Les drames comme Barsalogho sont possibles, parce que nous avons patiemment et méthodiquement sapé les institutions de l’Etat. Il serait difficile à quelqu’un de le nier.
IB nous a trouvé avec nos hypocrisies. Des hypocrisies qui ont fait que nous n’avons jamais pu penser et agir « nation ». Chacun a regardé son nombril, et a décrété que c’était ce nombril le Burkina Faso.
Comme disent les sportifs, on ne sait pas jouer collectif. Des amis de Sankara contre tous les autres. Des amis de Compaoré contre tous les autres. Des amis de Kaboré contre tous les autres. Des amis de Damiba contre tous les autres. Des amis de IB contre tous les autres. On ne peut pas se permettre ce genre de fantaisie en temps de guerre.
Des Burkinabè ont publié des documents militaires ultra-confidentiels dans ce pays, et ils ont été décorés. Alors qu’en matière de trahison contre le pays, il n’y a pas une action plus grave. Eh bien ces traîtres décorés sont aujourd’hui les plus grands patriotes, mobilisant des foules pour stigmatiser des Burkinabè n’ayant strictement rien à se reprocher.
Un exemple. Le président Roch Kaboré a convoqué un groupe de travail des plus hauts gradés, pour réfléchir à une stratégie de lutte contre le terrorisme. Le soir même, le canevas de travail de ce groupe restreint s’est retrouvé sur les réseaux sociaux.
Examinons plus profondément cette affaire ! Le canevas de travail, ça veut dire juste le début. C’est un document qui dit comment et suivant quel calendrier ce groupe va travailler, afin de faire un rapport au président Kaboré. Personne n’a cherché à établir comment un obscur internaute a pu entrer en possession d’un tel document. Forcément, cette fuite vient d’un des hommes qui a participé à ce groupe des plus hauts gradés. Première trahison et premières hypocrisies.
Un Burkinabé qui publie les plans de défense du territoire national cherche quoi ? Qu’il soit en possession de ce document est déjà illégal. Lui, et l’officier qui lui a fourni ce document doivent être arrêtés et jugés. Nul dans ce pays ne s’est interrogé sur ces graves manquements. Deuxième trahison et deuxièmes hypocrisies.
L’essentiel, c’était de pourrir la vie du régime Kaboré. Ces calculs sordides ne peuvent aucunement justifier que les plans de défense du territoire se retrouvent sur les réseaux sociaux. Pourtant, c’est par le même procédé qu’on a enlevé Damiba, qui avait enlevé Roch Kaboré.
Pour accéder au pouvoir, on peut donc trahir toute la nation. Cela semble admis, puisque les traîtres connus se permettent aujourd’hui de jouer les héros, contre ceux qu’ils baptisent eux-mêmes du nom infamant d’apatride. Voilà donc quelqu’un qui a trahi très clairement le Burkina Faso et son peuple. Et ce traître revient dire que des Burkinabè parfaitement innocents sont apatrides. C’est le summum de l’hypocrisie. Et tout le monde trouve cela normal.
La seule façon pour que ça marche droit, la seule garantie qu’il n’y aura pas d’autres Barsalogho, c’est de revenir à nos institutions. Quand nous admirons une belle personne, nous oublions tous que ce sont les os de son squelette qui lui permettent cette démarche gracieuse. Hé bien, les institutions forment l’ossature d’un État.
Toutes les sociétés de tous les pays dans le monde ont mis des institutions, justement parce qu’on ne peut pas faire confiance aux individus et leurs hypocrisies. Si ce qui marche partout dans le monde ne marche pas chez nous, nous devons interroger nos propres comportements. Accuser la terre entière est une hypocrisie de plus, et une lâcheté.
Quittons la haute politique et regardons-nous nous-mêmes ! En temps de guerre. Alors que toutes les attentions doivent être mobilisées sur les impératifs de sécurité. On peut traverser notre territoire en glissant un petit billet au poste de contrôle. C’est-à-dire sans contrôle réel. Et très hypocritement, tout le monde trouve cela normal. Ce n’est pas comme cela que nous allons aider nos combattants qui crapahutent dans la brousse contre l’ennemi. Après ça, on peut toujours crier contre les renégats qui font des affaires avec les terroristes.
Bonne journée à tous, et que Dieu nous donne la bonne compréhension !
Sayouba Traoré
Journaliste à la retraite, Ecrivain