La saison de la mangue (mars-juillet) bat son plein au Burkina. Mais à Ouagadougou, dans la capitale burkinabè, les prix restent toujours très élevés pour les vendeurs comme pour les clients. Sur la rive droite et gauche du barrage numéro 2 de Tanghin, dans le secteur 17 de l’arrondissement 4, les vendeuses de mangues espèrent encore une baisse des prix.
Sur des tables alignées le long du barrage, de très belles mangues à la peau orangée et bien arrondies attirent à première vue, mais font reculer lorsqu’on se renseigne sur leurs prix. Des tas de cinq mangues, dont les prix varient entre 500 francs à 2 000 francs CFA. La cherté des mangues en cette saison 2024 est incontestable dans la capitale burkinabè. C’est même devenu un sujet de débats entre clients et vendeurs.
« Cette année-là, les mangues sont trop chères. A cette allure, l’on s’en sortira ? », s’interroge une femme d’un certain âge, en langue mooré, faisant la ronde autour des vendeuses de mangues du barrage pour demander le prix, avant de rebrousser chemin pour disparaître sous le soleil matinal de ce mardi 23 avril 2024.
Vue partielle des cartons de mangues coûtant à l’unité 17 500, 20 000 à 25 000 FCFA à Ouagadougou, selon les vendeuses
« On ne sait pas si vraiment c’est la saison des mangues ou si nous devons encore attendre » … Devant son étal, Sakina Ilboudo, vendeuse de fruits depuis 17 ans, semble perplexe, même si elle garde le sourire. La jeune femme relate qu’elle a abandonné l’école en 2007 et s’est associée à sa grande sœur pour mener ce commerce de fruits au bord du barrage numéro 2 de Tanghin.
« L’an dernier à la même période, on prenait le carton de mangues à 10 000 FCFA. Ce même carton coûte aujourd’hui le double : 20 000 voire 25 000 F. Si tu as eu moins cher, c’est 17 500 FCFA », regrette la jeune vendeuse. Comme si son explication ne convainc pas, elle ajoute : « est-ce que si on gagne moins cher, on va vendre cher ? Non. Mais si tu prends cher, tu es obligé de vendre cher aussi pour avoir ton argent. Sinon même en vendant cher, il arrive que nous vendions à perte ».
Ami Ouédraogo devant son étal de mangues sur la rive droite du barrage numéro 2 de Tanghin
Même justification chez la voisine, Ami Ouédraogo. Selon elle, leurs fournisseurs disent que les manguiers n’ont pas bien produit cette année, parce qu’il n’a pas beaucoup plu et c’est ce qui justifie le coût élevé des cartons de mangues.
« Un bon business, mais cette année, ça n’encourage pas »
« C’est un bon business, parce que les Ouagalais aiment bien manger de la mangue. Et quand ils en voient, ils en veulent, mais c’est l’argent qui devient rare dans ce pays-là. Après avoir demandé les prix, beaucoup laissent tomber », explique Rabiatou Ouangrawa, vendeuse de fruits.
Mais cette idée sur la pluviométrie ne semble pas convaincre Abdoul Rasmané Kiékiéta, assis justement sous un manguier, dans son verger centenaire à côté du barrage. Pour le quinquagénaire, ce n’est pas forcément une question de pluie, c’est le cycle normal de l’arbre, dit-il, tout en précisant qu’il y a des années où les arbres, de façon naturelle, ne produisent pas assez de fruits, parce qu’ils veulent « se reposer » comme les humains.
Abdoul Rasmane Kiekiéta, assis sous un manguier, dans son verger centenaire
« Quand ce sont les arbres, vous vous plaignez. Ils font comme les femmes qui pratiquent le planning familial. C’est parce que ce sont des arbres que vous voulez qu’ils produisent toutes les saisons. Est-ce que vous acceptez d’accoucher chaque année ? », lance-t-il avec un large sourire moqueur.
Il faut rappeler que le Burkina Faso est le leader mondial de la mangue séchée bio et la filière a engrangé un chiffre d’affaire brut de 17 milliards de FCFA en 2021( https://www.investirauburkina.net/secteurs-et-marches/fruits-et-legumes/mangues-un-chiffre-daffaires-brut-de-plus-de-17-milliards-de-f-cfa-en-2021.html).
Yvette Zongo
Lefaso.net
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