïed ?
Avec le souvenir d’un tel passé, toujours vivace aujourd’hui car renforcé par l’actualité de discriminations quasi-systématiques vis-à-vis des Africains et des Noirs en général, j’ai du mal à comprendre et à accepter que nous puissions reproduire de tels comportements contre nous-mêmes, contre les nôtres, contre nos propres frères et sœurs.
Chers compatriotes,
Cette fois la coupe est pleine. Nous ne pouvons plus faire comme s’il ne se passait rien, comme si nous ne savions pas.
Tous les Burkinabè, à commencer par le Président de la Transition, doivent s’engager à appeler à l’union de tous les fils et filles de notre pays dans la lutte en cours, et à mettre fin à toutes les formes d’exactions, à cette automutilation, à cette haine de soi.
Nous devons tous condamner publiquement et à visage découvert, cette dérive identitaire qui est aux antipodes de notre identité collective en tant que Nation et en tant que Peuple.
Pour ma part :
je condamne fermement et sans réserve, la stigmatisation des communautés et particulièrement celle de la communauté peulh ;
je condamne fermement et sans réserve l’immixtion du fait religieux dans la politique ;
Je condamne fermement et sans réserve tout comportement de défiance à l’égard de nos autorités coutumières et religieuses, véritable ciment de la cohésion sociale ;
J’appelle tous les leaders sociaux, les partis politiques et les OSC à faire de la lutte contre la stigmatisation des communautés une composante essentielle de leur action en vue d’assurer la cohésion sociale, de contribuer à la lutte contre le terrorisme et de garantir un avenir de paix à toutes et tous ;
j’appelle les leaders religieux et coutumiers à s’impliquer toujours d’avantage dans la recherche de la cohésion entre nos différentes communautés ;
J’exhorte enfin le gouvernement à recadrer la lutte contre le terrorisme afin que la recherche justifiée de la victoire ne mette pas à mal notre vivre ensemble.
Comme le disait Martin Luther King, « nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous mourrons ensemble comme des idiots ».
Nourrissons-nous de cette sagesse pour combattre le terrorisme et reconstruire notre vivre ensemble. Sachons rester du côté de la raison et de l’humanité et de la fraternité.
La Patrie ou la mort, nous vaincrons !
Guy Hervé KAM
Coordonnateur National du mouvement SENS