Les audits internes doivent-ils nécessairement être réalisés par des auditeurs internes collaborateurs de l’entreprise ? Eh bien je dirai que non ! Alors, quels auditeurs pour des audits internes efficaces et efficiente ? Faut-il recourir à des personnes internes ou externes pour réaliser les audits internes ?
L’un des principaux enjeux pour les managers est de disposer de ressources suffisantes pour répondre à la demande et aussi de compétences nécessaires pour mener à bien les audits internes. Afin de relever ce défi, beaucoup d’entre eux font appel à des consultants externes pour certaines de leurs activités d’audit interne, contrairement à d’autres qui s’appuient uniquement sur les collaborateurs. Examinons de plus près les avantages et les inconvénients pour chacune de ces deux approches, et faisons le bon choix pour optimiser nos audits internes.
Équipe d’auditeurs internes
L’option la plus simple est de constituer une équipe d’auditeurs internes, c’est-à-dire, des auditeurs internes collaborateurs de l’entreprise (personnel travaillent au sein de l’entreprise en tant qu’employés). Cette option présente un atout irréfutable, celui d’avoir des auditeurs internes qui sont sur place et confère quelques avantages :
Les auditeurs internes connaissent bien l’entreprise, notamment, son métier, ses processus, son historique ainsi que les problématiques ;
Ils ont accès et ont la maitrise de la documentation interne nécessaire à la préparation de l’audit ;
Ils sont les collègues des personnes auditées, ce qui peut faciliter le contact ;
Ils sont impliqués dans le Système de Management de la Qualité (SMQ) de l’Entreprise.
Toutefois, les inconvénients ci-dessous sont à prendre en considération :
La mise en exergue des profils compatibles, qui indique que tout le monde ne devrait pas faire cette mission.
L’exigence d’une formation et d’un recyclage périodique. La formation doit inclure les référentiels audités, la technique d’audit et un exercice pratique d’audit.
Le temps suffisant qui doit leur être accordé pour assurer cette mission. Retenons que la tâche à exécuter par les auditeurs prend en compte la période de la formation, la préparation de l’audit, la réalisation de l’audit et le temps de rédaction des rapports d’audits.
Leurs connaissances des normes et leurs exigences peuvent s’avérer être des limites, car ne pratiquant pas le métier de l’audit de façon régulière. Il leur faut du temps pour gagner en expérience et en pertinence. Notons qu’ils auront besoin d’assurer plusieurs audits pour affiner la technique, la maîtrise des référentiels et la connaissance du Système Qualité ; question aussi de ne pas ‘’se faire éconduire » par les audités. Donc, les premiers audits ne seront pas parfaits. Et même après plusieurs années, le niveau de performance restera en-dessous de celui d’un auditeur de métier, c’est-à-dire un auditeur externe.
L’absence d’un mentor pour les rassurer car, il serait surprenant qu’un nouvel auditeur parvienne à réaliser ses premiers audits en toute autonomie. Un auditeur expérimenté devrait l’aider à délimiter le périmètre, identifier les exigences applicables, les risques, préparer les questions, organiser l’audit, éventuellement y assister et apporter son support à la rédaction du rapport. Cela prendra beaucoup de temps et les responsables devraient pouvoir décharger l’auditeur interne pour cela.
L’absence d’un regard extérieur sur son Système de SMQ. L’auditeur collaborateur n’auditera pas ses activités ; néanmoins, il aura des connaissances sur celles qu’il va auditer ainsi que du SMQ de l’entreprise. Il aura aussi peut-être pris des habitudes liées à la Culture Qualité et à la Culture d’entreprise, et donc rencontrera probablement des difficultés pendant l’audit. Des difficultés à dire quelquefois clairement ‘’les choses qui fâchent‘’ aux personnes qu’il connait bien et surtout à ses responsables hiérarchiques.
En définitive, avoir des auditeurs internes permettra :
De développer un réseau du SMQ. Donc avoir des collègues qui ont le profil, qui s’intéressent au SMQ, qui sont volontaires pour les audits, qui sont mieux formés en qualité et qui contribuent à la démarche d’amélioration. Ils deviendront des ambassadeurs sur lesquels tu vas pouvoir t’appuyer pour les autres activités du système.
De faciliter les interfaces entre processus et / ou services. Il n’y a rien de tel que de faire auditer un processus par un auditeur interne qui est son client ou fournisseur interne ! [1]. Parce qu’avec les audités, ils vont mettre les pieds dans le plat. L’auditeur ira naturellement creuser les sujets sur lesquels il rencontre des difficultés dans la conduite de ses activités normales. Chacun prendra conscience des contraintes de l’autre. Et in fine, cela va faciliter les interfaces.
De contribuer plus à la performance de leur processus de rattachement. Le complément de formation que reçoit l’auditeur interne et le fait de savoir comment fonctionne les autres secteurs, processus et services, l’aideront à être plus performant dans ses activités quotidiennes.
De mieux mieux connaître et de comprendre le fonctionnement de l’entreprise. En effet, très souvent, les collègues ont une perception de l’entreprise centrée sur leurs activités et leurs interlocuteurs.
