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Burkina/Côte d’Ivoire : Gbagbo Souleymane Koné, le déroutant hôte VIP du Burkina Faso

Après neuf (9) ans d’errance en France, c’est finalement au Burkina Faso que, ironie du sort, Souleymane Koné, alias « Gbagbo Koné » a trouvé le refuge depuis le 10 mars 2025.

Le 30 septembre 2025, Souleynane Koné, c’est son nom à l’état civil, est convoqué à se présenter personnellement à la préfecture de police de Paris, Place Louis Lépine dans le 4è arrondissement, à 11 heures précises pour l’examen de sa demande d’admission exceptionnelle au séjour qu’il a déposée le 19 juin 2024. Il est peu probable qu’il réponde à cette convocation, sauf si, par masochisme, il décide de renouer avec la galère de laquelle il a réussi, avec le soutien de ses avocats, à s’extirper et à quitter la France pour le Burkina Faso, d’autant que ses chances d’être régularisé administrativement sont minces.

La destination Burkina Faso est pour le moins inattendue au regard des propos proprement xénophobes tenus par Souleymane Koné sur les réseaux sociaux, notamment en 2016 contre les « Bourki, parents de Dramane » les Maliens, et plus récemment contre les dirigeants burkinabè. Thèse monstrueuse, n’a-t-il pas ouvertement accusé l’actuel chef d’Etat et ses camarades d’être impliqués dans l’attaque de Gaskindé le 26 septembre 2022 qui a officiellement fait 37 victimes dont 27 militaires, pour justifier le putsch qu’ils devaient conduire le 30 septembre de la année année contre le lieutenant colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba ?

De fait, le choix du Burkina s’est imposé à lui. Ses avocats qui l’ont défendu et obtenu gain de cause le 7 mars 2025 devant le tribunal administratif de Paris avaient demandé qu’il soit expulsé non pas vers son pays d’origine, la Côte d’Ivoire, mais vers le Mali. C’est finalement à destination du « Pays des hommes intègres » qu’il a embarqué le 10 mars où il a été accueilli dans la soirée, sans rancune, en Rockstar par les Wayiyans et conduit au rond-point des Nations-Unies, rebaptisé par ces deniers, « Rond-point capitaine Ibrahim Traoré » où il a animé un meeting.

Le militant politique « Gbagbo Souleymane Koné », très actif sur les réseaux sociaux dans la section de Paris du PPA-CI, le parti de son idole Laurent Gbagbo, pourra attester que l’hospitalité légendaire des Burkinabè est loin d’être une fable.

Notre hôte de marque pourra aussi, on l’espère, tirer à 36 ans la leçon selon laquelle, il faut en permanence, réduire au maximum la bête immonde qui sommeille en chaque homme et surtout, qu’il est plus prudent d’injurier le passé qu’insulter l’avenir.

On ignore toutefois si Ouagadougou, où il a déposé, sans gène et sans méa culpa, pas même un début de contrition, ses pénates, est un point de transit en attendant une destination finale, ou compte-t-il y rester durablement et profiter des charmes de la capitale burkinabè. Ce qui est certain, à l’étape actuelle de sa vie, le Burkina est un havre de paix comparativement à l’enfer parisien dans lequel, il se débattait depuis 2016, date de son arrivée en France.

Pour quels motifs le natif de Kati, dans la région des Montagnes, a-t-il quitté la Côte d’Ivoire pour la France ? Ce qu’on sait, c’est que peu de temps après son entrée sur le territoire français, Souleymane Koné a introduit une demande d’asile auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Les pièces de son dossier ayant été jugées peu crédibles, la demande est rejetée le 11 décembre 2017, une décision confirmée par la Cour nationale du droit d’asile le 23 juillet 2018.

Koné fait appel et sollicite un réexamen. Sans attendre la décision de l’OFPRA, la préfecture de Paris lui délivre le 26 février 2020 une OQTF (obligation de quitter le territoire français) avec une interdiction de retourner en France pour une durée de 24 mois. Il est par ailleurs signalé dans le système Schengen.

Sa situation se corse d’autant que sa demande est à nouveau refusée le 17 novembre 2022, puis confirmée le 22 mars 2023. Koné se fait discret pendant un moment, évite l’expulsion, puis prenant son courage à deux mains, introduit une deuxième demande, malheureusement vite balayée par l’OFPRA qui la déclare irrecevable le 26 avril 2024. Sans titre de séjour, son expulsion devient inévitable d’autant que, selon la préfecture de Paris, il « ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale et qu’il déclare être célibataire et avoir un enfant à charge sans en apporter la preuve qu’il contribue à l’entretien et l’éducation de l’enfant qui vit avec sa mère ».

Pis, le préfet de police considère que Souleymane Koné « représente une menace pour l’ordre public en restant sur le territoire national, son comportement ayant été signalé par les services de police le 26 février 2025 pour rébellion et dégradation de véhicule administratif, l’intéressé étant par ailleurs connu des services de police pour des faits de violence sur personne dépositaire de l’autorité publique et conduite sans permis ».

Le 27 février 2025, le préfet de police lui délivre à nouveau une OQTF et le place en rétention administrative, le temps d’organiser son expulsion vers la Côte d’Ivoire où, croit-il, « il ne craint pas d’être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européennes des droits de l’homme ».

La nouvelle se répand très vite sur les réseaux sociaux et ses partisans, Ivoiriens et non Ivoiriens sonnent la mobilisation pour éviter son expulsion, ou à défaut, une expulsion vers un autre pays que son pays d’origine. Contrairement au préfet de Police, ils ne doutent guère qu’il sera cueilli et soumis à des traitements dégradants par le régime du président Alassane Ouattara avec lequel il entretient des rapports exécrables.

Son cas suscite une vague de soutien et de sympathie dans la diaspora africaine à Paris. Les rendez-vous judiciaires sont des occasions pour elle de dénoncer l’injustice dont il serait victime et la volonté des autorités françaises de faire taire un militant panafricaniste pourfendeur de la françafrique.

Sur le front judiciaire, ses avocats, Me Senda et Me Tadjadit, des spécialistes du droit des étrangers, multiplient les recours pour sauver le « soldat Gbagbo Koné », son identité politique. Par une requête et des mémoires déposés le 28 février, puis le 3 et le 6 mars 2025, ils demandent au tribunal administratif de Paris d’annuler l’arrêté d’expulsion du préfet de police du 27 février ou à défaut, de le reconduire vers le Mali et de mettre à la charge de l’Etat a somme de 1500 euros (un plus de 900 000 F CFA).

Le 7 mars, la décision tombe. Le tribunal administratif de Paris annule effectivement aussi bien l’arrêté du 27 février 2025 que l’interdiction de retour en France pendant une durée de 24 mois et son signalement au fichier du système Schengen. Il condamne en outre l’Etat français à lui verser à Souleymane Koné la somme de 1000 euros (655 000 F CFA).

Légalement, rien ne lui était plus opposable quant à sa présence sur le territoire français. Mais Gbagbo Souleymane Koné a préféré saisir la chance que les autorités burkinabè lui ont offerte et partir. Comme il le révèle lui-même dans une vidéo, c’est le consulat général du Burkina Faso à Paris qui lui a délivré un laisser-passer. Selon une source proche du dossier, c’est une personnalité politique d’Afrique de l’ouest qui a plaidé sa cause auprès des autorités burkinabè pour que lui soit délivré le précieux sésame. Toutefois, sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes n’apprécient que très modérément sa présence sur le sol burkinabè.

Dominique Koné

Kaceto.net

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