Financement participatif en Afrique : « Eviter de toujours se retourner vers les ressources extérieures », dixit Sibry Tapsoba, ancien cadre de la BAD
Actuel président du conseil d’administration du cabinet Capitalis-SAS, basé à Abidjan, Sibry Tapsoba, dans cette interview accordée à Sidwaya, fait un diagnostic sans complaisance de la problématique de la mobilisation des ressources internes pour le financement du développement en Afrique et y propose des solutions innovantes, tel le financement participatif.
Sidwaya (S) : Vous êtes le président du Conseil d’administration de la firme Capital- SAS, basé à Abidjan. Pouvez-vous nous présentez cette structure ?
Sibry Tapsoba (S.T.) : Avec des amis, nous avons trouvé que la question de la mobilisation des ressources locales mérite une plus grande attention, car les pays africains sont endettés et rencontrent des difficultés dans la mise en œuvre des projets de développement. Sans trop rejeter l’apport des ressources extérieures, l’objectif est de dire que nos pays doivent pouvoir mobiliser conséquemment des ressources locales propres. Les ressources extérieures que nous partons chercher viennent en réalité de l’épargne intérieure des pays donateurs. Pourquoi vont-ils nous donner cet argent pour que nous nous développions ? Ont-ils les mêmes intérêts, les mêmes ambitions que nous ? Pour nous, la question de l’amélioration de la mobilisation des ressources nationales pour le financement du développement doit être au cœur de tous les débats. Capitalis-SAS est une firme basée à Abidjan et qui ambitionne de mobiliser le maximum de ressources locales pour nos Etats africains, mais aussi de trouver des mécanismes de mobilisation des ressources extérieures qui n’endettent pas nos pays. Et ces mécanismes existent. Malheureusement, nos Etats sont harcelés par des institutions de financement qui leur proposent des projets fin-prêts au point qu’ils n’ont pas le temps de voir ailleurs ! Ces types de ressources qui n’endettent pas l’Etat prennent du temps mais lorsque la mécanique est bien prise, les choses coulent naturellement. A Capitalis-SAS, l’objectif est d’explorer toutes les opportunités de financements. Et nos Etats ont plusieurs possibilités à travers, entre autres, les ressources naturelles, les dynamiques nationales de transformation des produits locaux, etc. Nous nous positionnons exclusivement dans la mobilisation des ressources, des investissements locaux, au profit de l’Etat mais aussi du secteur privé. Il faudrait que l’on évite ce réflexe de toujours se retourner vers les ressources extérieures pour financer notre développement. Il faut chercher les solutions en nous-même d’abord. Car, nous avons assez de ressources dans nos pays ! Les deux entreprises les plus rentables de notre pays, le Burkina Faso, sont celles qui fabriquent l’alcool, bien que nous soyons un pays à plus de 50% musulman. L’Angleterre, à un certain moment de son histoire, avait de sérieux problèmes financiers. Le pays est sorti de cette situation, lorsque le gouvernement a pris des mesures protectionnistes mais aussi visant à freiner l’excès d’alcoolisme. Cela ne veut pas dire que les Anglais ne boivent plus, mais à l’époque, cela a été l’une des dynamiques qui a permis à l’Angleterre de réorienter ces ressources qui partaient dans l’alcool vers l’épargne et l’investissement.
S : Après plus de 60 années d’indépendance, l’Afrique peine encore à assurer convenablement le financement de son développement. Comment expliquez-vous cette situation ?
