Burkina : Observateur, Dialogue Sans Frontières recommande au gouvernement de garantir la sécurité post-électorale des personnes et des biens
Au cours d’un déjeuner de presse organisé, ce samedi 28 novembre 2020 à Ouagadougou, l’association Dialogue Sans Frontières a fait le point de sa mission d’observation au cours des élections présidentielle et législatives du 22 novembre 2020. Malgré les insuffisances relevées dans l’organisation à certains niveaux, les conférenciers notent qu’il n’y a pas eu de distorsions entre les résultats des bureaux de vote et ceux proclamés par la Commission électorale nationale indépendante.
Pour l’observation du double scrutin du 22 novembre dernier, l’association Dialogue Sans Frontières, présidée par l’ancien ministre de la Culture et ambassadeur, Philippe Ouédraogo, a déployé 120 observateurs dans neuf provinces du Burkina Faso avec l’appui du WANEP (Réseau Ouest-Africain pour l’Edification de la Paix en anglais). Il s’agit de l’Oubritenga, du Boulgou, du Bam, du Sanmatenga, du Kadiogo, du Zondoma, du Yatenga, du Lorum et du Houet. Chaque observateur a reçu la somme de 20 000 F CFA sur le budget de 4 815 000 F CFA dont disposait l’association.
- (De la droite vers la gauche) Mme Traoré Alima Déborah, ancienne Médiateur du Faso, Salamata Sawadogo, ancienne ministre de la Justice et Harouna Sawadogo, président d’honneur du Tocsin
Selon le secrétaire général de l’association, Damase Zouré, qui avait à ses côtés la trésorière Fatoumata Sagnon/Vicens, les observateurs étaient présents quinze minutes avant l’ouverture des bureaux de vote et ont assisté au dépouillement des bulletins. Ils avaient la possibilité de rester dans le même bureau ou aller dans d’autres bureaux pour l’observation. L’association dit avoir eu recours également à l’application KoboCollect pour élaborer un questionnaire qui lui a permis de collecter un certain nombre de données.
- Damase Zouré, SG de Dialogue Sans Frontières
Constats faits sur le terrain
Dans le point fait par Damase Zouré, il ressort qu’à Bobo-Dioulasso, par exemple, des bureaux de vote ne disposaient pas de tout le matériel nécessaire tels que les bulletins des législatives. Cela obligeait certains présidents de bureaux à en chercher dans les bureaux de vote qui en disposaient.
En plus des difficultés qu’avaient certains électeurs à retrouver leur nom sur la liste électorale, les observateurs disent également avoir noté la fusion par endroits de certains bureaux de vote. « L’accès pour certains handicapés n’était pas aisé car certaines écoles ne disposaient pas de rampe d’accès », a indiqué M. Zouré qui rapporte également l’exiguïté de certains bureaux notamment dans le Kadiogo qui n’arrivaient pas à contenir les observateurs des partis politiques.
- Une vue des participants au déjeuner de presse
De l’observation de la centaine de bureaux de vote, Dialogue Sans Frontières relève qu’il y avait en moyenne un agent de sécurité pour trois bureaux de vote. Tout de même, l’association indique n’avoir pas observé d’affiches de propagande dans les bureaux de vote. Quant aux urnes, même si elles étaient correctement scellées, les observateurs notent qu’elles étaient bourrées par moment. Ils ont également relevé que des membres de bureaux de vote méconnaissaient leurs rôles et ont voulu accomplir le vote pour des personnes malvoyantes.
Globalement, Dialogue Sans Frontières note que les votes se sont bien passés, qu’il n’y a pas eu de distorsions entre les résultats des bureaux de vote et les résultats proclamés par la CENI.
Des recommandations pour améliorer le processus électoral
Pour l’amélioration du processus électoral, Dialogue Sans Frontières a formulé des recommandations aux différents acteurs. Au gouvernement, il suggère de poursuivre et renforcer le dialogue avec tous les acteurs politiques, de garantir la sécurité post-électorale des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire. Le réaménagement des horaires de démarrage et de clôture du scrutin en tenant compte des impératifs de sécurité dans certaines zones, l’accélération du processus de la réconciliation nationale, l’inclusion des personnes déplacées internes dans la perspective des élections municipales sont également des recommandations faites au gouvernement.
A la CENI, Dialogue Sans Frontières suggère entre autres d’améliorer la gestion du fichier électoral, de renforcer les capacités des membres des bureaux de vote et de se doter d’un mécanisme de réponse rapide avec des numéros verts pouvant apporter des solutions aux cas de dysfonctionnement et irrégularités.
Quant aux partis politiques, il leur a été demandé de poursuivre la sensibilisation des militants sur la non-violence en période électorale et de toujours privilégier les voies légales pour le règlement de litiges.
Enfin, les médias, eux, ont été invités au respect des règles d’éthique et de déontologie et à s’abstenir de diffuser des informations qui pourrait exacerber toute crise.
- Philippe Savadogo, président de Dialogue Sans Frontières
« Ça ne sert à rien de regarder dans le rétroviseur, il faut tirer des leçons »
« Dans l’histoire d’un pays, le processus électoral ne s’arrêtera jamais. C’est-à-dire que cela va venir de manière cyclique et il faudra l’améliorer. Toute œuvre est perfectible et nous avons voulu relever des points qui peuvent améliorer ce processus dans les années à venir. Ça ne sert à rien de regarder dans le rétroviseur, il faut tirer des leçons », a déclaré le président Philippe Savadogo.
Ce dernier s’est réjoui que le scrutin se soit déroulé sans « mort et violence physique notifiée ». Il a également rappelé que l’association avec d’autres organisations telles que WANEP (Réseau Ouest-Africain pour l’Edification de la Paix) a rencontré la CENI, les partis de la majorité et ceux de l’opposition après la déclaration de l’opposition politique. « C’est une grandeur d’esprit que nous soyons arrivés au terme, avec un retour au devoir de la patrie de la nation. La paix est au-dessus de nos regards parfois partisans », a rappelé Philippe Savadogo.
En rappel, l’association Dialogue Sans Frontières a été créée en 2017 et contribue à accompagner les processus de règlement des conflits entre les peuples, les cultures et les religions. Ses thématiques d’intervention sont entre autres le développement durable, l’équité et le genre, les droits humains, les cultures endogènes, les médias et sociétés, etc. L’association peut compter sur des ambassadeurs de bonne volonté tels que Michel Kafando, président du Faso sous la transition, Dr Cheick Aboubacar Doukouré, le Révérend Moïse Napon et le Larlé Naaba Tigré.
HFB
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