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Transformation et commercialisation des noix de cajou:Une activité à visage féminin

Transformation et commercialisation des noix de cajou

Une activité à visage féminin

Troisième produit d’exportation agricole au Burkina Faso, l’anacarde ou noix de cajou occupe une place dans l’industrialisation du pays. Elle est considérée comme une culture à forte potentialité économique et de lutte contre la pauvreté dans les zones rurales et urbaines. Les femmes sont de plus en plus actives dans cette filière. Elles constituent le poumon de la transformation et de la commercialisation des noix de cajou.

Vendredi  21 juin 2024. Il est environ 12 heures 30 minutes au secteur n°22 de Bobo-Dioulasso,. Nous sommes à l’entreprise de transformation et de commercialisation de noix de cajou, non loin du Lycée Professionnel Régional Guimbi Ouattara précisément. A peine le seuil du portail franchi, le vrombissement d’une grosse chaudière nous accueille.  « La vapeur quitte cette chaudière pour arriver sur l’autoclave et la chaleur permet de fragiliser l’amande de cajou afin de faciliter le décorticage », confie la promotrice, Kadidia Diallo sur la fonctionnalité de la machine. Etape par étape, Mme Diallo explique le processus de transformation. « Les femmes s’assurent de la qualité des noix en élevant tous les débris qu’elles passent à la machine qui sert à les tamiser en fonction de leurs tailles », poursuit la promotrice.

À l’issue de cette étape, indique-t-elle, les noix passent dans de gros torréfacteurs sous une température « très chaude ». Selon les explications de Kadidia Diallo, cette étape consiste à mettre les noix de cajou propres et décortiqués dans un torréfacteur à sec pendant 20 à 25 minutes exposées à une chaleur intense variante entre 140 à 150°C.  De cette unité sortent des produits comme l’amande crue et des produits dérivés tel que, les amandes grillées, torréfiées, la pâte à tartiner, la pâte à cuisiner, le savon, des biscuits aux amandes, du tourteau à base d’amande huileuse pour les bétails et même du charbon de cuisine faite à base de la coque des noix.

A en croire Kadidia Diallo, cette unité semi-industrielle spécialisée dans la transformation des noix de cajou a été créée en 2017 et emploie aujourd’hui environ 116 personnes dont 109 femmes. A cause de la rareté et cherté des matières premières  sur le marché, l’usine se désole dame Diallo, tourne au ralenti. Selon elle, ces problèmes sont dus à l’exportation abusive des noix brutes de cajou vers des marchés étrangers. « Le second problème est lié à la mauvaise qualité des noix brutes disponibles sur le marché et aux initiatives de contrôle insuffisantes sur marché », fait-elle savoir.

Les femmes actives

 A Diarradougou, quartier situé sur l’avenue de la Liberté au secteur N°1 de la ville de Sya, nous assistons à une chaîne de travaille au bord de deux magasins jumelés. Dans une ambiance favorable, les hommes déchargent des camions remplis de plusieurs tonnes de noix de cajou. Tandis que les femmes s’assurent de la qualité des noix de cajou en les débarrassant des mauvaises graines.

Le triage des noix de cajou nourrit son homme.

 

Du ramassage des noix dans les champs, au triage des graines, en passant par la transformation jusqu’à la commercialisation des noix de cajou, les femmes sont sur toute la chaine. Ces femmes sont actives dans les entreprises formelles et informelles de l’anacarde. Avec un gain de 400 F CFA par sacs, Sali Ouattara s’occupe du triage des noix brute de cajou chez l’un des commerçants de la ville. Dame Ouattara s’occuper d’enlever les débris végétaux et les mauvaises noix tels que, les noix immatures, atrophiées, vides, piquées ou moisies afin d’obtenir un produit de bonne qualité propre à la commercialisation.

A l’écouter, ce travail qu’elle pratique depuis cinq ans lui permet de soulager un tant soit peu quelques dépenses du ménage. « Ce travail nous permet d’avoir un peu d’argent pour prendre en charge quelques besoins du ménage », indique-t-elle sourire aux lèvres. D’un site à un autre site, le même constat. Au secteur n°15, non loin de la station Marodi, à environ 50 mètres de l’avenue Nelson Mandela, dans une unité de transformation de noix d’anacardes les femmes s’adonnent aux mêmes taches : triage, nettoyage, les mises en sac, etc. Pour Aminata Ouédraogo, c’est travail un peu contraignant qu’elles sont obligées de faire, dit-elle, pour espérer avoir encore le renouvellement de leurs contrats. « Le travail est assez pour nous, normalement on devait se limiter au triage seulement, mais on nous demande de ranger ces sacs, c’est très fatigant », affirme-t-elle. Cette chaîne de travail des femmes est loin d’être terminée, car certaines d’entre elles sont spécialisées dans la vente.

