Education au Burkina : Les péripéties d’un système éducatif face au Covid-19
Pour circonscrire la propagation de la maladie à coronavirus (Covid-19) au Burkina Faso, les autorités ont pris plusieurs mesures depuis l’enregistrement des premiers cas, le 9 mars 2020. Au nombre de ces mesures figure la fermeture des établissements d’enseignement primaire, secondaire et supérieur le 16 mars 2020 sur toute l’étendue du territoire national.
En plus de l’économie qui a subi un coup dur par la pandémie du Covid-19, l’on peut, à n’en point douter, citer le secteur éducatif qui a été fortement impacté par la maladie en 2020. En effet, en plein deuxième trimestre de l’année scolaire on a assisté à la fermeture des établissements d’enseignement du préscolaire au supérieur au niveau national.
« Nous devons rompre cette chaîne de transmission communautaire qui est, malheureusement, aujourd’hui la chaîne par laquelle se propage le Covid-19 » a précisé le ministre de la communication, porte-parole du gouvernement, Rémis Fulgance Dandjinou, lors d’un point de presse du 24 mars 2020 pour justifier cette décision. Cela a été un coup dur pour le système éducatif. Depuis lors, les ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur se sont mis à la tâche pour organiser la reprise des cours afin de boucler l’année scolaire et éloigner le spectre d’une année blanche.
L’enseignement à distance en attendant la reprise des cours en présentiel
Le Burkina Faso compte 20 000 écoles et scolarise environ 5 millions d’enfants. Mais avant la fermeture totale des classes en mars, 2 512 écoles étaient déjà fermées en raison de l’insécurité et de la violence qui, selon un rapport de l’UNICEF, avaient affecté l’éducation de plus de 350 000 enfants. Face à cette situation, le Pr Stanislas Ouaro, ministre de l’Education nationale, de l’Alphabétisation et de la Promotion des langues nationales, et son équipe ont mis en place un plan de riposte pour une continuité éducative dans le contexte Covid-19.
Ce plan a été adopté par le Conseil des ministres du 16 avril 2020 et proposait deux initiatives majeures à savoir, l’utilisation des technologies de l’information et de la communication pour assurer la continuité éducative à distance et la reprise de cours proprement. Selon lui, l’enseignement à distance consistait à enregistrer des cours qui seront par la suite diffusés sur les médias publics et privés, les applications avec ou sans connexion internet. Ce plan aussi annonçait des mesures d’accompagnement des établissements en vue de la reprise des cours, pour que le respect des mesures barrières soit effectif.
Les mesures barrières pour riposter contre le Covid-19 dans le milieu éducatif
Parmi les mesures d’accompagnement, on peut noter le nettoyage et la désinfection des établissements scolaires dans les zones touchées par le Covid-19, le port des masques de protection, le lavage des mains… « Les masques sont en confection et deux masques lavables et réutilisables seront remis gratuitement à chaque élève du public comme du privé, le personnel administratif et les enseignants. Le coût des masques pour les élèves s’élève à plus de 3 milliards de F CFA. Douze millions de masques de protection seront acquis. Ces masques seront confectionnés avec du tissu 100% coton (Faso dan Fani) par la confédération Coton-Textile-Habillement avec l’appui de l’armée.
D’un coût global annuel de 8 253 975 220 FCFA, le plan de riposte sera financé par l’Etat et l’ensemble des partenaires techniques et financiers de l’éducation », a précisé Pr Ouaro au cours de la présentation du plan aux gouverneurs des 13 régions et les directeurs régionaux du ministère le 24 avril 2020. Au plan administratif, l’heure était au réaménagement du calendrier scolaire, mais aussi à l’adhésion de l’ensemble des acteurs concernés. En effet, c’est pratiquement après trois mois de « vacances forcées », soit du 19 mars au 1 juin 2020, que les élèves en classe d’examen et les étudiants ont repris la route de l’école.
Réouverture des classes et organisation des examens scolaires
L’on se souvient de l’annonce faite par le Pr Stanislas Ouaro au cours du point de presse du 27 mai 2020 indiquant la reprise des cours le 1e Juin 2020 pour les classes d’examens (CM2, 3e et Tle). A la même date, il a proclamé la validation de l’année scolaire 2019-2020 pour les classes intermédiaires. Au niveau de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation, ministère dirigé par le Pr Alkassoum Maïga, la reprise progressive des activités pédagogiques dans les institutions d’enseignement supérieur a été fixée au lundi 11 mai 2020.
C’est après cette longue période d’interruption des activités pédagogiques liées à la Covid-19, que le ministère en charge de l’Education nationale a organisé les examens scolaires 2020. Le coup d’envoi pour les épreuves écrites et orales a été donné le 14 juillet 2020 (CEP et BEPC) à Banfora, et le 3 août 2020 pour le Baccalauréat au lycée mixte de Gounghin à Ouagadougou.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la tenue de ces examens, en cette période critique, était un véritable casse-tête pour les acteurs du monde éducatif. Mais le pari a réussi, car de ces examens sont sortis d’excellents résultats. En effet, le ministre de la communication, Rémis Fulgance Dandjinou, a annoncé, à l’issue du Conseil des ministres du jeudi 30 juillet 2020, une hausse des résultats par rapport à la session 2019.