D’avoir une appropriation et une implication. L’activité d’audit va amener les collègues à mieux comprendre le SMQ de l’entreprise, et à voir comment il est pensé et déployé. Ceci va favoriser leur implication dans le respect de l’entreprise et des exigences qui les concernent dans leurs activités premières.
D’avoir des atouts pour les audits externes. Ayant adopté la posture d’auditeur, les auditeurs internes sauront mieux se préparer de manière autonome avant un audit de certification et aussi, comment gérer les auditeurs pendant les temps d’audit. Ils sauront également anticiper les questions et apporter les éléments de réponse approprier.
De bénéficier d’une vraie Culture d’Amélioration en interne. L’Entreprise auras tout simplement beaucoup plus d’acteurs dans les boucles de vérification de conformité et proposition d’Amélioration. La Culture Qualité se répandra tout naturellement et ne reposera plus uniquement sur le Département.
Équipe d’Auditeurs externes
Une autre option consiste à faire appel à des personnes extérieures à l’entreprise (sont indépendants des Entreprises qu’ils Audits), c’est à dire des experts dans le domaine de l’audit. Ces auditeurs externes sont des spécialistes en la matière ! Ce sont tout simplement des spécialistes, qui très souvent, réaliseront dans ses activités, un mix entre audits, notamment, formation et conseil en entreprise.
Tout d’abord, listons les avantages d’avoir une équipe d’auditeurs externes :
Constructif, car ne connaissent pas les audités, ce qui les aide à établir un dialogue ouvert, constructif et sans à priori. C’est donc un atout pour faciliter les échanges. « N’oublions pas qu’un audit interne efficient doit permettre d’approfondir les sujets problématiques et d’y trouver des solutions adéquates.
Des auditeurs immédiatement formés, experts, expérimentés :
Ils connaissent bien les normes et leurs exigences, et recherchent les preuves de conformité. Les bons auditeurs externes sont des professionnels, donc aguerris à l’exercice de l’audit qu’ils pratiquent régulièrement ;
Ils maîtrisent également les bonnes pratiques et techniques d’audit permettant de répondre aux exigences des normes et savent les adapter parfaitement au contexte de l’entreprise [2].
Un regard neuf porté sur l’Entreprise car les auditeurs externes ne la connaissent pas. Ce besoin de découverte les amènera à poser des questions sur des choses qui peuvent sembler évidentes pour toi et tes collègues, car vous y êtes habitués. Mais eux, non. Les questions de ces derniers peuvent être naïves et peuvent engendrer des réflexions inédites permettant une amélioration du système.
Ils ne connaissent pas les audités, ce qui les permet d’établir un échange ouvert sans préjugés, constructif et sans à priori [2]. C’est donc un atout pour faciliter les échanges. N’oublions pas qu’un audit interne efficace et efficient doit permettre d’approfondir les sujets problématiques et d’y trouver des solutions adéquates.
Proposition de nouvelles idées, car l’auditeur passe une grande partie de son temps dans les entreprises, que ce soit pour ses missions d’audit, de formation ou de conseil. Donc, il détient par expériences, beaucoup de bonnes pratiques, ce qui lui permettra de faire des suggestions.
Expertise sur le référentiel. Les normes font en effet partie des outils de travail de d’auditeur qui en a une meilleure maîtrise. Cela lui procure notamment la capacité d’évaluer avec beaucoup plus de justesse, la conformité aux exigences.
Expertise sur la technique d’audit. Il pratique régulièrement l’audit et il a une maitrise de la préparation, l’animation des réunions d’ouverture et de clôture, les techniques d’interview, la formulation des écarts.
Les collègues ne la lui feront pas à ‘’l’envers ». Les auditeurs expérimentés ont l’art de mettre le nez là où on n’aimerait pas. Ils détectent les signaux faibles et tirent généralement sur les ficelles. De plus, ils savent catalyser un audité trop bavard ou trop silencieux qui tenterait de les enfumer.
Les audits sont orientés selon tes problématiques. Car, au-delà de la stricte évaluation de la conformité, tu peux demander à l’auditeur externe de mettre l’accent sur certains sujets (comme la gestion des incidents, l’approche par les risques etc…). Il sera à l’aise pour faire un focus dessus sans pour autant délaisser les autres points importants.
Peu de sollicitations. L’auditeur n’aura besoin que de quelques documents pour la préparation (descriptions de l’activité, résultats, dernier rapport d’audit) et sera plus autonome après, dans la préparation, la réalisation et la rédaction du rapport.
Tout ceci semble alléchant, sous réserve de prendre en compte les points suivants :
Il faut identifier l’auditeur externe. Pouvoir identifier un auditeur ayant la capacité à s’allier avec les collaborateurs et la direction. Pour ce faire, il devra faire preuve de professionnalisme pour relancer les collaborateurs, fixer des objectifs clairs et respecter les délais. En d’autres termes, les solf skills sont aussi cruciales que les hard skills. Si ces qualités font défaut, cela pourrait compromettre la réussite de l’audit interne.
