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Espagne: la lutte contre la désinformation, nouveau cheval de bataille de Pedro Sánchez

Espagne: la lutte contre la désinformation, nouveau cheval de bataille de Pedro Sánchez

Madrid, Espagne

Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez a fait de la lutte contre la désinformation une priorité, avec un plan de « renouvellement démocratique » aux contours encore flous, reposant sur la transposition de règles européennes, mais qui reste sous la menace de ses adversaires.

Quelques jours après la présentation de ce plan, Pedro Sánchez participe mardi à un événement autour notamment de la lutte contre la désinformation, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, avec Lula, le président du Brésil — où un juge a récemment bloqué le réseau social X, à qui il reprochait d’avoir ignoré des décisions de justice liées à la lutte contre les « fake news ».

Le chef du gouvernement espagnol avait annoncé au printemps sa volonté de « régénérer » la démocratie, fustigeant « une usine d’immondices » propageant « désinformation et diffamation ».

En cause? L’ouverture d’une enquête pour corruption et trafic d’influence visant son épouse après la plainte d’un collectif proche de l’extrême droite qui a reconnu s’être appuyé sur des informations de presse non vérifiées.

Le plan gouvernemental, qui doit être progressivement mis en oeuvre jusqu’à la fin de la législature dans trois ans, comprend une trentaine de mesures, dont la création d’un registre public recensant les journaux, leurs propriétaires et leurs revenus publicitaires ou le renforcement du droit à la vie privée et à la rectification des informations erronées.

– « Jamais vu depuis Franco! » –
« Ce sont des mesures qui vont dans le bon sens, selon moi, des mesures qui ne vont évidemment pas régler tous les problèmes (…) mais dans la mesure où elles peuvent aider à accroître la confiance des citoyens dans les médias, je pense que c’est positif », estime Raúl Magallón, professeur au département de communication de l’Université Carlos III de Madrid.

Les opposants politiques du Premier ministre, eux, ont immédiatement torpillé le projet.

« Une offensive contre les juges, les journalistes et les médias, un plan de censure », s’est indigné devant le Parlement le leader du Parti populaire (PP, droite) Alberto Nuñez Feijoó: « Nous n’avions jamais vu ça depuis Franco! », a-t-il lancé en référence à la dictature du général mort en 1975.

« En Espagne, contrairement à d’autres pays, comme la France, principalement en raison de l’héritage de la dictature, on a toujours pensé qu’il valait mieux ne pas réglementer tout ce qui avait trait au pluralisme de l’information, aux médias, etc… », rappelle à l’AFP Raúl Magallón.

Les mesures envisagées par le gouvernement Sánchez sont en grande partie la transposition du règlement européen sur la liberté des médias, adopté en mars 2024 par le Parlement européen… y compris par les eurodéputés du PP.

« C’est une contradiction de plus du Parti populaire (…) mais je pense que le PP va continuer, parce que son objectif est de poursuivre dans son opposition frontale » au gouvernement, prédit auprès de l’AFP Paloma Román, politologue à l’Université Complutense de Madrid.

– « Leader international » –
Un écueil pour Pedro Sánchez: si certaines mesures annoncées par son gouvernement sont la transposition du règlement européen, qui s’impose aux Etats membres de l’Union, d’autres vont en effet nécessiter l’approbation de nouvelles lois.

Le plan du gouvernement ressemble aujourd’hui à une « déclaration d’intentions », résume Mme Román. « Il va mettre du temps à se matérialiser, si cela est même possible », poursuit-elle, rappelant la difficulté à faire émerger des majorités au sein d’un Parlement très divisé.

« Quand il a annoncé son plan (…), il l’a fait en assurant qu’il y aurait un +avant+ et un +après+ dans son mandat », rappelle Cristina Monge, politologue. « Nous avons alors tous pensé que ce plan serait quelque chose de simple, mais nous avons vu que ce n’était pas le cas, donc je ne sais pas exactement comment tout cela va se concrétiser ».

A défaut de faire l’unanimité en Espagne, Pedro Sánchez pourrait y voir une occasion d’accroître sa stature internationale, estime Mme Monge: « Je pense en effet que Pedro Sánchez va vouloir jouer un rôle de leader international sur ce thème de la désinformation, et cette rencontre avec Lula en est un exemple ».

Avec AFP

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