S. T. : C’est une question qui peut faire l’objet d’une thèse de doctorat. Nous pouvons l’aborder sur plusieurs angles et retomber souvent sur les mêmes causes. Mais, je dirai que cela est dû à notre très grande dépendance de l’aide extérieure. Je ne sais pas ce qu’on nous a injectés pour que nous soyons très attachés à l’aide extérieure. Il en est de même à l’intérieur de nos pays où les populations dépendent trop de l’Etat, attentent tout de lui ! Cette dépendance est aussi beaucoup liée à notre passé colonial, au système éducatif français ; car les choses sont un peu différentes dans les pays anglophones. La deuxième raison est due au fait que la culture de l’épargne peine à s’ancrer dans nos pays. A une certaine époque, à l’occasion des mariages ou baptêmes, les gens étaient fiers de montrer les carnets d’épargne ouverts pour les mariés ou les enfants. Aujourd’hui, cela est révolu. Au contraire, on va s’endetter pour se marier, s’acheter une nouvelle voiture qui est un poste de dépense ! Alors que l’on doit aller le maximum possible vers des postes qui nous apportent des revenus ! La création des postes de dépenses doit se faire sur la base de la nécessité. La troisième raison est liée au manque d’engagement dans la collecte des ressources financières locales. Il n’y a pas un véritable mécanisme transparent qui permet de collecter l’impôt, les taxes dans les marchés et autres. On a un monsieur qui y passe, récupère l’argent auprès des commerçants. Mais rien ne garantit que la totalité de cet argent ira dans les caisses de l’Etat ! Dans beaucoup de pays de la sous-région, la collecte de l’impôt se fait à travers une plateforme électronique confiée à des privés, avec une clé de répartition bien définie entre la commune et l’Etat central. Ce mécanisme a permis à des pays de passer des taux importants de déperdition de l’impôt à des taux de collecte très élevés. Cela facilite la reddition des comptes. Je ne sais pas pourquoi le Burkina Faso tarde à entrer dans ce système ! La quatrième raison est liée au manque d’unités de transformation dans nos collectivités locales. Je ne parle pas d’abord d’industrialisation. Quand on va arriver à la question sur le financement participatif, j’expliquerai comment les gens peuvent accepter d’adhérer, s’impliquer, de mettre leur agent dans des projets de transformation locale. Le cinquième problème est lié à ce qu’on appelle en finances publiques, le gap budgétaire. J’ai vu un cas qui m’a beaucoup sidéré où le pays n’arrivait pas à boucler son budget. Dans ce cas de figure, vous avez beau faire, vous devenez un gouvernement vulnérable. Les partenaires vous malmènent, vos fonctionnaires sont dans la rue, vos créanciers vous talonnent tous les jours ! Le gap budgétaire doit être la priorité de tout gouvernement. Face au déficit budgétaire, il y a deux solutions : réduire le train de vie de l’Etat ou augmenter les impôts. La dernière option est difficile à opérer car plus de la moitié de la population n’a pas un revenu salarial et beaucoup d’acteurs privés sont dans l’informel. Il y a probablement d’autres raisons mais en réglant ces cinq préoccupations, nos pays devraient pouvoir avancer dans la mobilisation des ressources internes.
S : Aujourd’hui, vous faites partie de ceux qui pensent que le financement participatif constitue l’une des alternatives au financement du développement de l’Afrique. Que renferme ce concept ?
S. T. : Le financement participatif n’est pas si nouveau, il a commencé dans les pays anglophones, notamment aux Etats-Unis. Il vient du mot crowdfunding, crowd qui veut dire masse, peuple. Il s’agit donc d’un financement populaire. Il implique que celui qui a une idée de projet, la mette sur une plateforme ou la partage avec sa communauté, de sorte que ceux qui sont intéressés par le projet acceptent de mettre leur argent, en y injectant 5000 F CFA ou 10 000 F CFA. Au lieu donc de chercher un investisseur qui va vous apporter 1 milliard F CFA, vous cherchez au niveau local, 10 mille investisseurs qui vont apporter chacun 10 000 F CFA ! Cet investissement a plusieurs avantages. D’abord, ce n’est plus une affaire d’une seule personne ou de X et frères mais devient un projet collectif, avec l’implication et le contrôle des parties prenantes pour le succès du projet.
S : Concrètement, quels sont les mécanismes ou modalités opératoires du financement participatif ?