Une activité génératrice de revenu

 Des noix de cajou fraîches, grillées et torréfiées dans les emballages avec ou sans les enseignes commerciales, sur les tables au bord de la rue. Nous sommes au côté Est du grand marché de Bobo-Dioulasso. Les femmes sont à la recherche de leur pain quotidien, pour ces dernières, la vente des noix de cajou est « très bénéfique et rentable ». Au-delà de cette richesse que la vente des noix de cajou procure aux femmes, c’est une activité pérenne qui dure depuis des décennies.

Charifatou Sanou, a hérité de la vente des noix de cajou de sa génitrice. « Nous sommes née et grandi dans la vente des noix de cajou, nous avons hérité cela de nos mamans », nous confie-t-elle avec enthousiasme.  Pour Korotimi Manasé, la vente des noix de cajou transformées est très rentable. Sur le boulevard de l’indépendance, les femmes courent derrière les passagers pour proposer leurs différents produits. Parmi ces produits on y trouve aussi des noix de cajou qu’elles vendent au prix de 4 000 et 6 000 F CFA le kilogramme.

Selon Korotimi Manasé, après avoir acheté les noix décortiquées dans les unités, elles les passent à l’huile pour obtenir une couleur rougeâtre et le goût croustillant. C’est après ces étapes qu’elles les mettent dans les emballages pour la vente. Malgré les économies que cette filière génère pour les femmes, ces dernières font face à de gros risques liés au manque de protection au travail. En témoigne les lésions au bout des doigts de certaines femmes et les mains brûlées des écorceuses travaillant dans certaines unités de transformation. Ces lésions sont causées par le contact des mains nues avec la noix de cajou qui contient un liquide dangereux.

Sur les grandes voiries de la ville, les vendeuses de noix de cajou grillées courent encore plus de risques. Elles sont confrontées à des risques d’accidents qui virent souvent à la mort. « Un jour, pendant que je vendais, un client m’as abordée de l’autre côté de la route, en voulant traverser pour le rejoindre une voiture ma renversée », relate Korotimi Manasé, victime d’un accident lors de la vente.  Malgré ces risques énormes, Korotimi Manasé et ses camarades disent n’avoir aucune autre issue et compte rester toujours résilientes pour affronter les difficultés.

 Des initiatives pour Booster la filière

Selon le directeur du Conseil burkinabè de l’anacarde (CBA), Ouéhimié Clément Attiou, il est nécessaire de renforcer la règlementation du circuit de commercialisation de la noix brute de cajou au Burkina Faso et les opérations de contrôles du marché afin de pallier aux problèmes liés à l’exportation abusive et à la mise sur le marché des mauvaises noix brute de cajou.

Pour lui, le dispositif de contrôle du marché sera renforcé à travers la réglementation et un meilleur suivi du circuit de commercialisation de la noix brute de cajou. « C’est pourquoi le CBA a initié une série de formations et de sensibilisations des producteurs sur les bonnes pratiques agricoles et de post-récoltes. Ce qui pourrait contribuer à améliorer la qualité des noix mises sur le marché », souligne-t-il.

Le CBA, poursuit son directeur, contribue à fournir l’appui-conseil dans le domaine de la production, de la transformation, de la commercialisation, et de la promotion de l’anacarde en poursuivant l’opération de regroupement des producteurs en sociétés coopératives pour négocier collectivement les prix avec les commerçants ou les acheteurs pour leur permettre d’avoir plus de pouvoir de négociation et d’obtenir des prix plus justes. « Le CBA entrevoit le développement de marchés alternatifs à travers exploration de nouveaux marchés pour la noix de cajou brute ou transformée, en plus des marchés traditionnels », confie le directeur du CBA.

A l’en croire, le succès de la lutte contre le non-respect du prix de la noix brute de cajou et de l’accompagnement des acteurs de la filière anacarde repose sur une collaboration « étroite » entre les différents acteurs, notamment les producteurs, les commerçants, les transformateurs, les autorités publiques et les partenaires techniques et financiers. Pour mémoire, le prix plancher de la campagne 2023-2024 de l’anacarde a été fixé à 310 F CFA le kilogramme la noix brutes par un arrêté conjoint des ministres chargés du commerce et de l’agriculture.

BS

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