On note 66,06% contre 55,11% en 2019 au CEP ; 36,47% contre 26,62% en 2019 au BEPC ; le CAP et le BEP 63,37% contre 46,86% en 2019. Pour le Baccalauréat le Pr Stanislas Ouaro a annoncé le 21 août 2020 un taux de réussite de 39,35% contre 36,83% en 2019. Pour l’année scolaire 2020-2021, la date du 15 septembre 2020 a été retenue pour la rentrée administrative et le 1er octobre pour la rentrée pédagogique. Un plan de rentrée scolaire 2020-2021 a été élaboré pour permettre une année académique réussie et apaisée. L’exécution de ce plan a pris fin en novembre 2020.
Les acquis et innovations du secteur éducatif
Malgré le contexte sécuritaire et social difficile, le système éducatif burkinabè, en plus de la validation de l’année scolaire 2019-2020, des réalisations ont été enregistrées aussi bien au niveau du ministère de l’Éducation nationale que de celui de l’Enseignement supérieur.
Au niveau du ministère de l’Éducation nationale, de l’Alphabétisation et de la Promotion des langues nationales on peut citer entre autres, la réception définitive de 29 CEG construits dans les régions du Centre, du Centre-Nord et du Plateau central dans le cadre du Projet de construction d’infrastructures éducatives (PCIE/Jap). Il est financé par le Japon et mis en œuvre par le ministère de l’Éducation nationale, de l’Alphabétisation et de la Promotion des langues nationales (MENAPLN).
A cela s’ajoute la réception définitive des CEG de Méguet et de Wayen (commune de Zam) dans la région du Plateau central et des CEG de Kosyam, de Kalgondin et de Tangzougou à Koulouba dans la Région du Centre. Des CEG de Bouan dans la région de la Boucle du Mouhoun, de Arbollé, de Boulsa, de Tiarako et dans l’arrondissement 10 de la ville de Ouagadougou.
On peut noter aussi l’inauguration de l’Ecole nationale des enseignants du primaire (ENEP) de Tenkodogo, désormais direction régionale de l’Institut national de formation des personnels de l’éducation du Centre-Est.
Au titre des innovations pour dynamiser le système éducatif et rompre avec son caractère assez généraliste, des actions ont été posées dans le sens de la promotion des séries scientifiques, de la culture de l’excellence et du développement de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels (EFTP).
Ainsi 8 lycées scientifiques dont deux (02) à dimension nationale ont été réalisés. À noter que la première promotion des élèves affectés dans ces établissements a réalisé un taux de réussite de 100% au Baccalauréat série C session de 2020. Concernant l’enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) on note la construction de 5 collèges d’enseignement et de formation techniques et professionnels (CEFTP), 5 lycées professionnels et 2 lycées techniques.
L’élargissement des zones universitaires et l’introduction du numérique
Au niveau de l’Enseignement supérieur de la recherche scientifique et de l’innovation on peut noter entre autres,
l’inauguration de l’université Thomas Sankara ; la construction d’amphithéâtres (700 places) à l’Institut des sciences (IDS), (750 places) à l’université Thomas Sankara et à l’université Norbert Zongo (UNZ).
la construction des laboratoires dans les universités de Dédougou (1), de Ouahigouya (2), et de Fada (2) ; ainsi qu’à l’Institut de recherche en sciences de la Santé (IRSS) ; à l’INSS et à l’INERA Farakoba.
La création d’une Université virtuelle (UV-BF).
La mise en place de 16 espaces numériques ouverts (ENO) rattachés à l’UV-BF.
Le programme « un étudiant, un ordinateur » qui est en cours, a permis de distribuer près de 20 000 ordinateurs aux étudiants des différentes universités publiques du pays. D’autres amphithéâtres et des bâtiments pédagogiques sont en cours de construction dans ces mêmes universités ainsi que la création de nouvelles universités dans les régions et le renforcement du vivier d’enseignants.
Sur le plan de la recherche scientifique, on note la mise en place du Comité ad hoc dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 ; la validation des programmes nationaux fédérateurs de recherche (PRONAFER) ; la sélection des tradipraticiens pour leur contribution à la lutte contre le Covid-19 ; le recrutement d’enseignants dans les universités, soit 100 par an ; l’élargissement des zones universitaires ; le renforcement de la capacité de la plateforme « Campusfaso » qui, en plus de permettre l’inscription en ligne, offre désormais la demande d’intégration en cité en ligne ; la digitalisation des cartes de restauration des étudiants.
Judith SANOU
Dofinitta Augustin KHAN (stagiaire)
Lefaso.net
Source : lefaso.net
Faso24