S. T. : Les mécanismes du financement participatif sont simples. La première des choses est de créer une plateforme d’information de la communauté sur votre idée de projet. Elle peut être digitale. Toute personne intéressée signe un document de respect des clauses du projet afin d’éviter les éventuels piratages ou vols d’idées. En matière d’investissements ou d’épargne, il y a trois choses qui retiennent l’attention des gens : la sécurité de l’investissement, la liquidité et l’accessibilité. Ce dernier élément est très important. J’ai rencontré des Burkinabè en Côte d’Ivoire, notamment dans la boucle du cacao, qui sont des milliardaires mais qui ont peur de déposer leur argent en banque. Car, ils ne sont pas sûrs d’en disposer quand ils veulent comme ils veulent. Par exemple, le monsieur dépose 1 milliard FCFA dans sa banque ; le jour où il a besoin de son argent, la succursale de la banque en région n’est pas en mesure de lui donner 200 millions pour qu’il gère urgemment une affaire. Il y a problème ! Le financement participatif est rassurant, car ceux qui ont mis leur argent dans le projet ont des moyens de contrôle de la gestion, surtout qu’aujourd’hui, il y a des textes qui encadrent l’activité et peuvent conduire les contrevenants en prison. La deuxième étape consiste à se focaliser sur les éléments de mise en œuvre du projet qui peuvent être confiés au porteur de projet, qui lui-même, peut s’ouvrir à d’autres compétences ! Le succès du projet réside dans la possibilité qu’il a de recruter l’expertise locale, au sein de la communauté. Car il n’est pas indiqué de collecter l’argent de la communauté pour un financement participatif et faire appel à des experts français ou chinois pour venir gérer le projet. Ceux qui ont injecté leur argent sont davantage rassurés quand ils voient que leurs enfants y sont employés ! La mise en place d’un mécanisme de redevabilité constitue le dernier élément important dans le financement participatif. Il s’agit de faire en sorte que le porteur du projet puisse rendre compte de manière régulière et transparente. L’instauration de la confiance est un élément capital.
S : A qui s’adresse le financement participatif ?
S. T. : La beauté du financement participatif est qu’il s’adresse à tout le monde. Une femme, un paysan ou un jeune peut lancer un projet de financement participatif. Ce qui est important ici est qu’on n’est plus dans le jeu de cache-cache villageois où les gens gardent jalousement leurs projets. Il n’y a pas meilleure chose que de mobiliser la communauté pour un projet qui va bénéficier à celle-ci.
S : Quels en sont ses avantages ?
S. T. : L’avantage du financement participatif réside dans le fait qu’il permet de mobiliser la communauté, de créer un mouvement d’ensemble. Prenons l’exemple d’un projet de construction d’un barrage porté par un jeune, avec un système permettant au projet de générer de l’argent et de rémunérer ceux qui ont contribué à sa réalisation en mettant leur argent. Lorsque que ce projet de retenu d’eau connait du succès, il devient un problème de développement résolu pour la communauté, qui va se tourner vers autre préoccupation et avancer ainsi. A Capitalis-SAS, nous considérons que le développement est beaucoup plus une question de groupe, d’ensemble et non d’individus. Malheureusement, nous oublions très souvent cela. Quand on est dans une dynamique de projet de groupe, il y a toujours quelqu’un pour t’interpeller quand tu ne vas pas dans la bonne direction. Dans un financement participatif, quelqu’un te dira que si tu n’améliores pas la qualité du produit ou si tu ne fais pas ceci ou cela, notre projet ne réussira pas ! S : Peut-on dire que le financement participatif constitue une sorte de retour à ce que Pr Joseph Ki-Zerbo appelle le développement endogène ? S. T. : Oui, il s’agit de cela. Nos anciens comme Joseph Ki-Zerbo, Nazi Boni, Thomas Sankara, etc. ont développé des idées solides. Quand j’étais élève à l’Ecole Normale de Ouagadougou (actuel Lycée Bogodogo), j’ai eu la chance de suivre une conférence du Pr Joseph Ki-Zerbo. Jusqu’aujourd’hui, je me souviens de ce qu’il a développé et qui est toujours d’actualité. Il disait que la jeunesse constitue l’avenir ; mais si les jeunes commettent les mêmes erreurs que leurs ainés, l’Afrique est foutue ! Malheureusement, nous sommes en train de commettre les mêmes erreurs. Pire, nous transférons à notre jeunesse la responsabilité de gérer nos pays, sans lui avoir montré le cap. Il faut faire confiance aux jeunes et à leurs idées. Au lieu de cela, on leur tourne le dos et souvent on confisque leurs projets. C’est du capitalisme mal assimilé ! J’ai toujours dit à certains hommes politiques, il ne sert à rien d’être riche tout seul. Nous devons avoir des champions nationaux ; nous n’en avons pas. Il faut soutenir les jeunes pour qu’ils deviennent ces champions. Le financement participatif participe à ce processus de fabrication des champions en soutenant le porteur du projet.
