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Que de vœux pieux sans aveux !

Chaque année qui passe, nous formulons les mêmes vœux, nous exprimons béatement les mêmes souhaits. Comme si un grand magicien était tapi quelque part et répondra à nos verbiages creux : « à vos souhaits ! » et se réalisera ! Que de babils aux relents débiles, c’est trop facile !

Arrêtez ! Il y en a qui forceront la dose de leur prose pour frimer avec des messages poétiques pleins de rimes, mais à quoi riment tous ces vœux pieux aussi vieux que le monde ? A quoi sert toute cette rhétorique mirifique de fin d’année et de nouvel an si nos cœurs et nos esprits peinent à se renouveler ?

A aucune autre occasion, on n’a jamais scandé l’amour, parfois avec une dent cachée au coin du sourire. Lui, s’apprête à divorcer ; elle a fini par accepter la séparation de corps dans une villa en or. Celui-ci a toujours eu une dent contre sa fratrie de même couvée, de même sang bon sang !

Depuis la mort des parents, ils ne se fréquentent plus ; ils ne se parlent plus ; ils se regardent en chiens de faïence ; ils ont même inculqué leur « animosité fraternelle » à leurs innocents enfants. Ils se détestent et se maudissent mutuellement tout en fréquentant la même église, la même mosquée, le même temple.

Mais entre nous, peut-on prétendre aimer Dieu que l’on ne voit pas et détester ou haïr le frère ou la sœur qui n’est autre que l’image du même Dieu ? L’autre a fini par utiliser avec succès le poison dont on lui avait vanté les « vertus » et qu’il avait acheté à prix d’or pour donner la mort sans le moindre remords.

Où est donc l’amour ? Sommes-nous vraiment capables de nous aimer ? Peut-on avoir la foi, prier, jeûner et cultiver son jardin de haine ? Il y en a même qui tuent et massacrent leurs prochains pour Dieu et au nom de Dieu. On n’a jamais autant invoqué la prospérité comme si des cantines de liasses nous tomberaient du ciel.

Mais qu’est-ce que la prospérité sans la générosité ? Pendant que le voisin d’en face peine à manger une fois tous les deux jours, toi ta poubelle est pleine de délices rassis qui ne demandent qu’à être réchauffés et partagés. Combien disent bonjour ou rendent visite à leur voisin du quartier ?

Combien ont déjà pensé à la veuve du coin au point de lui déposer nuitamment et discrètement un sac de riz et quelques billets de mille ? On ne peut pas donner tout le temps et à tout le monde, mais combien de nantis acceptent donner aujourd’hui sans se faire voir à la télé ?

D’ailleurs, qui a dit qu’il suffit d’avoir les poches pleines pour donner aux autres ? On n’a jamais souhaité le bonheur sur fond de malheur, les mains parfois tachées de sang. Cherchez plutôt à recouvrer la paix que vous n’avez pas en vous et avec vous-même, avant de la souhaiter aux autres.

Qu’est-ce que le bonheur pour un milliardaire qui ne dort pas la nuit, parce que persécuté même dans ses rêves par ses propres compromissions ? A quoi sert l’argent intarissable de l’incurable riche grabataire qui souffre et se soigne en vain sans avoir la chance de mourir en paix ? L’enfer se terre parfois sur terre.

On n’a jamais souhaité autant de fois la santé, mais chaque année, le palu fait les mêmes ravages, le SIDA poursuit sa silencieuse razzia, le tabac continue d’incendier le corps du fumeur, le coronavirus attrape et tue même les vaccinés, nos hôpitaux continuent de manquer de tout, même pour une appendicite, on peut rester sur la table, l’homme en blouse blanche a le blues, parfois sa priorité est loin de la santé.

Cette année, les Burkinabè se souhaitent surtout la paix comme cette paix était déposée quelque part et qu’il suffirait d’aller la prendre. Le retour de la paix tant clamée dépend de l’état de paix intérieure de chaque Burkinabè blessé et meurtri. Tout comme on ne peut maquiller une plaie et se sentir guéri, on ne saurait négocier, troquer ou dealer la paix sans passer par la vérité.

Et la vérité qui se veut juste n’a pas besoin d’être défendue ; elle accouche de la bouche même de l’incriminé ou du coupable ; elle se dit, elle avoue, elle reconnaît après une introspection courageuse et une confession sans complaisance. On ne réconcilie pas les hommes, les hommes se réconcilient.

Point barre ! Au-delà de nos vœux les plus en vogue, des résolutions de bonne volonté, de raison et de responsabilité valent la panacée. Malheureusement, chaque année, c’est le même folklore ; on festoie, on rivalise de joie, on boit comme on se noie pour se réveiller dans l’année nouvelle avec la gueule de bois. Point de bilan, aucune autoévaluation, on marche sur le passé pour naviguer à vue, sans la moindre revue, parfois avec les mêmes bévues.

Comme c’est têtu ! Bonne année à tous ceux qui se battent et se débattent sans relâche et sans être lâches. A ceux qui se laissent abattre par les portes qui se rabattent, sachez que la vie appartient à ceux qui se battent et combattent avec foi et abnégation. Un homme ne se réalise pas avec du peu, avec de vœux pieux ; il s’affirme et quand il s’affirme, il dit : « je veux, je peux ! ».

Puisse votre mental de métal vous servir d’arme fatale contre les adversités banales et surmontables des défis de la vie. Tel est mon vœu pour celui ou celle qui veut, loin des vœux pieux sans aveux.

Clément ZONGO

clmentzongo@yaho.fr

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