Si les auditeurs externes maîtrisent les procédures d’audit, ils ignorent souvent tout de votre métier. Une préparation insuffisante peut conduire à des audits trop axés système et pas suffisamment opérationnels ; cela n’améliorera pas le système et donc, causer une perte d’efficacité.
Il faut qu’il soit disponible. Un bon auditeur réputé doit travailler plus de 6 mois à l’avance, donc pas évidement dans le cas d’un audit urgent.
Pas de développement de la Culture d’amélioration en interne. Cela pourrait priver l’entreprise de tous les bénéfices qu’amènent les auditeurs collaborateurs en dehors des temps d’audit : appropriation du système, ambassadeurs, application à leurs activités premières, facilitation des interfaces…
Connaissance limitée du contexte de l’entreprise et du système. Cela ne devrait pas l’empêcher de se prononcer sur la conformité. Mais toutes ses propositions d’amélioration ne seront pas forcément pertinentes, car ne maitrisant pas le contexte global, il s’est basé sur le seul périmètre audité.
Un coût plus élevé. On pourrait se dire que l’option auditeur externe est intéressante, si on a la possibilité d’y accorder le budget. Par ailleurs, le choix d’un auditeur externe aura un coût direct pour l’entreprise, surtout s’il n’a pas été d’un apport réel en termes de valeur ajoutée.
L’intérêt de mixer les deux approches
La mixité pour des audits internes efficients n’est-elle pas la solution ? Idéalement, il serait nécessaire de rassembler les avantages des équipes d’auditeurs internes et auditeurs externes. Associer la connaissance de l’entreprise aux compétences relatives au SMQ, permet de créer des synergies intéressantes en montant une équipe mixte, composée d’auditeurs internes et d’auditeurs externes [2]. Le seul risque finalement serait que les auditeurs internes et externes n’aient pas le même niveau d’expertise ou la même vision de l’approche et ne s’entendent pas. Mais l’équipe mixte reste sans doute le meilleur choix pour réaliser des audits internes efficaces et efficients. Cependant, quel que soit la manière de procéder, on trouve des avantages dont il serait difficile de se priver. Alors, je recommande tout simplement d’appliquer les deux approches afin de bénéficier de tous les avantages, car je reste convaincue que l’équipe mixte reste sans doute le meilleur choix pour réaliser des audits internes efficaces et efficients.
Comment faire concrètement ?
Après avoir créé votre programme d’audit interne, il serait bon d’affecter une partie des audits à tes auditeurs collaborateurs et l’autre à un auditeur externe ou créer des audits mixtes, ce qui renforcera l’expertise des auditeurs internes à chaque audit. Pour optimiser le temps de présence de l’auditeur externe et réduire les coûts, il est nécessaire de regrouper des séquences pour qu’il vienne pour des journées complètes. Cependant, nous devons éviter de planifier tous les audits avec un auditeur externe sur une longue période sans associer les auditeurs internes.
Cela ne favoriserait pas l’acquisition de l’expertise en interne. L’audit interne contribue au processus d’amélioration continue de toute entreprise, afin qu’elle gagne en efficacité et en performance. Au-delà de la notion de contrôle, l’audit interne constitue surtout le moment idéal pour mieux comprendre le système de management de l’entreprise et échanger avec les collaborateurs [3]. Au-delà de la détection de défaillances vis-à-vis d’un référentiel, l’audit met aussi en lumière ce qui fonctionne bien dans votre entreprise. Ceci dans le but d’utiliser ce qui fonctionne pour résoudre ce qui ne va pas. Certaines grandes entreprises ont d’ailleurs créé des services dédiés ayant pour rôle de réaliser les audits internes et de suivre les actions [3]. Ils assurent ainsi une bonne réussite des audits de certification, tout en garantissant l’impartialité.
Malgré les avantages que présentent les audits internes, certaines entreprises n’ayant pas un bon système d’audit interne considèrent qu’il s’agit d’une activité qui ne génère pas de valeur ajoutée. En réalité, sa mise en place permet de détecter les dysfonctionnements en amont, et de réagir rapidement pour proposer des solutions pérennes. C’est pourquoi l’outil devrait être efficace et moteur d’amélioration continue dans les entreprises. Notons donc que l’une des clés de la réussite réside dans le choix des auditeurs internes. t
Dr Bougouma Edith Christiane
Pharm., PhD. en Santé Publique et Microbiologie
(Certifiée en Management de Qualité -Santé-Hygiène Sécurité-Environnement)
BECqualityculture@gmail.com
Références :
1. #37 : Collaborateurs ou prestataire externe pour les audits … – Substack, https://bequa.substack.com/p/37-collaborateurs-ou-prestataire.
2. Quels auditeurs pour des audits internes efficaces, https://www.nordqualiteconseil.com/audits-internes-efficaces/.
3. Audit interne : les 3 étapes clés de sa mise en place – Blog QHSE, https://www.blog-qhse.com/pourquoi-et-comment-creer-son-systeme-audit-interne.
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