S : Sur le plan culturel, n’y a-t-il pas des freins au développement du financement participatif sous nos tropiques, surtout quand on est habitué aux projets d’entreprises individuelles ?
S. T. : C’est une dynamique qui se met en place lentement. Car il est difficile d’aller très vite avec le financement participatif. Il implique une gestion collégiale à mettre en place. Ce qui, culturellement, n’est pas aussi simple à faire ; le projet pouvant, par exemple, être porté par le plus jeune, avec des risques de conflits avec les ainés. Mais en réalité, le financement participatif n’est pas nouveau, il était pratiqué dans nos sociétés traditionnelles. Mais nous avons tout abandonné pour entrer dans le capitalisme mal assimilé ! Je demande toujours à mes amis d’enfance, quel est votre projet de vie ? Avez-vous l’impression d’apporter quelque chose à votre communauté ? Les Burkinabè ne sont pas tous individualistes. Si l’on a l’opportunité de mettre en place un projet pilote à financement participatif qui marche, cela va faire tache d’huile !
S : Au niveau politique, l’Etat n’a-t-il pas un rôle à jouer pour la vulgarisation de cette approche de développement ?
S. T. : Le rôle de l’Etat est de mettre en place des textes, un cadre institutionnel et juridique favorable. Une fois que ce cadre existe, les gens vont y opérer. Mais l’Etat peut voir une idée fantastique et décider d’accompagner le porteur du projet en lui apportant des ressources ! C’est le travail que le Fonds burkinabè de développement économique et social (FBDES) est en train de faire. En dehors de cela, l’Etat n’a pas forcément besoin de mettre de l’argent dans le financement participatif.
S : L’un des freins au développement des PME reste l’accès au financement, notamment bancaire. Le financement participatif constitue-t-il une solution adaptée à cette catégorie d’entreprises ?
S. T. : Il faut éviter de faire du financement participatif une alternative à tout. Il est une modalité qui doit être mise en place à côté des autres modalités. A mon avis, on ne peut pas être un pays assis sur un sous-sol riche comme le nôtre et continuer à tendre la main aux autres pour demander des ressources, cela n’est pas normal. Il faudrait un cri d’appel à nos autorités pour qu’elles revoient le code minier afin de permettre à l’Etat d’actionner un certain nombre de sociétés minières, pas telles qu’elles sont mises en exploitation suivant le modèle actuel. Mais de sorte que l’Etat puisse utiliser ces mines en garantie et avoir les ressources nécessaires pour les projets de développement ! L’endettement n’est pas un problème ; le problème réside dans ce qu’on fait de l’argent de la dette. Si les revenus générés par la dette contractée sont gérés de manière correcte et transparente, l’Etat sera à mesure de rembourser la dette. En s’endettant pour investir dans la construction d’infrastructures comme l’autoroute Ouagadougou-frontière de Côte d’Ivoire, en moins d’une dizaine d’années, non seulement la dette sera remboursée, mais aussi les taxes routières collectées constitueront un fonds qui permettra de contribuer à la construction d’autres autoroutes. Personne ne croyait au troisième pont d’Abidjan mais il a été remboursé avant l’échéance ! La Côte d’Ivoire est en train de faire l’autoroute Abidjan/frontière du Burkina. Si l’on n’y prend garde, le temps que le Burkina Faso commence sa partie, la Côte d’Ivoire aura fini de rembourser son investissement. Mais payer par qui ? Par nous ! Il faut qu’on se réveille ! Nous avons plus d’une dizaine de mines, pourquoi attendre un financement chinois pour faire cette autoroute ! Nous pouvons affecter exclusivement les ressources d’une mine à la construction de cette infrastructure ! Cela peut durer trois, cinq ans.
S : Pouvez-vous expliciter davantage l’idée d’utiliser les mines comme garantie pour avoir des financements ?
S. T. : Personne ne vous donnera de l’argent sans garantie ! La garantie n’est jamais touchée si vous respectez vos engagements. Si vous empruntez 500 millions de dollars pour construire l’autoroute que vous ne payez pas, se posera évidemment un problème. D’où la nécessité d’une gestion stricte des ressources générées par l’endettement.
S : Cela est-il possible avec des sociétés minières totalement privées, étrangères ?
S. T. : Une fois que vous donnez la mine à un privé, national ou étranger, vous ne pouvez plus y retourner pour donner cette mine en garantie pour obtenir des ressources pour financer des projets de développement ! On peut trouver un mécanisme pour dire qu’à la fin d’un certain nombre d’années d’exploitation, la mine revient à l’Etat. Tout dépend des clauses du contrat. Cette mine de l’Etat peut être mise en garantie pour construire telle route ou infrastructure.
S : Au niveau local, les collectivités territoriales n’arrivent pas à mobiliser des ressources propres pour leur développement, avec près de 80% de leur budget financé par l’Etat, les ONG, les PTF. Où réside le problème et comment s’en sortir ?
S. T. : Nous sommes en train de regarder les textes en la matière ! Si c’est la commune qui gère toutes les recettes sur son ressort territorial, elle doit pouvoir mettre en place un système qui lui permet de générer des ressources. Et l’une des solutions peut résider dans la digitalisation de la collecte. Cette digitalisation doit être confiée à un privé et non gérée par l’Etat ! Ce privé ne peut gagner de l’argent qu’en collectant le maximum de recettes. On peut même lui coller l’obligation de mobiliser 80% ou 90% des recettes sur telle période. Mais quand vous logez une telle plateforme aux services des impôts, il n’est pas évident qu’elle soit efficace. Car elle sera soumise aux humeurs des agents des impôts ! Je sais qu’il y a des droits acquis et qu’il est difficile d’y toucher mais il faut régulièrement poser les bonnes questions et y apporter les réponses adéquates. Par exemple la question de l’assurance-maladie universelle est intéressante. Mais comment faire en sorte qu’elle puisse profiter à tous les Burkinabè, surtout les plus démunis ? C’est une grosse question ! S : Autrement, nos pays ont les moyens de mobiliser les ressources à l’interne pour financer le développement ? S. T. : Tous les pays du monde sont obligés, de temps en temps, de se tourner vers les ressources extérieures. La COVID-19 a ouvert nos yeux, en montrant qu’on peut faire des choses à l’interne ! C’est dommage que jusque-là, aucun pays africain n’ait pu trouver un remède. Mais, je comprends que les enjeux étaient énormes ! Nous n’avons pas forcément besoin d’une recherche sophistiquée mais une recherche endogène qui apporte des solutions à nos problèmes.
S : Cela me permet de bondir sur la question de la recherche. Peut-on dire qu’elle n’occupe pas la place qui doit être la sienne dans le développement de notre continent ?
S. T. : C’est évident ! J’ai passé dix ans au CRDI. Au cours de mes trois dernières années, j’ai été le directeur pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre qui regroupe 24 pays. Nous avons financé plusieurs projets de recherche, y compris au Burkina Faso où nous avons financé le programme PTCI pour le troisième cycle en économie. Nous avons mis en place des réseaux de recherche sur l’éducation, les langues nationales, la santé, l’environnement, etc. La plupart des résultats de ces recherches dorment dans les tiroirs de nos ministères. Nous les ignorons alors qu’ils sont connus en Europe, surtout au Canada. Nous ne donnons pas à la recherche la place qu’elle mérite. Contrairement à ce que nous pensons, la recherche n’est pas unique ; elle est biaisée par rapport à la culture, aux enjeux géostratégiques, à ce que les utilisateurs vont en faire. Le Burkina Faso doit faire ses propres recherches, explorations, les contrôler. Par la suite, il pourra, par appel d’offres, dire que nous avons tel minerai dans telle zone ; et inviter ceux qui sont intéressés à postuler pour l’exploitation, dans les conditions définies par le Burkina ! La recherche, dans ce sens, il faudrait que l’Etat s’y mette. Et le Burkina fait partie des pays de l’Afrique francophone qui a plus de compétences, intègres, travailleuses. Nos chercheurs sont très bons ; il faut leur donner les moyens de travailler et de s’épanouir dans la recherche.
Interview réalisée par
Mahamadi SEBOGO Windmad76@gmail.com
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